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Recrutements: la FNTV Sud lance un plan d’urgence

Une crise d’une gravité sans précédent impacte le transport routier de voyageurs. La profession n’attire pas assez, au risque de compromettre l’exploitation des lignes. Certaines sont en effet sur le fil du rasoir. En région Sud, la FNTV a pris le sujet à bras-le-corps, organisant le 9 octobre une table ronde en présence des organismes de formation, des acteurs de l’emploi et des autocaristes adhérents. L’ensemble des propositions émises à l’issue de cette rencontre sera adressé dans un courrier aux partenaires: Opco, région Sud, Direccte et Pôle emploi. La FNTV plaide en faveur de la création d’un comité de pilotage afin d’agir collectivement en organisant des opérations de recrutement et de formation.

« Tous les matins, nous croisons les doigts pour qu’aucun de nos conducteurs ne soit absent. Ce déficit fait naître un malaise dans la profession. Nous avons atteint un point critique. Nous ne suscitons plus de vocation et nous ne savons pas fidéliser nos effectifs », déplore Jean-Paul Lieutaud, autocariste et président de la FNTV Provence-Alpes-Côte d’Azur. Ce 9 octobre, les acteurs du transport routier de voyageurs, étudiants, organismes de formation et représentants des collectivités locales se sont retrouvés sur les bancs de la fac de droit d’Aix-Marseille Université pour tenter de trouver une solution à cette crise qui affecte à la fois le transport de voyageurs et celui de marchandises.

Tous les indicateurs sont dans le rouge dans le transport routier de voyageurs, avec une moyenne d’âge élevée, de 49,6 ans, une ancienneté toute relative avec une moyenne de 6,5 ans et un taux de renouvellement de 0,24 %. « Avec un taux proche de zéro, les entreprises sont incapables de répondre à des appels d’offres et d’avoir une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences », détaille Maxime Dumont, de l’Observatoire prospective des transports et de la logistique (OPTL). 68 % des entreprises éprouvent des difficultés de recrutement. « Vous aurez besoin de 2 200 personnes pour renouveler vos effectifs, en raison des départs en retraite. Or, avec un taux de 0,24 % vous êtes déjà dans le rouge. Il faut parvenir à créer de l’appétence, de l’attractivité et donner aux jeunes une perspective de carrière et leur offrir une certaine qualité de vie. Mais ce n’est pas avec le niveau de rémunération conventionnel que les jeunes peuvent s’épanouir. »

De l’argent pour la formation mais pas de candidats

Paradoxe, l’offre de transport public s’est largement développée, nécessitant davantage de conducteurs. Environ 3 500 par an, selon Laurent Benvenuti, délégué régional FNTV PACA: « L’intérim a progressé de 30 % entre 2016 et 2017, et le manque de conducteurs entraîne la renonciation à certains marchés publics. Dans l’immédiat, nous avons besoin de 67 nouveaux conducteurs dans le Sud, et de 500 sur l’année. » L’obtention de plus en plus tardive du permis B explique en partie le désamour pour la profession. Mais Laurent Benvenuti pointe également la dégradation des conditions de travail: tensions croissantes avec les voyageurs, agressions régulières ne plaident pas en faveur de cette profession.

Selon Caroline Anquetil, responsable des relations sociales et formation professionnelle au sein de la FNTV, les salaires doivent être revalorisés dans le cadre des NAO. La Fédération plaide en faveur de l’abaissement de l’âge de la conduite de 21 à 18 ans et demande de réduire les délais de délivrance des permis. Paradoxe: l’Opco (né de la réforme de l’apprentissage) et Pôle Emploi n’ont jamais eu autant de fonds disponibles. « L’argent n’est plus le problème. L’apprentissage constitue une opportunité forte donnée par la loi. C’est le temps partiel des conducteurs qui complique le recours à l’alternance », explique Florence Diesler, directrice générale adjointe de l’Opco Mobilité.

« Nous avons 534 M€ pour former des salariés sur les quatre prochaines années. Nous lançons ce mois-ci des task forces en région Sud avec les employeurs des filières transport et logistique, afin d’établir un diagnostic territorial et d’élaborer un parcours de formation additionnel ne figurant pas dans le catalogue », annonce Marie-Christine Alexandre, responsable formation chez Pôle Emploi. « Il y a dix ans, nous n’arrivions pas à trouver des financements et aujourd’hui, il est devenu difficile de trouver des jeunes! Nous avons des équipes commerciales sur le terrain avec Pôle Emploi, des chefs d’entreprise demandeurs, mais nous n’arrivons pas à recruter », déplore Jean-Louis Rey, directeur régional de l’Aftral.

Rôle de la commande publique

Selon les professionnels, les autorités organisatrices de transport auraient leur part de responsabilité dans ce manque d’attractivité, en favorisant le moins-disant dans les appels d’offres. « Il faut faire évoluer les marchés publics avec la prise en compte de nouveaux critères », lance Antoine Séguret, président de la FNTV 13, qui rappelle que la commande publique représente 80 % du chiffre d’affaires des entreprises. En ce sens, une démarche d’achat public durable vient tout juste d’être engagée avec la région Sud et la métropole Aix-Marseille Provence. « Nous travaillons sur les critères pour donner des marchés à des entreprises qui sont socialement inventives, de manière à ce que les salariés restent en poste », poursuit-il.

Pour résoudre le problème du temps partiel, Jean-Paul Lieutaud suggère d’« ouvrir une réflexion sur le partage d’emplois et de rassembler des outils de fidélisation des salariés, notamment des conducteurs en période scolaire (CPS). Je confie à notre club RH le lancement d’une réflexion sur le sujet de la fidélisation. En ce qui concerne le partage d’emplois, la FNTV a mené des expériences pour proposer des compléments d’activité aux salariés à temps partiel », explique-t-il, tout en reconnaissant l’échec du partenariat avec Mediapost. Jean-Paul Lieutaud en appelle à la mobilisation de tous les acteurs (Direccte, Pôle Emploi, Opco, Région, Aftral…) pour trouver des solutions à la hauteur du « besoin historique de la profession ».

Dans l’Isère, un transporteur emploie des conducteurs roumains

Depuis la rentrée de septembre, l’entreprise Transarc, qui assure les services de ramassage scolaire du Nord-Isère, emploie quelques conducteurs de nationalité roumaine. Si ce recours à une main-d’œuvre étrangère ne pose aucun problème du point de vue de la légalité, le procédé n’apparaît tout de même pas idéal. En effet, les conducteurs en question ne maîtrisent ni la langue française, ni les parcours à effectuer dans le cadre de leur mission. Dès qu’un incident, même mineur, se produit, les conséquences peuvent prendre une ampleur inhabituelle. Ainsi, dès les premiers jours d’école, les jeunes et leurs parents se sont rendu compte que quelque chose clochait: des élèves, qui demandaient au chauffeur de leur confirmer la destination d’un car, sont restés sans autre réponse que la production d’une feuille de bord! Même chose pour un sac oublié dans le véhicule: impossible de communiquer de façon claire avec le conducteur. Une mère d’élève, ayant appelé le transporteur pour obtenir des explications, a même eu la surprise de s’entendre répondre que les enfants n’avaient qu’à s’adresser aux conducteurs en anglais!

Interpellé par les parents d’élèves, le transporteur a argué de ses difficultés à recruter, et assuré que les conducteurs roumains seraient peu à peu remplacés par des collègues français. Ni Transarc ni le département de l’Isère, qui a conservé la compétence transport scolaire par délégation régionale, n’ont répondu aux sollicitations de Bus&Car Connexion.

S. G.

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Auteur

  • Nathalie Bureau du Colombier
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