Newsletter S'inscrire à notre newsletter

Magazine

Transport urbain

Le trolleybus, avenir du bus électrique?

Le comité trolleybus de l’Union internationale des transports publics (UITP) s’est réuni du 8 au 10 juin 2016 sur la côte balte polonaise, à Gdynia, sous le thème de l’électromobilité. Réunion résolument marquée par l’optimisme, puisque pour les participants, le développement du bus électrique mène d’évidence au choix du trolleybus, quitte à effectuer des démarches technologiques hardies, à l’exemple du réseau invitant, le PKT Gdynia.

Le comité trolleybus de l’UITP a été créé en 2004, à partir du comité bus de l’Union, présidé par le russe Serge Korolkov, et qui, dix années plus tard, regroupait 156 des 310 réseaux de trolleybus aujourd’hui exploités dans le monde (voir encadré page 58).

Retours d’expériences et innovations

La traditionnelle rencontre annuelle du comité, organisée cette année du 8 au 10 juin à Gdynia sur le thème de l’électromobilité dans le transport public, a été l’occasion de mettre en avant les solutions variées qui peuvent y mener, avec au final le trolleybus comme référence incontournable.

Une séance plénière s’est tenue avec l’association Elliptic, qui réunit chercheurs et industriels. Le professeur Olgierd Wyszomirski, président de l’AOT locale, a d’abord présenté le réseau de Gdynia et la politique des transports de la ville, et Marta Woronowicz, responsable du développement au PKT Gdynia (exploitant du réseau, voir encadré page 60), un bilan de la première année d’expérience des trolleybus hybrides (caténaires plus batteries). Puis, Gabor Németh, responsable du secteur trolleybus au BKV de Budapest(1), a exposé les modalités de la transformation, en 2014, de 18 bus de construction hongroise Ikarus en trolleybus, à l’aide d’une motorisation électrique du hongrois Ganz et des supercapacités du groupe polonais Medcom. Son compatriote Attila Nadai, responsable du réseau de Szeged(2), au sud du pays, présente une expérience comparable avec un Volvo B7 et six Citaro Mercedes 0 520 équipés de chaînes de traction Cegelec avec renforcement du châssis, auxquels s’ajoutent 13 trolleys Skoda équipés de batteries leur donnant une autonomie hors caténaires de 7 à 10 km. « En comparaison d’une acquisition de matériel neuf, nous avons économisé 42 % dans le cas d’un véhicule monocaisse d’une longueur de 12 à 18 mètres, et 21 % dans le cas d’un articulé. L’essentiel des coûts relève du temps de travail nécessaire à la transformation qui se situe entre 4 000 et 6 000 heures, et de l’achat d’équipements qui totalisent de 170 000 à 200 000 €, selon les modèles à transformer. » Un investissement qui se serait rapidement retrouvé dans la baisse des frais d’exploitation, avec un coût kilométrique par rapport l’autobus qui serait passé de 0,6 à 0,40 €.

Après que Serguei Korolkov a présenté une rétrospective du trolleybus en Russie et les nouveaux matériels en cours d’introduction, le représentant du groupe américain Microwast a exposé les solutions nouvelles de batteries dites LPCO, chargeables en 15 minutes, proposées par l’entreprise dans le cadre de son plan CCT (Clean City Transit, transport urbain propre). Des équipements avec batteries en toiture (24,84 kW) sont actuellement testés en service commercial sur des bus londoniens et sur des trolleybus pékinois, ces derniers avec 2 km de lignes hors fil.

Autre industriel, Solaris. Le constructeur polonais a produit 1 037 trolleybus et 1 332 bus hybrides et électriques en vingt ans (plus 160 tramways). Son représentant, Adam Zielinski, directeur à l’export pour l’Est européen et le Proche-Orient, a présenté les expériences de batteries avec supercapacités et les systèmes de chargement en station. Ainsi, le Primove Bombardier pour les bus et les trams sans caténaires, qui est notamment testé à Braunschweig et à Berlin.

Slawomir Jerzykowski, de l’entreprise d’électronique Medcom, installée depuis 1988 près de Varsovie, a exposé les solutions d’unités auxiliaires et de propulsion pour les trolleybus et les bus électriques, principalement les systèmes de supercapacités. Il a rappelé son expérience de conversion des bus en trolleys à Gdynia (voir encadré page 60) et a détaillé le système Medcom APU (Auxiliary Power Unit) qui associe caténaire, petit générateur diesel et batteries équipées supercapacités. Ce système est actuellement expérimenté sur le réseau de Lublin, alors que Gdynia et Tychy ont choisi l’option sans diesel.

Hans-Jorg Gessler, représentant du constructeur helvète Hess au comité trolleybus de l’UITP, préconise les solutions IMC (In Motion Charging), mises au point avec Vossloh Kiepe et qui visent la recharge en ligne d’une batterie lithium-ion de 100 kW (980 kg). Cette solution vient d’être testée à Lyon, à partir d’un trolley bi-articulé de Lucerne (voir encadré page 61). Tout électrique, elle est appelée à remplacer les diesel auxiliaires sur les trolleybus, mais pose des questions d’enjeux technologiques pas encore clarifiés faute de recul quant aux batteries, aux durées de chargement et de vie. Aussi, Erik Lenz de Vossloh Kiepe, qui rappelle les caractéristiques de l’IMC et ses différentes solutions d’alimentation (plug-in, pantographes/perches, etc.), évoque les inconvénients encore existants du côté du câblage et des durées de temps de charge des batteries qui varient de 5 à 25 minutes selon la taille du véhicule et sa vitesse en ligne. « En même temps, même s’il y a des pertes en ligne, cette charge en ligne a l’intérêt d’être moins coûteuse, puisque la consommation d’énergie se répartit sur toute la journée sur tous les véhicules, au lieu d’être concentrée la nuit sur la flotte entière », constate-t-il en évoquant les modélisations existantes(3).

L’avenir est-il au trolleybus?

En séance plénière, où intervenaient aussi bien les membres du comité trolleybus UITP que les adhérents de l’association Elliptic, Michael Glotz-Richter, représentant du réseau urbain de Brême, a tenu à rappeler, en guise de préambule aux débats, que si la voiture électrique émet moins de polluants, elle tient tout autant de place dans l’espace urbain que la voiture classique. C’est pourquoi, le programme européen Civitas 2020, qui associe 33 partenaires dans huit pays (sans la France!), privilégie les solutions électriques de transport public pour désencombrer la ville.

De son côté, Thorald Knote a présenté le choix complexe qui se présente au réseau allemand de trolleybus d’Eberswalde (2 lignes). Il voudrait équiper électriquement sa ligne de bus la plus chargée, avec une combinaison caténaire et chargement en ligne, grâce à une douzaine de Trollino Solaris équipés de batteries. « Reste à déterminer la longueur de caténaire supplémentaire, le nombre de trolleybus à acquérir en sus du parc actuel et les besoins de stations de recharge au terminus ou dans les arrêts intermédiaires. À l’hiver 2016-2017, nous commencerons par des essais de captage et de retrait de perches en ligne pour affiner le système »(5).

La ville italienne de Cagliari, en Sardaigne, possède un réseau de trolleybus de trois lignes (54,1 km), desservies par 5 véhicules Socimi, 16 Trollino Solaris et 11 Van Hool. Elle est le lieu d’essais réalisés dans le cadre du programme européen ZeEUS (Zero Emission Urban Bus System) qui vise à favoriser les innovations électriques dans les transports. CTM, l’exploitant du réseau, lance en 2016-2017 un Demo Test, explique Francesco Carreda, responsable du développement. « Quatre trolleys Solaris, deux équipés d’un auxiliaire diesel et deux autres de batteries, seront exploités sur une ligne de 17,3 km, dont 14 % sans caténaires, la même ligne s’allongeant à 25,8 km en été, dont 44 % sans caténaires. Des tests contrôlés sur la base de 97 clés de performances doivent mener au choix final de motorisation. »

À Solingen, comme l’explique Conrad Trouiller, c’est le choix du IMC qui a été fait pour expérimenter des véhicules avec perche plus batteries remplaçant les auxiliaires diesel, « avec pour objectif de faire passer l’électromobilité à 70 % du trafic des transports urbains d’ici 2020, dans le cadre d’un programme dit E 2020 ».

Alors, quel trolleybus?

On peut, sinon conclure, du moins constater que tous ces témoignages d’expérience et les débats qu’ils ont suscités ont finalement pour résultat de démontrer que le développement de l’autobus électrique ne peut très logiquement que mener… au choix du trolleybus! Notamment à celui du trolleybus tout électrique, associant la perche et la caténaire bifilaire classique à des batteries embarquées qui remplacent le classique moteur auxiliaire diesel. Un auxiliaire qui reste le bienvenu en cas de travaux nécessitant la déviation temporaire d’une ligne hors de ses caténaires, mais qui n’est que très peu utilisable en véritable service commercial, essentiellement en raison de sa faible puissance, sauf à alourdir le poids du véhicule et quitte à réduire le nombre de places offertes aux voyageurs. Des solutions que ne recherchent pas particulièrement les exploitants de transports urbains…

Ces trolleybus d’un nouveau genre, curieusement dénommés hybrides puisqu’ils sont à la fois électriques avec perche et électriques avec batteries, peuvent être exploités de façon totalement opposée. D’une part, avec la possibilité d’éliminer les installations filaires dans les centres historiques ou dans le cas de points singuliers où l’installation de la caténaire poserait problème. D’autre part, avec la possibilité inverse de la non-installation de la caténaire aux extrémités de lignes où le trafic est moins dense, ou qui ne sont exploitées que saisonnièrement. Dans le second cas, la charge de la batterie en ligne par la caténaire devrait suffire pour une courte section terminale. Si la section sans caténaires est longue, l’installation d’équipements de type biberonage destinés à l’alimentation électrique des trolleybus dans les stations, voire seulement aux terminus, s’impose.

Le dernier mot de la rencontre appartient au président Serguei Korolkov qui, en conclusion des débats, estime qu’aujourd’hui l’électromobilité urbaine se trouve littéralement à portée de main. En effet, « tandis que des solutions exotiques attirent l’attention dans la recherche de l’autonomie électrique, la réalité est que le trolleybus offre le véritable arrière-plan de la mobilité de ce type ».

(1) Chemin de fer suburbain, métro, tramway, bus et funiculaire, le BKV exploite en plus 14 lignes de trolleybus (77 km) avec 102 véhicules qui transportent plus de 700 000 voyageurs par jour, soit 11 % du trafic du réseau.

(2) Un réseau de 34 km de lignes qui exploite 68 trolleybus, y compris les véhicules convertis.

(3) Un ratio consommation de 3,4 MW au lieu de 21 MW, et un coût de 2,2 M€ au lieu de 35,6 M€ pour 100 bus électriques. L’application de la modélisation aux trolleybus apporterait également des surprises.

(4) Gdynia expérimente une solution de ce type entre la ligne principale du réseau et un parcours final sans caténaire créée en bord de mer.

Retour au sommaire

Auteur

  • Michel Chlastacz
Div qui contient le message d'alerte

Envoyer l'article par mail

Mauvais format Mauvais format

captcha
Recopiez ci-dessous le texte apparaissant dans l'image
Mauvais format

Div qui contient le message d'alerte

Contacter la rédaction

Mauvais format Texte obligatoire

Nombre de caractères restant à saisir :

captcha
Recopiez ci-dessous le texte apparaissant dans l'image
Mauvais format