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Petite histoire de la signalisation routiere

Alors qu’aujourd’hui s’inventent de nouvelles mobilités, retour sur la naissance de la signalisation routière au temps de l’automobilisme.

« Le charretier ignore généralement sa droite. En cas de croisement, se munir de patience et l’obliger par de fréquents appels à ranger son équipage sur le côté de la route. » Dans son édition de 1923, l’almanach Hachette – « petite encyclopédie populaire de la vie pratique » – consacre une double page à une nouvelle réglementation nommée le Code de la route qui « remplace avantageusement les lois et décrets établis de 1851 à 1863 sur la police de roulage et des messageries publiques […] et intéresse les conducteurs d’automobiles, ceux des voitures à chevaux, les charretiers, les meneurs de bétail, les piétons, tous les usagers de la route » (cf. 1 et 2). Le questionnement actuel sur l’espace à attribuer aux différents types de véhicules – voie bus, pistes cyclables, etc. – n’est en réalité pas vraiment nouveau (cf. 3 et 4). Il a fallu de tout temps organiser et réglementer la circulation, tant pour la sécurité que pour faciliter l’orientation dans les déplacements. Depuis les Romains et leurs bornes milliaires, Louis XV et ses routes royales où de hautes bornes frappées de la fleur de lys permettaient de calculer le salaire des « postiers » (messagers) qui étaient payés en fonction de la longueur de la course, jusqu’aux fingerposts imaginés en Grande-Bretagne à la fin du XVIIe siècle, ces poteaux comportant un ou plusieurs bras indiquant les différentes directions ainsi que les distances et suffisamment hauts pour être lus par les cavaliers et les conducteurs de diligence (cf. 5). Ou les « plaques de cocher » (cf. 6) sur les murs des habitations situées à des carrefours.

Mais c’est au tournant du XXe siècle, avec le développement de l’automobilisme, que la signalisation routière va véritablement s’organiser. Même si, comme le souligne le magazine L’Illustration en 1934, « il y a deux sortes de signalisation: la générale et la privée, celle qu’instituent les pouvoirs publics afin de mettre de l’ordre, donc de la sécurité, dans l’écoulement des usagers des routes et dans les rues; et celle qui aide les conducteurs de véhicules à s’avertir réciproquement de leur présence ou des modifications qu’ils vont apporter à leur direction ou leur état de circulation. La première est de beaucoup la plus difficile à réaliser parce qu’elle doit régir des éléments si disparates de la circulation, aussi bien les passants, voire les infirmes, que les bicyclettes, les voitures attelées et les automobiles de tous volumes. Des éléments fréquemment en conflit très net ». Et le journal d’expliquer en matière de signalisation privée: « Toutes les voitures Renault porteront désormais un appareil de signalisation. C’est là une indication de la pénétration chez nous des idées de discipline. Tout cependant n’est pas encore acquis. Il reste à obtenir que les possesseurs de cet appareil daignent s’en servir, et s’en servir à propos; à obtenir que toutes les autres automobiles portent un appareil analogue; enfin que les véhicules attelés eux-mêmes en soient munis. » Concrètement, quelques panneaux communs aux automobiles et aux cyclistes apparaissent partout en Europe à partir de 1900 et, en 1909, lors d’une conférence diplomatique internationale à Genève, les pays s’entendent pour harmoniser quatre panneaux annonciateurs d’obstacles. Ils seront ronds – pour se différencier des panneaux rectangulaires de direction – et concerneront… les cassis à double bosse, les virages en Z, les passages à niveaux gardés et les croisements en X. Mais c’est grâce à l’initiative privée que va véritablement se développer la signalisation routière. Notamment grâce à André Michelin qui, dès 1910, fait apposer plus de 30 000 plaques émaillées d’entrée et de sortie des agglomérations comportant le nom de la localité, le type et le numéro de la route, « Veuillez ralentir » ou une indication de vitesse, ainsi que le nom du donateur. Puis, après la Première Guerre mondiale, Michelin imagine les « bornes d’angle » et autres poteaux (cf. 7, 8, 9 et 10) – pied en béton armé, plaque de lave émaillée – comportant toutes les informations nécessaires. L’initiative de Michelin, reprise par d’autres donateurs comme les automobiles clubs, va inspirer le gouvernement d’après-guerre. Ainsi, explique un exemplaire de Je Sais Tout en 1920 (cf. 11): « La guerre a montré tout le parti que l’on pouvait tirer des camions automobiles et il est certain que le nombre de véhicules va considérablement augmenter pour assurer les transports industriels, commerciaux, voire même agricoles. Certains itinéraires vont être soumis à un mouvement touristique et industriel intense. M Jules Cels, sous-secrétaire d’État aux Transports, vient de prescrire toute une série de mesures particulièrement heureuses concernant la signalisation des routes. Toutes les bornes kilométriques situées le long des routes nationales et des routes à grand trafic seront peintes en vermillon à leur partie supérieure. Les petites plaques indicatrices actuelles donnent des renseignements souvent précieux pour la circulation locale à allure lente, mais elles sont à peu près illisibles pour les conducteurs d’automobiles; de plus, à la nuit tombante, elles sont hors de la portée des phares et, de ce fait, ne rendent plus aucun service. Elles seront remplacées par de grands panneaux comportant des inscriptions très apparentes et semblables à ceux qui furent utilisés pendant la guerre. Ces panneaux seront placés aux entrées et sorties des localités ainsi qu’aux embranchements, carrefours et croisements d’une certaine importance. Il y aura un tableau distinct pour chaque direction. Comme indication, on y fera figurer le nom de la première localité rencontrée et en dessous le nom de la première ville importante située au-delà. Ce deuxième nom sera donc le même sur les tableaux successifs jusqu’à ce que la ville en question ait été atteinte. À côté des noms figureront les distances en kilomètres et hectomètres. Les inscriptions seront surmontées d’une flèche unique et de la désignation abrégée de la voie suivie avec le numéro de celle-ci. Les inscriptions seront blanches sur fond bleu foncé et les lettres auront au moins 15 centimètres de hauteur. […] Enfin, la pose de signaux d’obstacle partout où ils seront nécessaires complétera cet excellent système de signalisation qui est appelé à faciliter grandement le développement du tourisme automobile en France. »

En avril 1926, le Comité de la circulation routière de la Société Des Nations modifie pour l’Europe la formes des panneaux choisie en 1909, de rond à triangulaire, et adopte en 1928 de nouveaux panneaux communs (sens unique, passage à niveau non gardé, stationnement interdit, etc.). Une uniformisation qui restera toutefois limitée puisque jamais les dispositifs imaginés aux États-Unis et en Europe n’ont pu être standardisés. Ainsi, les panneaux européens s’appuient essentiellement sur des symboles – et non des indications écrites – bordés souvent de rouge – contre le jaune et le noir aux USA – notamment pour les dangers signalés par des triangles à fond blanc, et non des losanges à fond jaune. Deux types de signalisation routière existent et varient selon les continents.

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