Newsletter S'inscrire à notre newsletter

Magazine

Transporcs et respect d’autruie

Société Surfant sur la vague de sa campagne choc contre l’incivilité, la RATP a organisé un forum sur ce thème le 29 septembre dernier à Paris. Si les intellectuels, élus, exploitants de réseaux, fonctionnaires de police et procureur ont affiché de profonds désaccords sur le profil de l’incivil, tous se rejoignent sur le rôle essentiel de la prévention.

UN LAMA cracheur de chewing-gum, une grenouille sautant les portiques, un buffle entrant tête baissée dans une rame, une poule pipelette ou un paresseux se prélassant en pleine heure de pointe… Depuis mi-septembre, les usagers du métro parisien en prennent sévèrement pour leur grade. Avec cette campagne, baptisée “Restons civils sur toute la ligne”, la RATP a décidé mettre les pieds dans le plat pour interpeller ses voyageurs sur certains de leurs comportements. Le ton volontairement décalé de cette opération n’a pas été choisi tout à fait au hasard puisque l’ouverture du site participatif www.chervoisindetransport.fr (encadré) permettant aux passagers de témoigner de leurs expériences liées à l’incivilité avait déjà donné la température. Volontairement éphémère, cette plate-forme d’expression a rassemblé 135 652 visiteurs pour 493 910 pages vues et 116 151 participations restituées sous forme d’un Livre blanc consultable en ligne dès sa fermeture, fin septembre. Parmi les problèmes récurrents évoqués par les internautes: la propreté, les nuisances sonores, la fraude, la bousculade ou l’utilisation abusive du strapontin aux heures d’affluence. L’angle d’attaque était donc tout trouvé, restait à la régie le soin de faire preuve d’un peu d’imagination histoire de glisser un message pédagogique efficace sans jouer les moralisateurs. Point d’orgue de cette opération, le Forum de la civilité qui s’est déroulé à la Maison de la RATP à Paris le 28 septembre dernier. L’occasion de donner la parole aux acteurs de terrain. “83 % des Franciliens estiment que nous remplissons notre mission de service public en incitant les voyageurs à bien se comporter”, martelait Pierre Mongin, pdg du groupe RATP, en introduisant l’événement. Au cours des trois débats qui ont ponctué cette demi-journée, les invités sont parvenus à déjouer le piège d’une liste exhaustive des incivilités rencontrées au quotidien mais ont affiché des points de vue hétéroclites et souvent tranchés. “Ce débat est ouvert depuis les années 1980 et nous devons veiller à ne pas verser dans l’instrumentalisation”, met en garde Jean-Paul Huchon, président du conseil régional d’Île-de-France et du Stif.

Causes ou conséquences?

L’incivilité résulte-t-elle d’une tendance sociétale ou est-elle l’une des conséquences de l’explosion de la densité des grandes agglomérations? Difficile de trancher. Une chose est sûre: “L’incivilité se définit d’abord comme un rejet des règles élémentaires de vie en société”, assure Sylvie Moisson, procureur de la République de Bobigny. Une défiance qui n’est pas récente mais qui affiche néanmoins de nouvelles spécificités. “Depuis plusieurs années, elles sont commises par des personnes de plus en plus jeunes et avec lesquelles nous avons de moins en moins la possibilité de dialoguer. Nous sommes parfois confrontés à un mutisme qui annule notre autorité”, s’inquiète Serge Rivayrand, sous-directeur régional de la police des transports. Pire, “dans certains quartiers, nous observons un rejet massif de toute forme d’autorité”, dénonce Dominique Lasserre, commissaire d’Asnières-sur-Seine (92), et responsable de la brigade sécurisée de terrain de la boucle nord. Une rupture de dialogue relativement préoccupante dans la mesure où “90 % des incivilités sont susceptibles de se transformer en infraction”, poursuit Serge Rivayrand. Conclusion: l’incivil serait donc un jeune manifestant des problèmes de communication et potentiellement délictueux. “Ne tombons pas dans la stigmatisation, les incivilités sont partout et les transports ne font que refléter la société. Les usagers ne sont pas idiots, ils savent parfaitement que s’ils attaquent un conducteur de bus, ils attaquent quelqu’un du même niveau social qu’eux”, estime Karim Zéribi, président de la Régie des transports de Marseille (RTM). En cause: des lacunes d’autorité. “Le service public doit reprendre la place qu’il a abandonnée au fil des années”, poursuit Karim Zéribi. Un besoin de fermeté qui prévaut également outre-Manche. “À Londres, nous rencontrons des difficultés similaires et sommes parvenus à la même conclusion: le dialogue avec les voyageurs reste primordial. Ils veulent comprendre, ils veulent de la transparence et ont besoin d’être responsabilisés”, confie Steve Burton, directeur de la sécurité de Transport for London (TFL). Une prise de conscience qui n’est possible qu’à condition que les usagers “s’approprient leurs transports”, précise Michel Vialay, maire de Mantes-la-Jolie, et conseiller général des Yvelines.

Du préjudice à la prévention

Des propos qui offrent une transition facile à la question de la prévention. En la matière, les établissements scolaires font figure de cibles privilégiées par les professionnels des transports. “Il faut multiplier les partenariats avec l’extérieur. C’est la raison pour laquelle nous sensibilisons les jeunes en allant expliquer nos métiers dans leurs écoles. Cela nous permet de diffuser bon nombre de messages à un public qui ignore tout des coulisses du transport. Nous avons également mené plusieurs actions de médiation qui ont débouché sur une hausse du taux de validation dans les bus”, atteste Florence Rodet, secrétaire générale de la Fondation du groupe RATP. Une occasion privilégiée pour faire prendre conscience aux habitués des transports que certains de leurs comportements peuvent parfois coûter cher au collectif: “L’an dernier, notre cellule antitag a verbalisé 150 grapheurs à l’origine de préjudices atteignant 1,2 million d’euros”, témoigne Serge Rivayrand. Parce qu’une présence policière permanente est impossible, d’autres leviers sont fréquemment utilisés. “En marge de notre contrat local avec la police, nous nous appuyons aussi sur une centaine d’agents privés et 300 agents de surveillance”, avoue Karim Zéribi. Très prisée dans certaines agglomérations, la vidéoprotection fait également partie du lot car “elle peut avoir un effet dissuasif en sous-sol”, estime Karim Zéribi dont l’entreprise a déployé 700 caméras cette année. Avec 1 000 caméras installées sur l’ensemble de son réseau londonien, TFL, qui partage son centre de surveillance avec la police, a même pris le risque d’établir une liste d’incivilités et d’y accoler des amendes selon leurs gravités. Un pari radical mais pleinement assumé: “Avec la hausse de fréquentation observée ces dernières années, nous avons mécaniquement enregistré une augmentation des incivilités. Cela représente un coût considérable que nous avons choisi de répercuter directement à leurs auteurs de manière à éviter de faire porter le chapeau à l’ensemble de nos voyageurs”, reconnaît Steve Burton.

EXPRESS

RANDSTAD

PÉNURIE DE CHAUFFEURS AVÉRÉE

Dans une étude européenne, Randstad dénonce la pénurie de conducteurs routiers en exercice. Interrogeant 1 500 professionnels de la route en France, aux Pays-Bas et en Belgique, le cabinet de recrutement a, par exemple, constaté qu’au sein de l’Hexagone, 13 393 projets de recrutements avaient été recensés par le Pôle Emploi représentant une hausse de 11 % par rapport à l’an dernier. Pour près de la moitié des employeurs, ces projets ont fait figure de parcours du combattant du fait de la rareté des candidats sur le marché de l’emploi. Conclusion: de plus en plus de sociétés misent sur la formation pour contourner ces difficultés. Pourtant, 10 % des conducteurs en exercice mettent en avant le fait d’exercer un métier agréable et apportant beaucoup de liberté pour 26 % d’entre eux. Seul hic: 96 % des salariés de cette branche déplorent un salaire insuffisant.

BOLLORE

AUTOLIB’ EN POLE POSITION

Mises en service gratuitement dans dix des 33 stations prévues dans Paris depuis le 3 octobre dernier, les 66 premières voitures électriques d’Autolib’ ont suscité la curiosité des usagers dès le premier tour de chauffe. Revendiquant une autonomie de 250 km en ville et 150 km au-delà, ces Bluecars bénéficient, selon Bolloré, leur concepteur, d’une vitesse limitée à 130 km/h, avec une accélération de 0 à 60 km en 6,3 secondes. S’inspirant du modèle Vélib’, ce dispositif montera ensuite crescendo avec 250 véhicules accessibles au grand public à partir du 5 décembre, 2 000 unités supplémentaires d’ici à fin juin 2012 et 5 000 véhicules dans 46 villes franciliennes d’ici à 2016. Pour atteindre un seuil de rentabilité estimé par Bolloré à 80 000 utilisateurs, Autolib’ met en avant le coût modique de l’abonnement à 12 euros par mois pour un abonnement annuel et cinq euros pour la première demi-heure d’utilisation.

Réactions
QUOTIDIEN D’USAGERS A VIF CROQUE PAR LE SITE PARTICIPATIF

www.chervoisindetransport.fr

Mon cher voisin de transport,

Était-il vraiment nécessaire que ton gros sac à dos partage le même siège que toi, réduisant bien entendu le mien de moitié?

J’ai vainement tenté de te le faire comprendre par quelques douces bousculades mais je crois que la prochaine fois je serai plus direct.

Sincèrement vôtre, Nanounette

Ma chère voisine de transport,

Je comprends que ta vie e-sociale soit très importante mais pourrais-tu choisir un autre endroit que la porte du métro pour lire tes SMS,

ou à défaut, monter dans la rame et ne pas faire rater le wagon à 3 personnes?

Bien à vous, Tom M12

Mes chers voisins de transport,

Une porte qui claque, c’est trop bruyant? Un strapontin aussi….

Cordialement, doreille

Mon cher voisin de transport,

Toi qui pensais écouter ta “musique” discrètement avec tes écouteurs, vérifie la prochaine fois que ceux-ci sont bien branchés, car entendre ton répertoire de sonneries de téléphone, nous a tous bien fait sourire.

Bien à vous, Amatrice de sonneries

Ma chère voisine de transport,

À vue d’œil, vous devez sûrement avoir l’âge de ma grand-mère,

alors laissez-moi donc être surprise, lorsque je vous propose de vous laisser ma place dans le bus, quand vous me répondez que vous n’êtes pas vieille et que c’est très impoli de ma part de le sous-entendre.

Bien à vous, Melahel

Ma chère voisine de transport,

Quand vous sortez d’un RER bondé et que par je ne sais quel aléa vous vous retrouvez à sortir une demi-heure après les autres, quand tout le monde est en train de rentrer, vous ne pouvez vous en prendre qu’à vous-même. Ponctuer votre sortie triomphante d’un “Je veux sortir, merde!” ne vous facilitera pas la tâche.

Sincèrement vôtre, Tatiana

Retour au sommaire

Auteur

  • Diane-Isabelle Lautrédou
Div qui contient le message d'alerte

Envoyer l'article par mail

Mauvais format Mauvais format

captcha
Recopiez ci-dessous le texte apparaissant dans l'image
Mauvais format

Div qui contient le message d'alerte

Contacter la rédaction

Mauvais format Texte obligatoire

Nombre de caractères restant à saisir :

captcha
Recopiez ci-dessous le texte apparaissant dans l'image
Mauvais format