Étude L’Observatoire prospectif des métiers et des qualifications dans les transports et la logistique (OPTL) a rendu fin 2011 son rapport annuel sur L’Emploi dans les transports routiers et les activités auxiliaires du transport.
QUELLES sont les tendances majeures observées en 2010? L’emploi dans le secteur a progressé de plus de 3 % dans un contexte de stabilité du nombre d’établissements. Cette croissance des effectifs est principalement à mettre sur le compte de celle des salariés de plus de 50 ans qui représentent désormais plus de 42 % de l’effectif total. Moins de femmes, plus de temps partiel, tels sont les deux autres enseignements à tirer de ce bilan social 2010.
Alors que le nombre d’établissements n’avait cessé d’augmenter entre 2004 et 2009, il s’est stabilisé en 2010 avec 3 078 établissements.
En revanche, la taille moyenne des établissements du transport routier de voyageurs s’est encore accrue en 2010: on compte ainsi 28,5 salariés en moyenne dans les établissements du secteur, contre 27,5 en 2009 et 22,5 onze ans plus tôt.
La concentration des effectifs au sein des établissements de 50 salariés et plus s’est, à ce titre, confirmée en 2010, avec près de 60 % des effectifs salariés à fin 2010 (contre 58,7 % fin 2009 et 57,1 % fin 2008), schéma 1.
La stabilité du nombre d’établissements s’est accompagnée d’une augmentation des effectifs du transport routier de voyageurs, avec plus de 87 600 salariés fin 2010, contre 85 000 salariés environ un an plus tôt.
Avec plus de 3 % sur l’année 2010, la croissance des effectifs des transports routiers de voyageurs dépasse cette année encore, et de loin, celle des effectifs salariés de l’ensemble de la branche des transports routiers et activités auxiliaires qui s’est établie à 1,2 %.
Bien que moins soutenue qu’en 2009 (+ 4,6 % en 2009), la croissance d’emplois dans le transport routier de voyageurs a néanmoins été la plus forte de la branche: celle du transport sanitaire et des prestataires logistiques s’est établie à + 2,9 %. Dans le déménagement et les transports routiers de marchandises, les emplois ont crû sur la période 2010 de+ 2,6 % pour le premier et de + 1,8 % pour le second. A contrario, le secteur des auxiliaires et celui de la location ont continué de détruire des emplois en 2010, respectivement de − 3,1 % et de − 1,5 %.
À noter également, à titre de comparaison, que dans l’industrie et la construction, l’emploi salarié en France a poursuivi sa régression en 2010 (respectivement − 1,9 % et − 0,9 %), et que, dans le secteur commercial et de la réparation automobile, la progression n’a été que de 0,2 % (schéma 2).
Sur les cinq dernières années, le transport routier de voyageurs est celui qui a connu la croissance des emplois la plus dynamique avec un taux de croissance annuel moyen de + 3,1 %, devant le transport sanitaire (+ 2,3 %). En comparaison, les effectifs salariés des transports routiers de marchandises se retrouvent en 2010 à un niveau sensiblement identique à celui de l’année 2005.
Le Languedoc-Roussillon, la Haute-Normandie, l’Île-de-France et les Pays de la Loire sont les régions qui ont créé le plus d’emplois dans le transport routier de voyageurs ces cinq dernières années, avec une croissance en moyenne de plus de 4,5 % par an. La Champagne-Ardenne est la seule région dont les effectifs salariés du transport de voyageurs sont inférieurs en 2010 à ce qu’ils étaient il y a cinq ans, avec un repli de 0,4 % par an en moyenne.
La croissance des effectifs dans le transport routier de voyageurs a été en 2010, comme les années précédentes, portée en grande partie par celle des conducteurs: au nombre de 70 000 fin 2009, ils étaient 72 600 fin 2010, représentant 16,8 % des effectifs de conducteurs de la branche des transports routiers et activités auxiliaires. La part des conducteurs dans l’effectif total des entreprises de transport routier de voyageurs s’est d’ailleurs accrue en 2010, pour atteindre le chiffre inégalé de 83 %. Après le transport sanitaire – près de 87 % des effectifs sont des conducteurs –, le transport routier de voyageurs est le secteur dont la part des conducteurs est la plus élevée. Cette part ne représente que 72 % des effectifs du transport routier de marchandises (schéma 3).
En rupture par rapport aux années précédentes, la part des femmes dans l’effectif total des entreprises de transport routier de voyageurs a diminué de − 1,3 % entre la période 2009 et 2010. Cette évolution traduit une diminution de 1,5 % de l’effectif féminin quand l’effectif masculin augmentait de 5 % sur la même période. En dépit de cette baisse, les femmes représentent toujours environ un conducteur sur quatre du transport routier de voyageurs.
A contrario, la part des salariés travaillant à temps partiel a continué à augmenter de + 3,5 % en 2010, représentant 37 % de l’effectif total du secteur et même 42 % des conducteurs voyageurs. Le temps partiel concerne plus d’un homme sur trois, ainsi que près de 48 % des femmes.
La croissance des effectifs à temps partiel dans le transport routier de voyageurs sur l’année 2010 est entièrement imputable aux effectifs masculins à temps partiel qui ont augmenté de + 6 %.
En particulier, le nombre d’hommes de 60 ans et plus, à temps partiel dans le transport de voyageurs, s’est accru de plus de 16 % sur l’année 2010, les hommes de cette tranche d’âge étant plus fréquemment à temps partiel que les femmes. A contrario, les femmes de moins de 60 ans sont relativement plus concernées par le temps partiel que les hommes de cette tranche d’âge.
Au-delà de cette différence de sexe, la part des effectifs à temps partiel est surtout très élevée à partir de 60 ans, tranche d’âge qui concentre un cinquième des effectifs à temps partiel de ce secteur: moins de 30 % des 60/64 ans et 15 % des 65 ans et plus sont à temps complet.
La part des salariés de plus de 50 ans a augmenté de 9 points en dix ans dans la branche des transports routiers et activités auxiliaires. Parallèlement, celle des moins de 36 ans, qui représentent 28 % des effectifs, s’est réduite de 12 points depuis 2000.
Le vieillissement des effectifs de la branche constaté depuis plusieurs années concerne, à des degrés divers, tous les secteurs d’activité. Le transport sanitaire dont la structure par âge est la plus jeune – en 2010, 25 % des salariés de ce secteur ont moins de 30 ans – a été relativement plus préservé par cette évolution, la part des effectifs de plus de 50 ans ayant progressé de 5 points depuis 2000. A contrario, le vieillissement des effectifs est, de loin, le plus important dans le transport routier de voyageurs au sein duquel la proportion de salariés de plus de 50 ans a crû de 17 points en dix ans.
L’augmentation des effectifs dans le transport de voyageurs a bénéficié en 2010, en majeure partie, aux plus de 50 ans. La part des salariés de plus de 55 ans a augmenté de 2,5 points entre 2009 et 2010. Parmi eux, les salariés de plus de 60 ans représentaient fin 2010 environ 10 % du total contre un peu plus de 8 % un an auparavant. Dans le même temps, l’effectif des moins de 30 ans diminuait de 10,1 % fin 2009 à 9,8 % fin 2010 (schéma 4).
Ces constats valent également pour les seuls effectifs de conducteurs: la proportion de conducteurs de plus de 50 ans a progressé de 0,6 point en un an. Les plus de 50 ans représentent désormais 43 % des conducteurs, contre 22 % dans le transport de marchandises et 16 % dans le transport sanitaire. On compte seulement 8,5 % de conducteurs de moins de 30 ans dans le transport de voyageurs, contre 26 % dans le transport sanitaire ou encore 21 % dans le déménagement.
Conséquence de ce vieillissement: en 2010, l’âge moyen des salariés de la branche est d’environ 42 ans et deux mois, soit cinq mois de plus qu’en 2009. Cette tendance à l’allongement de l’âge moyen se vérifie dans tous les secteurs d’activité de la branche, même si elle a été particulièrement marquée chez les prestataires logistiques avec un accroissement de près de neuf mois sur 2010. L’âge moyen n’a augmenté que de trois mois dans le transport routier de voyageurs qui n’en reste pas moins le secteur où l’âge moyen est le plus élevé avec 46 ans et huit mois (schéma 5).
De l’ensemble des secteurs de la branche, le transport routier de voyageurs est celui pour lequel le taux de renouvellement était, fin 2010, le plus élevé de la branche, avec 41 %. Ce taux se calcule comme le nombre d’actifs en emploi de plus de 50 ans sur le nombre total d’actifs en emploi. Il reflète les départs en retraite théoriques potentiels dans les douze années à venir (et non plus les dix années à venir) en raison du report de l’âge légal de la retraite de 60 à 62 ans intervenu en 2010 avec la réforme de la retraite (schéma 6).
Sur cette base, on peut donc s’attendre à ce que plus de quatre salariés sur dix, toutes familles professionnelles confondues, partent en fin de carrière à cet horizon, pour être remplacés dans les douze prochaines années suite à des départs liés à l’âge. Toutefois, des projections plus fines de départs en fin de carrière ont été établies à horizon 2020. Celles-ci tiennent compte de l’augmentation tendancielle des effectifs seniors du fait non seulement d’un vieillissement “naturel” de la pyramide des âges mais aussi de recrutements de plus en plus fréquents de personnes appartenant à des classes d’âges supérieures, en particulier dans le transport de voyageurs. Elles intègrent également les décalages dans le temps des départs en fin de carrière des salariés concernés par les réformes des retraites et du congé de fin activité (CFA).
Quid de ces projections? Pour l’année 2010, ce sont près de 1 600 salariés qui ont quitté le secteur en fin de carrière, soit un niveau supérieur à celui de 2009 – plus de 1 240 départs en retraite – mais sans pour autant atteindre les niveaux élevés de 2004 à 2008 (1 670 départs annuels en fin de carrière en moyenne).
Sur la période 2011-2020, le nombre des départs en fin de carrière devrait s’établir à environ 16 500, avec une moyenne de 1 500 départs par an entre 2011 et 2017, et un redressement à partir de 2018 avec en moyenne 2 000 départs par an (schéma 7).
Le taux de renouvellement est à mettre en perspective avec le taux de relève qui exprime le nombre de salariés de moins de 30 ans pour un salarié de plus de 50 ans. Il se calcule comme le nombre de salariés de moins de 30 ans sur le nombre de salariés de plus de 50 ans. Un taux de relève inférieur à 1 indique que les plus de 50 ans sont relativement plus nombreux que les moins de 30 ans, ce qui est le cas de la branche avec un taux de relève de 0,6 fin 2010 contre 0,7 fin 2009. En clair, l’écart entre le nombre de salariés de plus de 50 ans et ceux de moins de 30 ans a continué de se creuser à l’avantage des plus de 50 ans.
Ce taux est le plus dégradé dans le transport routier de voyageurs: les plus de 50 ans sont cinq fois plus nombreux que les jeunes de moins de 30 ans, soit un taux de relève de 0,2. A contrario, le transport sanitaire compte 1,2 fois plus de jeunes de moins de 30 ans que de salariés de plus de 50 ans, et reste largement le secteur de la branche où les jeunes sont le mieux représentés (schéma 8).
Quelles conclusions tirer de ce bilan pour cette année? Insensible aux variations conjoncturelles, le transport routier de voyageurs a poursuivi en 2010 sa croissance en terme d’emplois. La concentration dans le secteur ne s’est pas démentie non plus, les entreprises de 50 salariés et plus regroupant 60 % des effectifs du secteur, contre moins de 50 % il y a dix ans.
Compte tenu des difficultés que le secteur rencontre à attirer des jeunes vers les métiers de conducteurs, les entreprises ont su cette année encore adapter leur politique emploi-formation en recrutant toujours plus de “seniors”. À ce titre, la croissance des effectifs dans le transport de voyageurs a bénéficié en 2010 en majeure partie aux plus de 50 ans, dont le taux de chômage reste par ailleurs un fléau au niveau national.
Posture par conséquent plutôt flatteuse pour le transport routier de voyageurs qui peut offrir de nouvelles perspectives à nombre d’actifs sans emploi, sous réserve que les politiques publiques en matière d’accompagnement des transitions professionnelles soient au rendez-vous. Or, les débats qui ont animé la campagne présidentielle autour de l’accompagnement des demandeurs d’emploi ont plutôt renvoyé à la question des possibles gains d’efficacité dans ce domaine, au regard notamment de la mobilisation actuelle de Pôle emploi et des objectifs qui lui sont assignés.
Pour en savoir plus www.optl.fr
TRV = Transport routier de voyageurs
TRM = Transport routier de marchandises
LOC = Location de véhicules industriels
DEM = Déménagement
AUX = Activités auxiliaires de transport
PRL = Prestataires logistiques
TRS = Transport sanitaire