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Une navette i-Cristal et trois Zoé autonomes en expérimentation à Saclay

Le 15 mai dernier était inauguré le Paris-Saclay Autonomous Lab, qui proposera au second semestre 2019 deux expériences de véhicules autonomes sur le plateau de Saclay: une navette autonome de nuit opérée par Transdev, en complément d’un service de bus classique, ainsi qu’un service de robots-taxis géré par Marcel, une filiale de Renault.

Situé à cheval sur le nord de l’Essonne et le sud des Yvelines, le plateau de Saclay est le terrain idéal pour la voiture autonome. Peu desservie par les transports en commun et ouvert aux nouvelles technologies, la Silicon Valley francilienne devra attendre 2026, au mieux, pour voir arriver le premier métro de la future ligne 18 du Grand Paris Express. Avant cela, il sera possible de rejoindre le pôle universitaire avec une navette autonome i-Cristal depuis la gare RER de Massy. De même, quelques heureux élus pourront circuler à l’intérieur du campus en journée avec trois Zoé autonomes à la demande. Ces deux initiatives sont menées dans le cadre du Paris Saclay Autonomous Lab, l’une des 16 expérimentations de véhicules autonomes retenus par l’État. Elles ont toutes deux été lancées le 15 mai dernier par Transdev et Renault, en partenariat avec l’institut Vedecom, l’IRT SystemX et l’Université de Paris-Saclay. « Les enjeux consistent à démontrer la performance et la sécurité des systèmes autonomes, avec une qualité et une expérience client aussi bonnes qu’un véhicule standard », a indiqué à cette occasion Patricia Villoslada, directrice chez Trandev de la division Systèmes de transports autonomes.

Une navette autonome en relais d’un service de jour

La navette i-Cristal, développée dans le cadre d’un partenariat industriel avec le Groupe Lohr, réalise actuellement ses tests de validation sur une boucle de 6kilomètres entre la gare de Massy et le plateau de Saclay, sur une voie dédiée aux bus, aux taxis et aux vélos. Le véhicule autonome sera ouvert aux voyageurs, normalement pour quelques mois au cours du second semestre 2019. La navette viendra compléter le service de transport collectif en prenant le relais après le dernier service, avec une rotation en continue de 0 h 30 à 3 heures du matin. Ce véhicule peut accueillir jusqu’à 16 personnes et bénéficie d’une autonomie de 10 heures avec une charge rapide de 2 heures. L’engin est capable de se déplacer à 30 km/h. Un opérateur sera présent à bord, mais la navette doit théoriquement pouvoir se diriger seule, en tenant compte des piétons et d’éventuels taxis ou cyclistes. Dotée de nombreux capteurs, radars et lidars, i-Cristal intègre également le système d’intelligence embarquée de conduite autonome de Torc Robotics. « Notre partenariat avec le groupe Lohr nous permet d’en apprendre un peu plus sur la conduite autonome, avec de nouvelles responsabilités en tant qu’opérateur, c’est un plus par rapport à des navettes fournies clés en main apportées par d’autres constructeurs. Nous apprenons comment interfacer ce véhicule avec notre système de transport, avec un poste de commande centralisé et une infrastructure communicante », indique Florent Ducarre, chef de projet recherche et développement véhicules autonomes chez Transdev.

L’opérateur de transport apporte ainsi au projet ses propres technologies, notamment son Système de transport autonome ATS. Pour l’instant, ces navettes s’arrêteront aux quatre arrêts prédéfinis, « en mode métro » et seront ouvertes à tous les passagers. « À terme, ces navettes ont vocation à s’intégrer dans un réseau de transport, que ce soit en termes de billettique ou d’information voyageurs », complète Florent Ducarre. Elles pourront aussi s’arrêter en fonction des demandes des usagers.

Des taxis Zoé autonomes à la demande

En décembre 2018, Waymo, filiale de Google, a ouvert le premier service de taxi à la demande à Phoenix, Arizona, pour quelques clients privilégiés. Renault reprendra le même principe à l’automne 2019 sur le campus de Saclay avec trois Zoé autonomes. Ces véhicules pourront être commandés par quelques utilisateurs préinscrits à travers l’application VTC Marcel, une filiale du groupe. Une fois à bord du véhicule, le client validera le départ en cliquant sur un bouton dédié. Il sera déposé au point de dépose le plus proche de sa destination finale, à un arrêt prédéfini « qui ne gêne pas la circulation des autres usagers de la route, choisi à proximité immédiate des lieux les plus fréquentés, et jamais à beaucoup plus de 300 mètres les uns des autres », précise le constructeur. Au besoin, la voiture s’arrêtera en chemin pour prendre en charge un autre passager pour effectuer tout ou partie du même trajet. Ces Zoé autonomes sont bardées de six Lidar, d’une caméra à multiples focales, en plus de données GPS et d’odométrie. Un opérateur sera présent derrière le volant pour éventuellement reprendre en main et effectuer quelques opérations, car, pour l’instant, la voiture n’a pas encore le droit de doubler. Un petit test réalisé en tant que passager a permis de valider l’utilité de cette option: le véhicule n’est pas encore prêt à être lâché seul dans la rue (lire en page 62).

L’un des enjeux du projet Paris Saclay Autonomous Lab consiste à dépasser la vision d’un véhicule autonome agissant seul dans son environnement. « Un véhicule autonome est plus qu’un véhicule, c’est un véhicule avec un système autour », précise Patricia Villoslada. De fait, les Zoé et la navette i-Cristal vont interagir en permanence avec une infrastructure connectée, mise en place par Vedecom et constituées de 25 unités de bord de routes disposées le long des routes empruntées par les véhicules. Des caméras et lidars ont également été positionnés à des endroits stratégiques, comme sur les ronds-points, pour prévenir de la présence d’autres véhicules, ou bien aux abords de la gare. Les caméras vont ainsi permettre de prévenir si des piétons sont en train de courir derrière leur bus. Les feux sont également connectés. Un feu tricolore passant à l’orange doit normalement prévenir le véhicule autonome qu’il ne sert à rien d’accélérer. De même, le véhicule sera informé du moment importun pour redémarrer.

Poste de commande centralisé

Pour ces deux expériences, Transdev et Renault ont choisi un poste centralisé de commandement (PCC), installé pour l’instant dans un bâtiment préfabriqué à proximité immédiate du point de départ de la navette i-Cristal, en gare de Massy. Un superviseur scrute les différents véhicules en opération, à travers plusieurs écrans. Une partie, dédiée aux clients, permet de superviser les courses affectées à chaque véhicule. La majorité des écrans concerne la partie technique. Une partie centrale permet de donner une vision globale, avec une remontée des alertes. « Nous travaillons sur leur priorisation. Cela nous permet de vérifier le fonctionnement global du système, et éventuellement d’arrêter un véhicule donné, voire toute la flotte, en cas d’intempérie par exemple », indique Michel Delhom, directeur technique chez Transdev.

L’opérateur a la possibilité d’arrêter un véhicule, mais pas d’en prendre le contrôle à distance. « Nous avons fait le choix de ne pas pouvoir piloter les véhicules à distance pour des raisons de sécurité, afin de ne pas ouvrir la possibilité d’intercepter les véhicules par une tentative de hacking par exemple. L’opérateur a cependant la possibilité d’arrêter le véhicule… et encore, pas n’importe où », précise Michel Delhom.

Une seconde zone donne accès à toutes les informations concernant l’état de chaque véhicule, son niveau de charge, l’état des capteurs et des calculateurs embarqués, et une vision à bord de chaque véhicule autonome grâce à des caméras embarquées. « Nous pouvons dialoguer au besoin avec les passagers, ce qui permet d’assurer un contact en permanence », souligne Michel Delhom. Enfin, une autre série d’écrans permet de contrôler toute l’infrastructure connectée, reliée au PCC par un réseau de fibre optique.

Conduite autonome, le long chemin de l’apprentissage

Le constructeur Renault va expérimenter à l’automne prochain un service de VTC avec trois Zoé autonomes sur le campus de Saclay. Une poignée d’utilisateurs autorisés pourront commander leurs « Zoé Cabs » pour une course à travers le campus avec l’application Marcel, un service VTC proposé par le groupe Renault. Un superviseur sera présent derrière le volant, et sa présence reste encore souhaitable au regard du petit test qu’il nous a été permis de faire en tant que passager. Lors d’un parcours d’une quinzaine de minutes, l’opérateur a dû reprendre la main trois fois. Pour corriger une trajectoire un peu trop abrupte lorsque la voiture tournait presque à angle droit, ou bien pour manœuvrer lorsqu’une autre voiture, conduite par un humain, nous a coupé la route. L’opérateur peut aussi s’avérer utile pour doubler un autre véhicule à l’arrêt, ou un vélo, car la voiture seule n’est pas autorisée à le faire. Lors de notre essai, sur un itinéraire qu’elle « connaît » à l’avance (l’intégralité des routes du campus a été numérisée), la Zoé Cab s’est permis de rouler jusqu’à 30 km/h. Sa vitesse s’est abaissée sensiblement lorsqu’elle s’est trouvée à proximité de piétons, pourtant situés sur le trottoir opposé. Ce qui peut agacer le passager qui ne comprend pas la raison d’une telle prudence. Les ingénieurs de Renault ont semble-t-il placé les curseurs du paramétrage assez haut, de peur que des étudiants se mettent subitement à vouloir traverser la route pour une raison inconnue. De même, sur une portion de route assez étroite, la Zoé a quasiment stoppé en croisant un autre véhicule.

Un écran, disponible pour le passager, permet de visualiser ce que la voiture « voit » avec ses différents capteurs: voitures à proximité, vélos, piéton, virage, dos d’âne… Et de constater parfois que le piéton qu’elle a perçu sur le trottoir de droite, et pour lequel elle a ralenti, n’existe pas dans la réalité. L’ingénieur présent à bord indique que certains capteurs (lidars ou caméra) ont peut-être perçu un reflet, ou un objet, qui s’apparentait à un piéton, et l’intelligence artificielle du véhicule a considéré qu’il valait mieux ralentir. Outre leurs propres capteurs, les Zoé autonomes peuvent compter sur une liaison de type V2X (véhicule à infrastructure), avec notamment trois feux tricolores connectés. De quoi anticiper des changements de couleurs, en théorie tout du moins, car lors de notre essai, la Zoé s’est brutalement arrêtée en empiétant sur le passage piéton, alors que le feu venait de passer à l’orange. Elle aurait pu continuer, car elle n’était pas en infraction, ou bien anticiper et s’arrêter avant les bandes blanches, mais pas dessus. L’ingénieur présent à bord n’avait pas d’explication à nous donner, et nul doute qu’il analysera la situation a posteriori pour en déterminer la cause. La connexion V2X s’est-elle montrée défaillante? Ou bien la Zoé a-t-elle anticipé grâce à ses capteurs, ou aux capteurs de l’infrastructure, qu’elle risquait de percuter un autre véhicule? Quoi qu’il en soit, la voiture a redémarré seule lorsque le feu est passé au vert, ceci alors que les feux étaient hors de portée des caméras de la voiture, vu sa position avancée. La liaison V2X a cette fois-ci bien fonctionné, mais il s’écoulera encore un peu de temps avant de se passer d’un superviseur à bord. De fait, le chemin qui mène à l’autonomie complète en milieu ouvert s’apparente à un long apprentissage…

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Auteur

  • Grégoire Hamon
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