Le premier opérateur de transport collectif du monde est officiellement né le 4 mars dernier. Hissé sur les fonds baptismaux par Antoine Frérot, pdg de Veolia Environnement, et Augustin de Romanet, directeur général de la Caisse des Dépôts, il portera le joli nom de Veolia Transdev. Les parents se partagent à parts égales le capital "génétique" du bambin. Avec un chiffre d’affaires cumulé de huit milliards d’euros, et un gros appétit qui devrait lui permettre d’atteindre les dix milliards d’ici à 2015, le bébé se porte comme un charme. Cette société franco-française – au montage capitalistique typique lui aussi – est déjà présente dans 28 pays, et emploie 110 000 collaborateurs dans le monde. Autant dire qu’elle pèsera de tout son poids sur les paysages hexagonaux et européens du transport de voyageurs. Pas un domaine d’excellence du secteur – tram, bus, car, train, métro – ne lui échappe désormais. "La mobilité des citoyens est un sujet porteur d’avenir!", scandait Antoine Frérot en présentant l’acte de naissance. La profession est convaincue. D’ailleurs, le "cousin", RATP Développement, qui a bien monnayé son ex-participation dans Transdev, s’enorgueillit aujourd’hui de sa place de 5e opérateur mondial. Quant au tandem SNCF-Keolis, il se porte lui aussi comme un charme. Sur la photo de famille, le transport collectif français affiche une pleine forme, prêt à aborder, conquérant, la décennie qui vient. Un seul bémol peut-être. Qu’en pensent réellement les clients – ou partenaires, selon les terminologies retenues – de ces très grandes entreprises? Augustin de Romanet affirme avoir rassuré l’ensemble des collectivités qui avait confié à Transdev la gestion de leurs transports publics. Elles ne voulaient pas devenir de simples clientes. À la Une de ce numéro, l’interview d’Arnaud Montebourg révèle aussi que certains élus s’interrogent sérieusement – et sans détours verbaux pour certains – sur une "reprise en main" directe des services dont ils ont la responsabilité. À l’aube de nombreuses échéances électorales, beaucoup pourraient bien se sentir obligés de multiplier les choix politiques"significatifs", voire symboliques, en terme de gouvernance. Les nouveaux géants du transport vont devoir faire preuve de douceur et de persuasion dans leurs projets d’extension familiale.
