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Interview: Christophe Najdovski, maire adjoint de Paris chargé des transports, des déplacements, de la voirie et de l’espace public

« Le tout électrique n’est pas la solution pour le bus à Paris »

L’adjoint au maire en charge des Transports détaille les grandes orientations de la Ville de Paris en matière de transport routier de voyageurs: déploiement du Grand Paris des bus, transition énergétique, accueil des cars de tourisme et des services librement organisés…

Bus&Car Connexion: Le Grand Paris des bus prévoit de revaloriser le réseau francilien. Comment la Ville de Paris va-t-elle accompagner sa mise en œuvre?

Christophe Najdovski: Nous souhaitons redonner la priorité au bus, améliorer sa vitesse commerciale pour accroître son attractivité. Pour cela, nous travaillons avec Île-de-France Mobilités, la RATP et la direction de la voirie et des déplacements de la Mairie de Paris, afin de déterminer les aménagements nécessaires pour accompagner la restructuration du réseau. Nous utilisons principalement deux outils: les couloirs de bus et les quais.

Les couloirs de bus prennent des formes diverses: voies réservées, contre-sens bus avec des mises à sens unique de certaines voies, où la circulation des bus restera possible à double sens… Concernant les quais bus, nous savons qu’il faut éviter les arrêts réalisés en évitement où le véhicule doit se déporter et quitter sa voie pour desservir l’arrêt. Désormais, nous privilégions les arrêts de bus en ligne ou en avancée, ce qui garantit un meilleur accès, permet au bus de rester prioritaire dans sa voie de circulation. Ce genre d’aménagement garantit également l’accessibilité de la ligne aux personnes à mobilité réduite. Dans le cas d’un arrêt en évitement, la présence d’obstacle ou de véhicules en stationnement gênant empêche trop souvent le bus de s’approcher correctement du trottoir, ce qui rend inopérante la palette prévue pour les PMR.

BCC: Avez-vous les moyens de mieux faire respecter les aménagements dédiés aux bus?

C. N.: On voit de plus en plus de véhicules emprunter les voies de bus alors qu’ils n’y sont pas autorisés, ou même y stationner. Nous avons demandé à la Préfecture de police d’agir pour mieux contrôler et sanctionner ces infractions. Un dispositif de vidéoverbalisation a été déployé, sans donner les résultats escomptés. Les choses vont changer à partir du 1er janvier 2018, avec le transfert à la Ville de Paris de la compétence sur les agents de surveillance de Paris (ASP), aujourd’hui sous la responsabilité de la Préfecture. Nous allons développer cet outil de vidéoverbalisation pour mieux faire respecter les aménagements. Je suis également très favorable à l’idée d’équiper les bus de caméras embarquées, qui permettraient de constater les infractions en direct. Nous y travaillons avec Île-de-France Mobilités et la RATP.

Les ASP seront déployés dans l’espace public, et auront la possibilité de sanctionner les infractions et le stationnement gênant. L’incivisme que l’on constate vient en grande partie de l’absence actuelle de contrôle. Cela concerne aussi bien le stationnement payant que le stationnement gênant. L’objectif est de mettre en place une politique d’ensemble qui inclura le contrôle du stationnement payant et celui du stationnement gênant. Les moyens humains ne suffiront pas à eux seuls, d’où le recours aux outils de vidéoverbalisation.

BCC: La RATP va convertir 80 % de sa flotte de bus à l’électrique en 2025. Quelles sont les conséquences concrètes dans l’adaptation des équipements parisiens?

C. N.: La transformation de la totalité du parc bus de la RATP est du ressort de l’autorité organisatrice, Île-de-France Mobilités et de sa présidente, Valérie Pécresse. La Ville de Paris souhaite que le délai de 2025 soit tenu et que 100 % des bus en circulation soient propres à cette échéance. La question est: comment organise-t-on cette transition? La Ville de Paris n’a jamais prétendu que le tout électrique était la solution. La technologie GNV est immédiatement disponible, sans surcoût important par rapport au diesel, contrairement à l’électrique. Il faut une discussion sur la proportion entre l’électrique et le bioGNV. L’autre sujet est celui de l’adaptation des dépôts de bus, qui concerne aussi bien Paris que d’autres territoires en Île-de-France. Voyons avec l’État comment adapter les contraintes réglementaires et les normes qui empêchent parfois d’évoluer vers la transition énergétique.

BCC: L’accueil des cars de tourisme et des SLO ne satisfait pas les professionnels. Où en sont les réflexions?

C. N.: Le dialogue, qui n’a jamais été rompu avec la FNTV et l’OTRE, est redevenu serein et dépassionné. Les propositions de la FNTV en matière de calendrier de la transition énergétique nous ont semblé intéressantes. Sur le sujet des SLO, il y a une question à éclaircir concernant la relocalisation du site Pershing (NDLR, gare routière de la porte Maillot). Mais pour le reste, il faut admettre que le législateur n’a pas pris en compte la spécificité parisienne. Nous manquons de foncier disponible pour organiser l’accueil des cars SLO. On nous a demandé d’accueillir ces nouveaux transports par cars sans nous en donner les moyens. Il n’y a eu aucune concertation préalable avec la Ville de Paris. Cette réflexion devrait d’ailleurs se placer à l’échelle métropolitaine, ou au niveau de la Région.

Île-de-France: une gouvernance transports spécifique

Contrairement aux autres grandes villes, métropoles et communautés d’agglomérations françaises, Paris n’a pas la compétence sur l’organisation de ses transports urbains. Le Syndicat des transports d’Ile-de-France ex-Stif, devenu en juillet 2017 Ile-de-France Mobilités), est l’autorité organisatrice unique de l’ensemble des transports franciliens. Depuis le retrait de l’État, en 2005, il est présidé par le président de Région, aujourd’hui Valérie Pécresse. Son conseil d’administration comprend 29 membres, dont 15 désignés par le conseil régional et 5 par le conseil de Paris.

Le budget d’Ile-de-France Mobilités s’établit à 5,4 milliards en fonctionnement. La ressource principale de fonctionnement est le versement transport, acquitté par les entreprises de plus de 9 salariés, qui représente 65 % du total. Les usagers contribuent pour environ 30 % via les recettes commerciales. Et la différence est alimentée par les subventions publiques. La contribution de Paris s’est établie en 2016 à 378 millions d’euros, soit 7 % des ressources de fonctionnement, et 30 % de l’ensemble des contributions versées par les collectivités locales membres d’Ile-de-France Mobilités.

Une Zone à circulation restreinte à l’échelle métropolitaine

Quant à la Métropole du Grand Paris, créée au 1er janvier 2016, elle réunit 131 communes de la première couronne, et ses compétences s’appliquent sur quatre grands domaines: le développement et l’aménagement économique, social et culturel et la protection et la mise en valeur de l’environnement et la politique du cadre de vie, l’aménagement de l’espace métropolitain et la politique locale de l’habitat au 1er janvier 2017. Elle s’apprête à ce titre à finaliser son Plan Climat Energie Métropolitain (PCAEM), lequel devrait être établi en cohérence avec celui que la Ville de Paris doit adopter en mars 2018. La région Ile-de-France devrait également être associée à ces réflexions. Au menu notamment, la création d’une zone à circulation restreinte à l’échelle de la Métropole, la mise en place d’une voie dédiée au covoiturage sur le périphérique, ou encore la transformation des autoroutes en boulevards urbains, aux abords de la capitale. Autres mesures phares du Plan climat parisien: l’objectif de neutralité carbone en 2050, la sortie du diesel en 2024, et la fin des véhicules à essence pour 2030. À terme, le mix énergétique parisien doit associer électricité verte et bioGNV.

Grand Paris des bus

Voté en juin dernier par le conseil du Stif, à l’issue d’une large concertation, le Grand Paris des bus vise à améliorer l’offre dans la capitale et au-delà. Ce plan, doté de 35 millions d’euros de budget, comprend des renforts d’offre, l’adaptation d’itinéraires, de fréquences et d’amplitude pour desservir de nouveaux quartiers, la poursuite du déploiement du Noctilien. D’ici à la fin 2018, l’offre va augmenter de 20 % en moyenne.

Le stationnement, outil de mobilité

En septembre dernier, l’Association des usagers des transports d’Île-de-France (AUT-IdF) écrivait à la maire de Paris, Anne Hidalgo, pour lui demander de mieux faire respecter les couloirs réservés et autres aménagements dédiés aux bus. En effet, selon l’AUT, le stationnement gênant et l’utilisation illicite des couloirs de bus ont des effets pénalisants sur la qualité de service, à commencer par la vitesse commerciale des bus à Paris, qui peine à dépasser les 10 km/h. Conséquence: à Paris, en vélo, on dépasse les autobus… Mais pour que les choses changent, il faut que le contrôle et la sanction du stationnement gênant s’améliorent dans la capitale. Deux évolutions réglementaires pourraient y contribuer, à partir du 1er janvier 2018. D’une part, le transfert des agents de surveillance de Paris (ASP), jusqu’ici dépendant de la Préfecture de Police, et, d’autre part, la réforme du stationnement payant en voirie. Les 1 500 ASP seront bientôt redéployés sur des missions de contrôle et de prévention, en renfort des 1 900 agents de la brigade de lutte contre les incivilités. Ces équipes auront donc, entre autres, à s’occuper du stationnement gênant dans les couloirs de bus ou aux stations, sur les emplacements livraison… Concernant la réforme du stationnement payant en voirie, rien ne change pour l’automobiliste qui paie sa place. En revanche, le contrevenant se verra appliquer un forfait de post-stationnement, dont le montant pourra atteindre 50 €. Cette somme correspond à une redevance d’usage de l’espace public, calculé sur une période de 6 heures. En théorie, un automobiliste indélicat pourrait donc cumuler deux forfaits de post-stationnement s’il laisse son véhicule stationné plus longtemps. La Ville de Paris a choisi de déléguer le contrôle et la verbalisation à deux sociétés, Indigo et Urbis Park.

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Auteur

  • Sandrine Garnier
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