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En attendant 2050…

En attendant la généralisation des véhicules autonomes les opérateurs et le législateur ont de quoi s’occuper pour préparer le terrain. Des infrastructures à la réglementation en passant par la gestion des données collectées, c’est un changement de cap que doivent opérer tous les acteurs des transports, qu’ils soient publics ou privés.

Le véhicule autonome se développe certes à une vitesse incroyable, mais sa généralisation n’est pas pour tout de suite. Si certains optimistes pensent horizon 2025, d’autres voient plutôt 2050. C’est notamment le cas de Jean-Sébastien Barrault, président de la Fédération nationale des transports de voyageurs (FNTV): « Le véhicule autonome à grande échelle, je pense qu’on n’y est pas encore. C’est vrai qu’on y est en confiance, mais avant de laisser mes enfants dans un autocar sans conducteur à 80 km/h… » Et d’ici 2050, le secteur a de quoi s’occuper. « Il y a des mesures à prendre, notamment sur ce qui est développement du transport à la demande, le partage des données ou la possibilité d’inciter les citoyens à partager leur voiture, confirme Valérie Lacroute, députée Les Républicains de Seine-et-Marne. C’est cette agrégation d’éléments qui va permettre d’avancer. »

Demain, la quantité des données collectées par les véhicules autonomes sera considérable. Mais c’est bien dès aujourd’hui que les professionnels doivent aborder cette question. Nicolas Bertolami, président d’ABC Informatique, fait le parallèle avec l’aviation: « Il y a 20 ans, les avions ne communiquaient pas. Mais l’amélioration des infrastructures et la fiabilisation des satellites ont transformé le métier d’avionneur, qui est passé d’une gestion par avion à une gestion de flotte. Aujourd’hui, on sait déjà prévoir les interventions de maintenance cinq heures avant que l’avion atterrisse. »

Nicolas Bertolami invite les professionnels à prendre dès aujourd’hui à bras-le-corps cette problématique: « Où sont mes données? Qui les possède? Qui a le droit de les modifier? Qui a le droit de les exploiter? Il est probablement prudent de passer du temps à éplucher le contrat sur l’exploitation des données et leur valorisation. C’est plus urgent que la question de la généralisation des véhicules autonomes », alerte Nicolas Bertolami. D’autant plus que le partage de ces données va sans aucun doute devenir une source de plus-value à part entière pour les opérateurs (voir encadré). « Avant de se poser la question du véhicule autonome, il faut gérer le quotidien du numérique et de la transition énergétique », prévient Jean-Sébastien Barrault.

La donnée, élément de valorisation

De son côté, l’État a du pain sur la planche pour la mise à niveau des infrastructures et la modernisation de la réglementation. La députée Valérie Lacroute l’admet: « Il faut qu’on s’occupe rapidement du volet voirie. Avant de pouvoir mettre des véhicules intelligents sur les routes, il faudrait que l’infrastructure concernée puisse être gérée par un seul acteur. » En fonction des réseaux routiers, la gestion des voies de circulation est en effet un vaste mille-feuille, pas toujours facile à appréhender pour les opérateurs qui peuvent avoir pour un même trajet, plusieurs interlocuteurs publics: l’État, une commune, une intercommunalité, le département…

L’élue a un autre objectif: généraliser les lignes de cars express sur autoroute. Enfin, Valérie Lacroute estime que la procédure de l’appel d’offres est « lourde » pour certaines collectivités. Et les marchés publics ne laissent guère de place à l’innovation et à l’expérimentation de longue durée. Camille Valensi, directeur d’exploitation du groupe Kisio, poursuit: « Le réglementaire est un vrai axe d’amélioration possible. Par exemple, à l’heure actuelle, les navettes autonomes doivent obligatoirement être supervisées par un opérateur à bord… »

Ces pistes d’amélioration, le législateur aura bientôt l’occasion de s’y pencher: le très attendu projet de loi d’orientation des mobilités sera présenté en conseil des ministres le 21 novembre, et devrait être débattu à l’Assemblée nationale dans le courant du premier semestre 2019.

Un modèle économique encore incertain

Il ne faut plus tout attendre de la sphère publique. Le constat posé lors de la conférence Mobily-cités a le mérite d’être clair: demain, les professionnels du transport en commun devront trouver de nouveaux modèles de financement, plus créatifs que le classique versement transport complété par une subvention publique. Le montant du soutien aux expérimentations prévu dans le récent appel à projet lancé par l’Ademe atteint d’ailleurs à peine 50 millions d’euros. Toutefois, cette réduction des ressources ne signifie pas un abandon de toute relation.

Aurélien Berthelet, directeur général des Cars Berthelet, estime lui aussi qu’il faut conserver des « liens forts entre public et privés ». Le financement de leur projet d’expérimentation dans la métropole lyonnaise est lui aussi partagé: le public finance les aménagements des infrastructures et le privé finance l’exploitation pendant deux ans de manière directe, sous la forme de l’exécution d’un service de transport pour ses salariés. « Il y a un vrai nouveau business model à imaginer sur le financement, ajoute Aurélien Berthelet. Aujourd’hui, certaines entreprises ont des difficultés de recrutement à cause des contraintes de transport. Dans ces cas-là, les employeurs sont donc prêts à financer directement le transport de leurs salariés. »

Les opérateurs pourront également tirer leur épingle du jeu grâce au business des données personnelles. C’est exactement la même chose que ce qui s’est passé avec le smartphone, qui a pu voir l’émergence de sociétés qui tirent l’essentiel de leurs bénéfices sur la vente des données collectées (Google, Facebook, Amazon…). « Quand les opérateurs vont s’occuper des véhicules autonomes, va se poser la question de la valeur de ces services. Est-ce qu’elle réside dans le maintien en conditions opérationnelles, dans l’exploitation, ou dans la valorisation des données issues de l’exploitation des véhicules autonomes? », s’interroge Nicolas Bertolami.Indice: la réponse est dans la question.

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Auteur

  • Olivier Hielle
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