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Alstom cherche un nouveau souffle avec l’hydrogène

Visant le renouvellement du parc de TER diesel des régions, Alstom fourbit ses armes sur les solutions de motorisation alternatives. Parmi elles, la solution de l’hydrogène lui donne une longueur d’avance.

Qu’aperçoit Jean-Baptiste Eyméoud, le directeur général d’Alstom France, dans ses jumelles? « Les 1 200 rames diesel que la SNCF devra renouveler à partir de 2028-2030 », a-t-il détaillé lors des RNTP. Le constructeur a beau avoir récemment engrangé en France plus de 400 millions d’euros sur son carnet de commandes avec la vente de trains régionaux électriques, il cherche la prochaine martingale ferroviaire. Les commandes de 54 rames Coradia Polyvalent passées par trois régions entre juillet et octobre sont en effet des levées d’options, c’est-à-dire la suite d’un contrat-cadre Régiolis signé il y a longtemps avec la SNCF pour le compte des régions. Il finira un jour par se tarir. Alstom se prépare donc au verdissement du parc diesel régional, faisant le pari qu’en dépit d’un surcoût, les régions préféreront acheter du matériel innovant plutôt que se lancer dans une électrification dispendieuse des voies. Près de la moitié du réseau français n’accepte pas les trains électriques. Sur 20 500 km de ligne en France, seules 11 850 sont en effet électrifiées.

Alors que la concurrence devient plus intense (CAF vient de rafler une commande de trains intercités) sur ce marché de la fin du diesel, Alstom cherche une offre « différenciante ». Il vise la niche de l’hydrogène. « Le lancement en Allemagne du premier train à hydrogène que nous avons construit a fait plus de buzz sur le plan médiatique que le record de vitesse du TGV », applaudit Jean-Baptiste Eyméoud. L’industriel français entend donc capitaliser sur l’avance prise avec cette innovation conçue dans son usine de Salzgitter et exploitée depuis septembre 2018 sur un réseau de Basse-Saxe.

50 % du parc diesel visé

Ambitieux, le patron d’Alstom France pense que « 50 % du parc de TER diesel français pourrait être renouvelé avec des rames à hydrogène ». Soit quelque 600 rames. Soutenu par l’État, un programme a été lancé à marche forcée pour faciliter l’émergence d’un écosystème lié à l’hydrogène, avec possible mutualisation des stations avec d’autres utilisateurs, notamment des exploitants routiers, et pourquoi pas à terme des réseaux de transport public. L’option choisie par Alstom est une traction bi-mode, électrique-hydrogène. Plusieurs régions sont intéressées. Mais, à la fin octobre, le compteur est bloqué à seulement 15 promesses de commandes par quatre régions, moins que les 30 exemplaires attendus au départ. Il faut dire que le surcoût est patent, on peut l’estimer « à 30 % par rapport à une rame classique », calcule Jean-Baptiste Eyméoud. Le constructeur espère sortir un premier exemplaire en 2022 pour les tests d’homologation. Un calendrier qui doit lui permettre d’être en position de répondre à un appel d’offres pour les premiers remplacements du parc diesel régional.

L’hydrogène est en fait une des trois solutions alternatives au tout diesel, auxquelles travaille le constructeur. Une autre piste, déjà bien dessinée, consiste à retirer dans une rame en service deux packs diesel sur quatre pour les remplacer par des batteries et récupérer l’énergie de freinage. « Cela permettra d’avoir des trains qui quitteront les gares sur batteries » avant de poursuivre en mode diesel. Mais cela ne supprime pas totalement les rejets de particules fines. La troisième solution, plus innovante, consiste à retirer toute la motorisation diesel pour greffer un cœur électrique alimenté de deux manières: par caténaire ou par batterie. Cette variante n’est pas l’apanage d’Alstom, puisque Bombardier et Siemens la proposent déjà. Elle est utile pour les petites lignes, lorsqu’un train circule sur des voies électrifiées et doit s’engager sur des rails sans caténaires. L’autonomie annoncée par Alstom sur batterie est de 80 km, « ce qui oblige à avoir des points de charges en bout de ligne », ajoute le constructeur. Côté hybride, le mouvement est lancé. Alstom, la SNCF et trois régions prévoient de faire rouler en 2020 une première rame prototype de Regiolis, avec la perspective de la sortie de premières séries en 2022.

L’export aussi nourrit les 13 sites français

En termes d’activité, Alstom est dans une bonne dynamique. Celle-ci se traduira cette année par l’embauche d’environ 900 salariés, sur la quasi-totalité des 13 sites. Le groupe comptera 9 500 personnes en France, dont 4 500 ingénieurs. Si les commandes françaises alimentent les ateliers de production, le siège de Saint-Ouen et le site de Villeurbanne notamment travaillent aussi pour les contrats étrangers en élaborant une bonne partie de l’ingénierie et de la recherche et développement. 70 % des contrats de signalisation sont élaborés en France, explique-t-on chez Alstom. Témoins: le marché du métro de Montréal, ou l’offre faite pour San Fancisco. De même, les systèmes clé en main de métro, comme celui de Ryad, sont élaborés en France. Si le TGV pendulaire américain sera construit aux États-Unis, les motrices sont les mêmes que celle de la gamme TGV étudiée en France. Les sites industriels d’Alstom France construisent également pour l’export, avec le métro de Hanoï. Mais les usines françaises n’en sont pas moins soumises à une compétition interne au groupe, Alstom ayant des implantations industrielles en Belgique, en Pologne, en Allemagne, ou encore en Espagne, où seront construits les trams pour Barcelone.

Les Pays-Bas s’intéressent au train à hydrogène d’Alstom

Un nouveau marché pour le Coradia iLint? Après l’Allemagne, c’est au tour des Pays-Bas de goûter au train à hydrogène. Au cours du premier semestre 2018, un test de deux semaines sera pratiqué sur une ligne du nord des Pays-Bas, entre Groningen et Leeuwarden à une vitesse maximale de 140 km/h. Il s’inscrira dans un projet pilote signé entre la province de Groningen, Arriva (filiale de la DB), ProRail, l’homologue néerlandais de SNCF Réseau, et l’énergéticien Engie. La durée d’expérimentation est courte, mais ce sera suffisant pour « démontrer que la pile à hydrogène est une technologie idéale pour obtenir un trafic ferroviaire propre sur des lignes non électrifiées aux Pays-Bas où circulent (…) des trains diesel », explique le constructeur. Le réseau des Pays-Bas compte environ 1 000 km de lignes de ce genre, qui représentent le marché cible d’Alstom. C’est bien sûr une rame iLint conçue dans l’usine allemande de Salzgitter qui circulera dans la région de Groningen. Jusqu’à présent, Alstom a vendu 41 exemplaires de son train unique au monde, en Allemagne: 14 seront exploités en 2021 en Basse-Saxe (où deux rames sont en test) et 27 dans la Hesse à compter de 2022.

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Auteur

  • Marc Fressoz
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