Dès le vendredi 13 mars, le tout nouveau Syndicat mixte des mobilités de l’aire grenobloise (SMMAG), créé le 1er janvier 2020, a travaillé à la mise en place de mesures conjointes sur les trois réseaux dont il a la charge: ceux de la métropole grenobloise et du Grésivaudan pour lesquels le syndicat est le décideur juridique, mais aussi celui du Pays Voironnais, pour lequel le SMMAG exerce une fonction de coordination. Entretien avec son président, Yann Mongaburu, également vice-président aux déplacements de Grenoble Alpes Métropole et vice-président du Gart.
Yann Mongaburu: Je veux saluer l’acceptation des élus voironnais d’avoir une philosophie et des actions communes. Dès le vendredi, la vente de tickets par les conducteurs a été arrêtée. Et dès le dimanche, une cellule de crise quotidienne réunissant la direction générale du syndicat et tous les opérateurs a été créée, l’entrée avant des bus a été interdite et les mesures sanitaires de désinfection ont été déployées. Depuis le 8 avril, le dispositif de gestion de crise a été allégé. La cellule de crise se réunit tous les jours pour suivre les opérations et préparer l’après-confinement, mais les opérateurs n’y participent qu’une fois par semaine. Un plan de transport adapté s’est mis en place sur les trois territoires avec ajustement quotidien pour répondre au mieux aux besoins des établissements de soin et de ceux qui maintiennent une activité. Cela nous a amenés à imaginer quelquefois le service très différemment.
Y. M.: Suite à la chute de fréquentation, le Voironnais a par exemple opéré un changement d’exploitation total qui permet de garantir la continuité du service public. Toutes ses lignes sont désormais à la demande. Autre exemple: nous n’avions jamais eu d’offre mutualisée entre les transports publics et les taxis. Nous l’avons finalisée chemin faisant pour déployer notre dispositif pour le personnel soignant. Nous avons en effet essayé de concevoir, et c’est une fierté, une offre sur mesure pour les soignants. En plus du service MétroVélo désormais ouvert uniquement pour eux et de la réduction tarifaire qui leur est accordée sur le service d’autopartage, nous avons mis en place, lundi 30 mars, un service de transport à la demande gratuit, disponible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, sur l’ensemble du territoire du SMMAG, avec numéro d’appel spécifique. Je veux remercier les taxis qui ont accepté l’opération. À ce jour [le 7 avril, NDLR], nous recevons 130 demandes par jour. 40 courses sont assurées par les taxis, le reste en transport public.
Y. M.: La gratuité s’applique sur les trois territoires. C’est un modeste soutien à ceux qui sont sur le pont, les soignants et tous ceux en activité, mais aussi aux précaires et aux plus fragiles. C’est aussi une mesure de respect des gestes barrière (les contrôles ont été suspendus). Mais je voudrais saluer toute la modestie de la mesure, au vu de la fréquentation qui se situe aujourd’hui entre 5 et 10 % de l’usage habituel. Je sais que nous ne sommes pas les seuls à avoir choisi la gratuité. Le Gart a lancé une étude pour rendre compte des études tarifaires.
Y. M.: C’est difficile à estimer aujourd’hui. Le Gart est en négociation avec le Gouvernement pour pallier la suspension du versement mobilité, rendue possible pour les entreprises. Ce versement mobilité est notre première source de financement. Cela représente plus de 60 % du budget chez nous. Au niveau national, c’est plutôt 50 %. Nous aurons besoin d’une compensation pour maintenir notre service public. L’État nous a demandé de garantir le financement aux opérateurs de mobilité. Et nous payons mars et avril sur la base d’un service normal, car il s’agit de préparer l’après-confinement. Mais si l’État ne vient pas compenser la perte sur le versement mobilité, cela mettra en péril les transports publics.
Y. M.: Il est trop tôt pour aborder la question d’un point de vue financier. Nous avons suspendu tous les chantiers. Pour l’acquisition de matériels, nous maintenons nos plans et nos commandes. Mais j’attends de la part de l’État une aide, car l’après-crise nous demandera de fonctionner pour desservir le territoire et pour aider à la reprise de l’économie.
Y. M.: Jamais! Les deux premiers principes posés dès le début ont été de: 1– garantir la sécurité sanitaire des agents et des voyageurs; 2– assurer la continuité du service public. Cela nous invite à retravailler l’ensemble du processus, à réinventer le service pour garantir une capacité de se déplacer. Les habitudes de travail changent, des partenariats se modifient. Jamais nous n’avions eu un travail aussi serré pour des mesures harmonieuses et convergentes avec l’ensemble des opérateurs. Je veux remercier l’ensemble des élus qui ont convergé vers cette obligation de résultat dans une situation critique. Cela montre l’agilité du service public.
Y. M.: Il est trop tôt pour en parler. Il ne s’agit pas d’envoyer des messages contradictoires aux usagers. Mais nous y travaillons. Avec les opérateurs. Pour préparer le post-confinement en abordant les choses avec agilité et sérénité. Certains services pourront être proposés autrement. Nos agences de mobilité, aujourd’hui fermées, pourraient par exemple être ouvertes sur rendez-vous pour éviter de trop forts regroupements.
Y. M.: Aujourd’hui, un quart de la population n’a pas de véhicule sur notre territoire. Nous devons donc garantir la continuité du service public. Mais le défi est bien de: 1– imaginer des services qui garantissent cette sécurité sanitaire; 2– mettre de paquet sur le deuxième mode de développement individuel qui est le vélo. Dans notre région, il y a plus de vélos dans les caves que de voitures. L’idée serait de travailler avec MétroVélo pour préparer les particuliers à réparer leurs vélos. Pour que chacun ait la possibilité de se déplacer individuellement.
Y. M.: Sans grande surprise, on a enregistré une chute du dioxyde d’azote et une diminution dans une moindre mesure des particules fines. Cela démontre combien la circulation automobile pèse dans les pollutions de l’air. Surtout à proximité des voies autoroutières. Cette crise sanitaire nous montre que la bataille pour la qualité de l’air dépend simplement de nos comportements humains! J’espère que l’on en tirera des leçons.
