Prospective Dans son étude Rail 2020, le cabinet de conseil Accenture livre des pistes de réflexion sur les principaux facteurs de compétitivité de la filière ferroviaire en s’inspirant de “modèles” qui ont fait leurs preuves dans les secteurs de l’aérien ou de la distribution.
AU SEIN de son étude baptisée Rail 2020, le cabinet de conseil Accenture propose une balade bucolique dans le monde ferroviaire de demain. Si l’échéance choisie n’est pas si lointaine, les modèles proposés n’en sont pas moins innovants pour le secteur. Partant des postulats d’une libération du trafic ferroviaire de passagers en marche, de préoccupations environnementales omniprésentes, du vieillissement inéluctable de la population et d’une inquiétante augmentation du trafic routier, les auteurs de l’étude se sont livrés à un jeu d’équilibriste: détecter les facteurs de changement de chaque maillon de la chaîne de valeur pour que la filière ferroviaire suive le rythme. “Dans ce contexte d’évolution permanente, l’excellence opérationnelle et la satisfaction client demeurent prioritaires. Des secteurs comme la distribution, le transport aérien ou encore l’industrie énergétique fournissent des exemples de bonnes pratiques dont le ferroviaire pourrait s’inspirer”, estime Anne Pruvot, directrice industrie et transport d’Accenture France.
Plaçant l’exigence des usagers au cœur de sa méthodologie, le cabinet prévoit une montée en puissance de la recherche de mobilité, d’instantanéité et d’accessibilité. Dans un contexte où les services de mise à disposition d’informations relatives aux trafics en temps réel sur Smartphone ou de multimodalité sont susceptibles de répondre à ces nouveaux besoins, la durée du voyage risque de devenir “un facteur primant sur la distance et profitera à la grande vitesse”, assure Anne Pruvot. Prenant l’exemple de la réduction de vingt minutes des temps de connexion entre Birmingham, Leeds et Manchester, en Grande-Bretagne, l’étude constate que l’impact de cette initiative s’est traduit par une augmentation du nombre de clients de 40 %. Pour anticiper cette tendance, l’industrie ferroviaire du futur ne pourra donc pas faire l’économie de systèmes d’information de plus en plus intelligents. “500 millions de personnes utiliseront le titre de transport sur mobile dans les réseaux d’ici à 2015, soit cinq fois plus qu’aujourd’hui”, souligne Emmanuel Schneider, expert des nouvelles technologies en mobilité urbaine et billettique d’Accenture. Autre attente des voyageurs mis en exergue par cette étude: pouvoir se déplacer dans une gare conçue comme un centre névralgique de déplacements. Ici aussi, la plupart des facteurs de mutation de l’industrie risquent d’imposer de nouvelles règles du jeu opérationnel comme l’externalisation de certains moyens constituant non seulement une alternative à l’achat mais aussi une réponse aux fluctuations de la demande. “Dans le transport aérien, plus de 50 % de la flotte commerciale fait l’objet de contrats de leasing”, confie Emmanuel Schneider. Déjà répandue dans le fret ferroviaire, cette forme de sous-traitance permet de capitaliser un savoir-faire tout en générant un chiffre d’affaires additionnel. “Dans les économies développées, la moitié des revenus des aéroports sont actuellement issus d’activités commerciales sans lien avec l’aérien: commerces, publicité, maintenance, etc. provenant principalement de contrats de franchise”, poursuit-il.
Face à la pression concurrentielle induite par la libéralisation du secteur ferroviaire de passagers, les principales armes des entreprises du secteur seront leur flexibilité et leur niveau de qualité de service. Parmi les enseignements du secteur aérien, le choix par les transporteurs de faire appel, lors des pics d’activité, à davantage des contrats de travail temporaire pour renforcer les équipes au sol. Autre bon plan soufflé par cette filière: l’utilisation de systèmes décisionnels et prévisionnels permettant de définir les besoins en ressources humaines. “Les contrats « wet lease » permettent aux compagnies de bénéficier d’un crédit-bail portant à la fois sur des appareils et l’équipage, mais aussi de réduire les charges opérationnelles récurrentes”, relève l’étude. Enfin, dernière astuce: améliorer la qualité de service à bord des trains en proposant des formations techniques et technologiques aux agents de bord. “British Airways a ainsi pu doter son équipage de tablettes fournissant des informations sur chaque passager comme le numéro de siège, la souscription à un programme de fidélité, l’historique des vols avec la compagnie, les accompagnants, etc.”, témoigne Anne Pruvot.
Selon l’étude, cette émergence de nouvelles technologies devrait aussi créer des opportunités intéressantes notamment dans le domaine des outils de géolocalisation et de géomarketing. Un exemple? My Way Aéroports de Paris qui géolocalise l’utilisateur, lui indique son itinéraire, son temps de parcours mais aussi les horaires et lieux de départ du prochain bus, la station de métro la plus proche, etc. “Aujourd’hui, les clients ne souhaitent plus seulement être acheminés d’un point A à un point B au meilleur prix et le plus rapidement possible, ils veulent avoir la possibilité de mettre ce temps de voyage à profit”, atteste Anne Pruvot. Ainsi, avec son service Travel Tip Catcher, Virgin Atlantic propose à ses passagers de partager conseils et bonnes adresses durant le voyage. Dans cette optique, la gare ne serait, bien sûr, pas épargnée par cette vague technologique, en particulier en matière d’écrans tactiles dont la présence permettrait par exemple la consultation d’informations relatives au trajet et aux activités touristiques de leur destination. “Dans le secteur de la distribution, Adidas a équipé ses boutiques pour que les clients puissent consulter l’intégralité du catalogue en ligne”, observe Emmanuel Schneider. En matière de nouvelles habitudes, la gare est également attendue sur le terrain du développement durable via l’utilisation d’énergies “propres” ou le recyclage des énergies consommées. “À Stockholm Central Station, la chaleur dégagée par le trafic humain génère 25 % de celle consommée dans un immeuble situé à proximité de la gare”, rappelle Anne Pruvot.
