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Rétrospective

Berliet PCMRE, Paris passe à l’étage supérieur

Entre 1966 et 1977, la RATP a exploité des bus à deux niveaux dans les rues de la capitale: les Berliet PCMRE. L’idée est simple: moins de surface au sol et davantage de capacité qu’un bus standard. Critiqués avant leur mise en service, les PCMRE ne convaincront pas.

Au milieu des années 1960, la longueur des autobus parisiens est encore limitée à 11 m. La RATP, soutenue par les exploitants de réseaux urbains, se lance alors dans le bus à étage. Le but est de fluidifier le trafic parisien en réduisant l’encombrement au sol tout en augmentant la capacité des véhicules. Répondant à cette demande, Saviem, Verney et Berliet présentent leurs modèles à la profession en 1963. Chez Berliet, il s’agit du PCM, décliné en version PCMR pour la RATP, et PCMU pour les réseaux de province.

Le PCMRE (à étage) est avant tout un PCMR raccourci de 1,02 m afin d’apporter une illusoire compacité dans la circulation parisienne. Comme le PCMR, il dispose d’une caisse légère en aluminium et d’une suspension pneumatique intégrale. Le nécessaire abaissement du châssis du PCMRE lui impose un essieu avant spécifique et un pont à double réduction surbaissé. La chaîne cinématique se fonde sur des valeurs sûres en associant un moteur MAN imposé par la RATP (MAN D0836 HM 8U réglé à 135 ch) à une boîte Wilson (type HVD 60 MM, 4 AV + AR). Pour leur part, la direction et le circuit électrique doivent être repensés par rapport à ceux du PCMR. Afin d’abaisser le centre de gravité, l’étage supérieur doit être léger. Dans ce but, il est réalisé en résines polyester renforcées par des fibres de verre et, pour Berliet, la nouveauté consiste à fabriquer l’étage en une seule pièce.

Un bilan pratique globalement négatif…

Avec moins de 10 m de long, le PCMRE est haut de 4,35 m! Ce qui oblige d’avoir recours aux moyens modernes pour son lavage extérieur. De plus, sa hauteur entraîne des chocs contre les branches des arbres ou des panneaux de signalisation. Les défenseurs du bus à étage avancent que le PCMRE apporte un grand nombre de places assises. Or celles-ci se trouvent à l’étage et intéressent principalement des usagers « médiocrement agiles » qui n’osent pas emprunter l’escalier d’accès. De plus, la hauteur sous plafond du niveau supérieur apparaît clairement inconfortable avec seulement 1,70 m. Bien que pneumatiques, les suspensions sont perçues comme beaucoup trop fermes. Enfin, alors que le PCMRE prétend fluidifier le trafic par sa compacité, l’allongement des déplacements des voyageurs augmentent les temps d’arrêt en station. Tout cela est mis en évidence dès 1966 par les essais en ligne du prototype. Cependant, la direction de la RATP passe outre, considérant que la formule nécessite l’équipement d’une ligne complète pour être pleinement évaluée.

…et un coût d’exploitation relativement élevé

Mais l’usage montre que, passée la curiosité initiale, l’étage supérieur du PCMRE est sous-occupé et sa capacité de 99 places reste donc théorique et, en service, tombe au niveau d’un PCMR de 70 places. De plus, le PCMRE impose le maintien du receveur, ce qui génère un coût d’exploitation élevé. À celui-ci s’ajoute un coût d’acquisition supérieur de 48,7 % par rapport à celui d’un PCMR. Suite au prototype, 25 véhicules sont commandés. Les PCMRE sont initialement engagés sur la ligne 94 (Gare Montparnasse–Levallois-Perret) à partir de 1967-1968. Dès le 17 février 1969, ils sont mutés sur la ligne 53 (Opéra-Porte d’Asnières). Leur réforme intervient en 1977, mais leur originalité vaut à beaucoup d’entre eux une seconde vie en véhicule associatif, magasin ambulant… Pour l’exploitant, le PCMRE laisse le souvenir d’un gadget coûteux, fragile et finalement inutile. Quant à Berliet, qui n’a fait que réaliser le PCMRE à la demande de la RATP, il sera sanctionné en étant injustement perçu comme « trop cher » par les réseaux urbains.

Qu’en reste-t-il aujourd’hui?

La fibre, outil de personnalisation, même en petite série.

Comme l’autorail panoramique construit par Renault en 1959 (série X4200 SNCF), le Berliet PCMRE n’emploie les fibres de verre noyées dans des résines polyester que pour un nombre réduit de ses pièces. Toutefois, dans les deux cas, ces pièces sont immenses! Les carrossiers de l’époque semblent vouloir éprouver ce matériau. À leur manière, ils réalisent de véritables coques de bateau avec ces toitures d’un seul tenant. Aujourd’hui, on préférera construire des modules juxtaposables et donc adaptables à différentes dimensions de véhicules.

Le mariage polyester-fibres de verre est ainsi mis à profit pour des pièces de toutes dimensions. Celles-ci offrent par exemple un moyen facile de personnalisation ou d’actualisation des faces avant. Dans le monde du tramway où les bases techniques sont relativement peu nombreuses, chaque réseau peut disposer d’une face avant qui lui est propre grâce à la compatibilité de ce matériau composite avec la production en petites séries.

Capacité en longue distance avec deux niveaux.

Spectaculaires, les cars à deux niveaux apportent une capacité augmentée en exploitant au mieux la longueur autorisée. Par leur allure imposante, les Neoplan Skyliner, Setra S431DT ou Vanhool TDX25 Astromega sont les vaisseaux-amiraux des flottes qui les exploitent. Mais ils ne sont pas pour autant une panacée. Outre leur hauteur, qui apporte son lot de problèmes, ils ne sont rentables que totalement remplis car il faut amortir leur surcoût.

L’impériale réinvente la traversée touristique de Paris.

L’exploitation rationnelle du Berliet PCMRE suppose la montée des passagers à l’étage, puis leur descente. Les usagers parisiens ne se sont pas convertis à ce parcours imposé à bord. Il n’en reste pas moins que l’attrait touristique du niveau supérieur est indéniable, libérant une vue exclusive sur la capitale. Aussi, au tournant des années 2000, les bus à impériale découverte ont fait leur grand retour dans Paris, prioritairement à des fins touristiques (Big Bus Paris, Paris l’OpenTour).

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Auteur

  • Loïc Fieux
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