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Le potentiel inexploité des cars express

Depuis le milieu des années 1990, l’Ile-de-France a développé quelques lignes de cars et bus express. Elles seront une quinzaine en 2020. À comparer aux 350 lignes de cars qui sillonnent la région de Madrid.

En mai dernier, le Forum métropolitain du Grand Paris lançait une consultation internationale sur le devenir des autoroutes, du périphérique, et des voies rapides ou structurantes du Grand Paris. Quatre équipes pluridisciplinaires et internationales ont été sélectionnées pour plancher sur des scénarios visant à améliorer la mobilité quotidienne tout en réduisant les externalités négatives générées par le trafic routier, aussi bien du point de vue de la qualité de l’air et des nuisances sonores que sur l’intégration des axes routiers à leur environnement urbain, le tout sans dégrader les finances publiques. Architectes, urbanistes, sociologues, designers et spécialistes de la gestion des flux ou de la modélisation urbaine se sont donc penchés sur des problématiques qu’ils avaient, pour certains, déjà eu l’occasion d’étudier dans le cadre de précédents travaux organisés notamment par l’Atelier international du Grand Paris ou la Métropole du Grand Paris.

Les visions qui en résultent seront présentées en juin prochain par les quatre équipes en lice, à savoir le cabinet britannique Rogers Stirk Habour + Partners, l’Atelier des Mobilités (cabinet Devilliers & Associés), le collectif Holos (Richez Associés), et l’équipe New Deal (David Mangin). Cette dernière s’appuie notamment sur l’expertise du groupe Vinci, qui préconise de recourir largement aux lignes de cars express pour irriguer l’ensemble de la région et améliorer le rabattement vers le réseau de transport massifié. « En France, on a trop longtemps assimilé l’autoroute au transport individuel, et le rail au transport collectif, observe André Broto, ancien directeur de la stratégie et de la prospective chez Vinci, devenu conseiller. On estime qu’environ 300 000 actifs utilisent leur voiture chaque jour pour effectuer leurs trajets domicile – travail en Ile-de-France. Ce qui nécessite à peu près deux pleins par mois. Si certains ont choisi leur lieu d’habitation et assument sans problème les coûts liés au transport, d’autres subissent cette situation, qui contribue à la fracture sociale. En créant un réseau de lignes de cars express en connexion avec les RER et les trains de banlieue, on pourrait plus et mieux avec l’existant, à condition d’utiliser chaque mode de transport dans son domaine de pertinence. »

Modèle madrilène

Pour preuve, 2 700 personnes empruntent chaque jour la ligne de cars express exploitée sur l’A10 entre Dourdan et Massy. Mise en service en 1995 à l’initiative de Georges Dobias, alors président du Syndicat transports parisiens (STP), cette ligne a rapidement rencontré le succès. En 2006, elle a bénéficié de l’ouverture d’une gare routière à Briis-sous-Forge, directement implantée le long de l’A10, puis d’un parking de comodalité de 150 places ouvert en 2013 à Longvilliers, à l’entrée de l’autoroute. D’autres lignes créées sur le même modèle circulent en Ile-de-France, comme celle de l’A14 qui relie La Défense à Mantes-la-Jolie. Le réseau totalisera 15 lignes l’année prochaine.

Un bon début, mais rien encore en comparaison de l’offre routière madrilène. La capitale espagnole est en effet desservie par 350 lignes d’autocar transportant plus de 300 000 passagers par jour. Dans la région de Madrid, 50 % des déplacements motorisées sont effectués en transports collectifs, contre seulement 35 % en Ile-de-France. La communauté autonome de Madrid compte 6 millions d’habitants sur 8 000 km2, à peu près la moitié de l’Ile-de-France avec ses 12 millions d’habitants pour 12 000 km2. La grande couronne a été découpée en sept secteurs, sillonnés chacun par des autocars qui desservent l’un des sept hubs installés aux portes de Madrid. Là, les passagers peuvent passer directement du car au métro qui les déposera au pied de leur bureau. Certaines lignes bénéficient, de plus, de voies réservées sur l’autoroute.

Pour André Broto, le succès du modèle espagnol devrait inspirer les décideurs français. Au-delà de l’Ile-de-France, l’ensemble des métropoles françaises pourraient s’y convertir. « Le réseau autoroutier existe, et il est financé », souligne-t-il. Pas besoin de coûteuses infrastructures supplémentaires. Et pour enfoncer le clou, il s’est amusé à traduire la loi de création du Consortium régional des transports réguliers de Madrid, l’équivalent d’Ile-de-France Mobilités: « Le chevauchement des compétences exercées par les différents organismes chargés du service public de transport régulier de passagers, qui dépendent des administrations de l’État, de la communauté autonome ou des municipalités et auxquels sont rattachés des entreprises publiques et des concessionnaires privés, produit un système qui peut sembler rationnel si l’on considère isolément ses composantes, mais qui est néanmoins désordonné dans son ensemble », peut-on lire dans l’exposé des motifs. Là aussi, la comparaison avec la situation francilienne s’impose. Le Consortium régional des transports réguliers de Madrid a été créé en 1985.

Dourdan-Massy continue sa progression

Comme l’ensemble des transports publics franciliens, la ligne express 91-03 qui relie Dourdan à Massy, dans l’Essonne, est accessible grâce au pass Navigo. Entre 7 et 9 heures, les autocars opérés par Albatrans (filiale de Transdev), la parcourent à la fréquence de 5 minutes. Les voyageurs peuvent les emprunter à Dourdan, Longvilliers ou Briis-sous-Forge, pour se rendre à la gare RER de Massy où ils prendront la ligne B pour rejoindre leur destination. En moyenne, les habitués de la ligne passent 5 minutes dans leur voiture, puis 20 minutes en car, 30 minutes en RER et une dizaine de minutes en métro pour totaliser une bonne heure de trajet. Un temps de transport relativement long mais qui n’a rien d’exceptionnel en Ile-de-France. Surtout, cette durée est « garantie », sans les aléas du trafic routier. Pas de stress pour arriver à l’heure au bureau ou récupérer les enfants à la crèche. Et pendant le trajet en car, chacun vaque à ses occupations en toute quiétude. Pas de voyageur debout, donc pas de cohue, et la fréquence des passages assure une attente minimale. Rien d’étonnant à ce que la ligne fasse le plein. À tel point que le parc-relais de Longvilliers, ouvert en 2013 et gratuit, a rapidement été saturé. Un deuxième parking de 100 places est en chantier, pour une ouverture prévue l’an prochain. Il sera assorti d’un bâtiment d’accueil des passagers, où s’installeront des services. Ces travaux sont aussi l’occasion de réorganiser la gare routière, qui comptera huit quais au total.

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Auteur

  • Sandrine Garnier
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