Modes doux Lors des premières Rencontres nationales du vélo à Paris le 26 janvier dernier, Thierry Mariani a présenté un plan national destiné à inciter les Français à tronquer leur voiture contre un vélo. Pour accompagner l’ensemble des actions dévoilées, les crédits mis à la disposition du coordonnateur interministériel passeront de 400 000 euros à 600 000 euros.
INSPIRE des travaux du groupe de travail constitué par Thierry Mariani le 13 juillet dernier et présidé par Philippe Goujon, député-maire du XVe arrondissement de Paris, le Plan national vélo avance des objectifs clairement écologiques. “Les avantages du vélo, dont la pratique ne s’élève aujourd’hui qu’à 3 % en France, sont nombreux en termes de santé, de réduction des pollutions atmosphériques et de diminution du bruit, de budget des ménages, de développement économique”, assurait le ministre qui clôturait le 26 janvier dernier les premières Rencontres nationales du vélo à Paris. Outre les garages à vélo obligatoires dans les constructions neuves, l’accroissement de 50 % de la contribution de l’État pour le déploiement du réseau des véloroutes et voies vertes, la mise en œuvre du “tourne-à-droite” autorisant les cyclistes à ne pas marquer l’arrêt au feu rouge ou la création de vélo-écoles, ce plan met l’accent sur l’importance du développement de l’intermodalité. Pour cela, le ministre préconise la clarification du cumul de prise en charge de l’abonnement au transport et au vélo en libre-service, ainsi que la définition d’une politique tarifaire unique d’embarquement des vélos dans tous trains relevant de la responsabilité de l’État.
Au lendemain de la présentation de ce plan, plusieurs voix ont manifesté leur satisfaction devant l’attention portée par le gouvernement pour ce mode de transport. “Les mesures présentées constituent un signe de la prise en compte du vélo comme mode de déplacement à part entière et outil d’aménagement du territoire”, s’est réjoui le Club des villes et territoires cyclables (CVTC). Au-delà de la dimension symbolique, l’annonce d’un futur arrêté relatif à l’obligation de créer des locaux à vélos, l’introduction de mesures fiscales comme l’indemnité kilométrique pour les déplacements domicile travail effectués à vélo ou la réalisation d’un inventaire des portions du réseau routier national nécessitant un aménagement cyclable ont été les principales avancées saluées par le Groupement des autorités organisatrices de transport (Gart). En revanche, les deux structures déplorent le manque de précision concernant certains aspects de ce plan. “Compte tenu de l’objectif ambitieux du gouvernement de porter à 10 % la part modale des déplacements à vélo d’ici à 2020, nous aurions souhaité des éclaircissements sur plusieurs points essentiels comme l’évolution des compétences des autorités organisatrices en charge de l’élaboration des plans de déplacement urbain, les modalités d’amélioration de l’articulation entre vélos et les transports collectifs ou les capacités financières consenties pour la coordination interministérielle du vélo.” Des problématiques également soulevées par le CVTC qui rappelle que “les collectivités locales, qui supportent la quasi-totalité des 500 millions d’euros investis chaque année pour le vélo, demandent depuis plusieurs années un engagement fort de l’État” mais qui déplore des “mesures qui ne traduisent pas une véritable ambition nationale.”
Avec 40 % d’utilisateurs réguliers et près de 3,2 millions de vélos vendus chaque année, le chiffre d’affaires des acteurs économiques liés au vélo frôle 4,5 milliards d’euros et génère 35 000 emplois en France. Dans un contexte où la “consommation” de vélos varie d’une ville à l’autre puisqu’elle atteint 15 % à Strasbourg, 8 % à Bordeaux ou 2 % à 3 % à Paris, Lille ou Lyon, la comparaison avec d’autres villes européennes, où ces mêmes taux frôlent parfois 30 % laisse entrevoir de belles marges de progression. “En Allemagne, le vélo représente 10 % des déplacements, une proportion que nous souhaitons porter à 30 % voire 40 % dans certaines villes”, avouait Niels Hartwig, membre du ministère allemand des Transports, de la Construction et du Développement urbain, dans son intervention lors d’une table ronde précédant l’annonce du plan vélo. Pour encadrer de tels objectifs, l’État fédéral a initié son premier plan vélo en 2002 prévoyant que “les länder et les communes héritent des cadres juridiques et financiers de leur périmètre de compétence”, précise Niels Hartwig. Consacrant 90 millions d’euros à la promotion de ce mode de déplacement, le ministère des Transports allemand revendique la moitié de son réseau routier équipé de pistes cyclables séparées. “Pour garantir l’attractivité d’un plan vélo, il faut y consacrer des moyens humains et financiers conséquents”, conseille Niels Hartwig.
Si la France fait encore figure de Petit Poucet en matière de cyclisme, le secteur laisse présager d’un potentiel de croissance alléchant. “Avec 60 % des déplacements des automobilistes qui s’effectuent sur des distances comprises entre un et trois kilomètres, il existe des perspectives de progrès considérables pour le vélo”, considérait Jean-Louis Hélary, directeur du Centre d’études sur les réseaux, les transports et l’urbanisme (Certu). En dépit de ses vertus écologiques, “le vélo propose une offre de mobilité accessible et économique”, soutient Fabienne Keller, sénatrice du Bas-Rhin. Pire, “il peut permettre de corriger les erreurs urbanistiques”, atteste Thierry Lemoine, sous-directeur de l’aménagement durable au ministère du Développement durable. Jouant toujours dans la cour des modes alternatifs, les effets de son utilisation peuvent aussi impacter sur la fréquentation des transports en commun à condition d’avoir dressé les bonnes passerelles. “Aux vues des prévisions d’augmentation de fréquentation prévues à horizon 2020, nous devrons apporter des réponses pertinentes aux enjeux de stationnement et aux services de mobilité de porte-à-porte. Le vélo y trouverait toute sa place”, précise Bernard Gleize, directeur de l’écomobilité et de l’innovation de SNCF Proximités.
