Les régies innovent

NICOLAS Tronchon, directeur associé de la société TransWay, spécialisée dans le développement des technologies de l’information dédiées aux transports publics, privés ou collectifs s’emballe: “L’usager ne se contente plus de savoir comment aller d’un point A à un point B. Il veut savoir quand, comment, avec qui, pourquoi, ce qu’il peut faire autour, etc. Or, pour l’instant, le transport s’avère peu ou pas efficient. Résultat, les gens continuent de prendre leur voiture. Il suffirait de lier la communication à l’individu, à son comportement et pour cela il existe une multitude d’applications.” Sa présentation sur l’essor des téléphones mobiles dans les transports a fait tilt. À La Rochelle, en s’intéressant aux innovations en cours, le transport public indépendant a voulu se donner une nouvelle image. “La notion de régie poussiéreuse, c’est fini. Les régies se sont modernisées, on voit aujourd’hui des choses très pertinentes. La Rochelle, par exemple, innove en permanence. Avec son réseau Yelo, elle offre désormais une solution complète de mobilité urbaine avec une carte unique”, explique Gilles Bourdouleix. Autre exemple, Angoulême (STGA) a mis en place en septembre 2010 un service I-Bus qui, à partir d’un code-barres en 2D (Qr Code), fournit instantanément aux possesseurs de smartphones les horaires de bus en temps réels, les retards éventuels, etc. Force est de reconnaître qu’à l’exception des innovations techniques de constructeurs, les initiatives locales ne sont pas légion. Les autres nouveautés des 26^e Journées Agir en matière de R&D se sont limitées à la présentation de sa centrale d’achats et à l’étude Mobhilis destinée à connaître l’impact des nouvelles technologies sur une population de personnes âgées de 65 ans et plus.

Menée avec le concours du CNRS (Eso Rennes), du bureau d’études Mobhilis et Agir, l’étude doit durer deux ans. Il s’agira à travers des questionnaires et des entretiens individuels organisé sur six bassins de populations (Belfort, Cholet, Annecy, La Rochelle, l’Ille-et-Vilaine et le Cher) de connaître les profils et les réactions des intéressés face à des technologies (billettique, communication, information voyageur) qui seront mises en place à l’horizon 2020. Les résultats devraient être publiés en janvier 2013. “Il est plus que temps, souligne Nicolas Tronchon, au regard de l’évolution rapide des téléphones mobiles. Notamment depuis l’arrivée de l’i-Phone en 2007, suivi sur ses talons par Androïd, le système d’exploitation développé par Google. Fin 2010, un téléphone sur quatre est un smartphone. Aujourd’hui, Facebook compte 18 à 22 millions d’adeptes en France. En 2012, on estime que 60 % des gens consulteront les réseaux sociaux en mobilité. Et quand on sait que les gens passent une grande partie de leur temps dans les transports, si on ne fait rien, on va droit dans le mur.” Est-ce pour autant aux collectivités locales d’investir dans l’innovation? Pour Marc Delayer, administrateur de l’Agir, ça ne fait aucun doute: “L’innovation dans les régies est une vraie défense du service public.”

“Quand j’achète un service auprès d’un opérateur privé, il a besoin de faire un bénéfice, un réseau public, non. Le résultat de la régie, c’est la satisfaction de son administré. Il est du rôle de l’État que d’écouter les territoires et de traduire les expérimentations en loi et en décret. Pour que chacun puisse ensuite en profiter”, ajoute Nicolas Tronchon. Pour en arriver là, il faut aussi que les réseaux acceptent de rendre leurs données, accessibles, exploitables et réutilisables. Des données qui, moulinées dans une application, pourraient à l’avenir devenir payantes… C’est aussi cela la stratégie de l’innovation.