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Interview de Nathalie Courant, directrice générale de carPostal: « Innover, c’est parfois dire non »

Directrice générale de CarPostal France depuis 2009, Nathalie Courant se déclare confiante dans l’avenir et ambitionne de conforter encore ses positions sur les villes moyennes et l’interurbain. Sa recette du succès: un subtil mélange d’innovation et de pragmatisme.

Bus&Car-Connexion: CarPostal est surtout présent sur l’est de la France. Quel est votre modèle de développement? Quels sont vos objectifs?

Nathalie Courant: Nous sommes effectivement davantage présents dans l’est et le sud-est de la France. Cela tient d’abord au fait que notre siège français se trouve à Lyon et que nous ne souhaitons pas nous éparpiller. Nous voulons consolider et mailler notre territoire tout en continuant à bien faire ce que nous savons faire. Nous restons sur des agglomérations de taille moyenne, assurons la desserte des territoires intermédiaires, et nous positionnons comme partenaire des collectivités, ainsi que des transporteurs de voyageurs indépendants avec lesquels nous travaillons de manière pertinente. Nous avons réalisé 100 millions de chiffre d’affaires en France en 2016, et nous visons 150 millions en 2020. Cette progression raisonnée, pourra être atteinte par réponse aux appels d’offres de transport public ou par croissance externe.

BCC: En quoi votre Mobility Lab, à Sion, est-il un atout pour le marché français?

N. C.: La possibilité de déployer en France des technologies que nous avons expérimentées avec l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EFPL), la Haute École spécialisée de Suisse occidentale, le Canton du Valais et la Ville de Sion, est une vraie opportunité pour les autorités organisatrices avec lesquelles nous travaillons et qui peuvent profiter du résultat de nos recherches. Nous avons ainsi créé des écrans souples, des Dyn Paper qui affichent les horaires des bus et peuvent être mis à jour par portable. En testant les navettes autonomes Navya à Dole, Lyon et Sète, nous préparons une solution de Transport à la demande (TAD) qui sera moins coûteuse pour tout le monde. Cependant, il ne s’agit pas d’abuser des technologies. Nous restons pragmatiques et nous posons d’abord la question de savoir en quoi une nouvelle technologie apporte un avantage aux voyageurs. Innover, c’est parfois dire non.

BCC: Ces technologies étant cofinancées par la Poste suisse, l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EFPL), la Haute École spécialisée de Suisse occidentale, le Canton du Valais et la Ville de Sion, les proposez-vous gratuitement en France?

N. C.: Le financement du transport et de ses innovations est un vrai sujet, car la mobilité est indispensable et doit être à la portée de tous. Mais elle a un coût et nous pensons que la gratuité n’est pas une solution, parce qu’elle empêche les investissements. De plus, le paiement du service permet de maintenir une équité territoriale entre les zones densément peuplées et celles qui le sont moins. C’est pourquoi, même en Suisse, les cantons qui nous commandent une solution technologique paient pour l’usage de cette solution.

BCC: La concurrence entre les modes est-elle aussi forte en Suisse qu’en France?

N. C.: Il n’y a pas de concurrence entre les modes en Suisse. Les opérateurs de transport routiers et les opérateurs publics s’accordent et se coordonnent pour accompagner les salariés, les autorités organisatrices, les voyageurs et les villes dans cette passionnante mutation que vit aujourd’hui le transport. Tout est mis en œuvre pour une véritable et efficace intermodalité.

BCC: CarPostal a été attaqué pour concurrence déloyale, au motif que votre maison-mère finançait vos activités en France. Qu’en est-il exactement?

N. C.: Les attaques dont CarPostal France a été l’objet sont circonscrites au département de l’Isère. Sur l’ensemble des motifs invoqués, les parties adverses ont toujours été déboutées, quelles que soient les actions intentées, que ce soit au tribunal administratif, auprès des autorités de la concurrence ou au pénal. Il reste aujourd’hui une seule procédure en cours en appel devant le tribunal de commerce.

Je tiens à préciser que CarPostal France est une société en bonne santé. Nous avons été soutenus au démarrage de l’activité par notre maison-mère, ce qui est tout à fait normal. Ces aides avec clause de retour à meilleure fortune ont été en partie remboursées depuis.

BCC: La réforme territoriale voulue par la loi NOTRe met-elle en danger l’expansion de CarPostal en France?

N. C.: Non, car le niveau régional peut favoriser une réflexion plus élargie en bassins de vie, ce que ne permettent pas toujours les frontières administratives plus réduites. Pour une région, il est sans doute pratique d’avoir affaire à une entité régionale qui s’appuie sur des partenaires locaux pour négocier globalement plutôt qu’avec de multiples interlocuteurs. De plus, certaines régions ont délégué la gestion des transports aux départements. Entre les agglomérations qui se développent et la dimension régionale, il y a une place. Notre implantation géographique est justement un atout dans ce contexte, puisque nous sommes à même de favoriser les synergies.

BCC: Vous siégez depuis 2011 au conseil d’administration de l’Union des transports publics et ferroviaires (UTP). Qu’attendez-vous de l’actuel gouvernement?

N. C.: Tout d’abord, nous sommes satisfaits d’avoir retrouvé un ministère des Transports de plein exercice, confié à Élisabeth Borne, une femme dont la compétence est reconnue par tous. Nous souhaitons bien évidemment que le secteur soit accompagné dans l’application de la loi sur la Transition énergétique, avec des aides aux collectivités qui doivent renouveler leurs flottes de véhicules. Nous attendons également le lancement d’un nouvel appel à projets, peut-être moins orienté sur les modes lourds que les précédents, de manière à soutenir l’innovation, y compris sur les territoires peu denses. Enfin, il est absolument nécessaire de sécuriser le financement des transports, en sanctuarisant le versement transport (VT), ou en travaillant sur des taxes ré-affectables.

BCC: CarPostal vient de perdre la délégation de service public pour le réseau de Mâconnais-Beaujolais agglomération, au profit de Transdev. Quel commentaire cela vous inspire-t-il?

N. C.: C’est la première fois que nous ne sommes pas renouvelés depuis notre arrivée en France, en 2004. Ce sont les règles du jeu de la concurrence, que nous respectons. Le contrat a par ailleurs été attribué avec une différence de prix de plus de 10 % entre l’opérateur choisi et CarPostal. Pas de regret donc, car nous n’aurions pas pu nous aligner. Cela n’exclut néanmoins pas une réelle déception compte tenu du travail de fond mené par les équipes depuis 2009 sur ce territoire.

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Auteur

  • Sandrine Garnier, Michel Grinand
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