Lignes internationales La bataille de la longue distance en autocar est bien lancée. Quelques jours avant la SNCF, Réunir inaugure son offre en la matière. La première ligne Starshipper permet depuis le 6 juillet de relier Lyon à Turin. Réunir compte s’appuyer sur son réseau d’adhérents pour développer d’autres dessertes et proposer des lignes interrégionales lorsque la réglementation le permettra.
CEUX qui pensaient que les PME de transports routiers de voyageurs étaient promises à devenir de simples exécutants ou sous-traitants des grands groupes en sont pour leurs frais. En lançant Starshipper, son offre de “ligne de bus long-courrier”, le groupement Réunir joue dans la cour des grands. De plus, il se paie le luxe de prendre deux semaines d’avance sur iDBUS de la SNCF (voir pages 12 à 15) en ayant lancé son premier service dès le 6 juillet, et de jouer sur un créneau plus haut de gamme qu’Eurolines (Veolia Transdev) et Megabus (Stagecoach). “Le projet avait été initié à la fin du mois de juin 2011, à la suite de l’assemblée générale des adhérents de Biarritz. Au final, la mise en place de Starshipper aura pris moins d’un an”, explique Nadège Py, responsable adjointe du pôle communication recherche et développement chez Réunir. Les permanents du groupement, répartis dans différents pôles, ont travaillé sur le sujet. “Nous avons rapidement constitué un groupe de travail qui a réuni notamment une douzaine d’adhérents. Aussi, il s’agit d’un projet conçu par et pour les PME, membres de Réunir”, raconte Nadège Py. Désormais, ils peuvent s’inviter sur le marché du transport international sous la bannière Starshipper. La marque a été déposée par Réunir Service. “En revanche, sur les autocars, le nom du groupement n’apparaît pas. Nous orientons clairement cette offre vers le grand public”, souligne Nadège Py.
Durant cette phase de concertation, un premier consensus a rapidement été trouvé. L’offre de Réunir devait se placer dans la catégorie du haut niveau de service. Ainsi, les autocars utilisés sur les lignes Starshipper offrent un niveau de confort quatre étoiles avec le wifi gratuit, des prises électriques, des journaux à disposition, des places réservées… Le tout à un prix mesuré. Ainsi, sur la première ligne reliant Lyon à Turin via Chambéry, l’aller-retour est proposé à partir de 52 euros. Starshipper entend se positionner en concurrence de l’automobile. Avec ce type de tarifs, la nouvelle marque dispose de bons arguments pour se faire un nom. Tout particulièrement sur cet axe où l’alternative ferrée ou aérienne est inexistante en liaison directe. Cette première ligne est opérée par Les Courriers Rhodaniens. Le transporteur connaît bien le secteur puisqu’il exploite la ligne de TER routier entre les deux cités. “Cette offre ne satisfait pas complètement les besoins de déplacement entre Lyon et Turin. Aussi, notre ligne Starshipper vient en complément et permettra de favoriser le report modal vers les transports collectifs”, espère Yves Plessis, président du directoire des Courriers Rhodaniens. Les véhicules exploités ne sont en revanche pas accessibles pour les personnes en fauteuil roulant. “La prédisposition existe. Par ailleurs, les autres personnes à mobilité réduite peuvent voyager avec tout le confort et la sécurité nécessaire dans nos véhicules”, précise Yves Plessis.
Pour emprunter un Starshipper, les passagers devront faire un tour de surf. C’est Réunir Services qui gère la centrale de réservation. Si aujourd’hui elle ne sert que pour la ligne Lyon Turin, elle prendra tout son sens lorsque l’offre Starshipper s’étoffera. “Nous utilisons un système de réservation qui appartenait à un de nos adhérents. Nous l’avons fait évoluer pour qu’il réponde parfaitement à nos besoins. Cela nous permet de nous inscrire dans une réelle logique de e-commerce. Les places sont vendues quasiment exclusivement en ligne. Seules les ventes de dernière minute peuvent se faire dans le véhicule selon la disponibilité”, assure Nadège Py. Pour faire connaître cette nouvelle offre, Réunir déploie une campagne de communication centralisée en appuie des actions menées localement par les adhérents. Ainsi, depuis le 4 juillet et jusqu’au 17, les Abribus(r) de Lyon affichent une publicité présentant la première ligne Starshipper. Une version italienne est également visible dans les couloirs du métro turinois. “Le choix de nous afficher dans les lieux de transport public nous permet également d’inscrire Starshipper comme un acteur de la mobilité collective. Nous allons également être très actifs sur les réseaux sociaux. Différents médias seront utilisés afin de faire connaître la marque et ses services”, indique Nadège Py. Ainsi, Starshipper est présent sur Facebook comme sur Twitter, ce qui n’est pas le cas de Réunir. “Le public visé n’est évidemment pas le même. Les utilisateurs de Starshipper seront certainement parmi nos premiers ambassadeurs. Ils seront à même d’utiliser les réseaux sociaux tant pour faire partager leurs expériences de voyages que pour s’informer de l’actualité de Starshipper”, espère Nadège Py.
Si Réunir a été particulièrement actif dans le développement du projet, s’il promeut activement la marque dont il est propriétaire et gère la centrale de réservation, il n’en reste pas moins fidèle à ses principes pour ce qui est de l’indépendance d’entreprise laissée aux adhérents. “Nous restons dans notre rôle de conseil et de support, comme nous le faisons dans les différents projets de développement que nos adhérents sont susceptibles de lancer. Avec Starshipper, nous donnons à nos adhérents la possibilité de se lancer dans une action réellement entreprenariale. C’est un engagement fort et nécessairement audacieux, car ces lignes sont totalement à risques et périls”, appuie Nadège Py. Pour être à même d’ouvrir une ligne Starshipper, un adhérent devra soumettre un dossier de présentation de son projet. Celui-ci sera examiné en conseil d’administration pour validation. “Nous avons établi un cahier des charges à respecter, qui doit permettre de répondre aux exigences de qualité tant sur le plan du matériel que sur celui des services. Starshipper doit garder une unité, même si chaque exploitant reste parfaitement indépendant. Nous évaluerons également la pertinence économique des projets et la cohésion de l’ensemble”, précise Nadège Py. Chaque adhérent et exploitant d’une ligne Starshipper en assume l’entière responsabilité financière. “Néanmoins, il ne sera pas possible de cesser l’exploitation du jour au lendemain. L’exploitation de la marque se fait sous certaines règles et conditions, notamment concernant la suspension de la ligne. Cependant, nous n’obligerons jamais un adhérent d’exploiter à perte un service Starshipper”, certifie Nadège Py.
Avec une seule ligne en activité, il est difficile de parler de réseau Starshipper. C’est pourtant l’ambition clairement annoncée par Réunir. “D’ici à fin 2013, sous réserve d’obtenir les autorisations nécessaires, nous souhaitons compter une douzaine de lignes en activité. La liaison entre Lyon et Turin nous permet de donner corps au projet, elle va également jouer un rôle de porte-étendard de la marque”, prévient Nadège Py. La douzaine de ligne annoncée se placera nécessairement sur le plan international. Le projet de loi sur les lignes interrégionales de l’ancien ministre des Transports, Thierry Mariani, reste encore en suspens et ne permet pas pour le moment d’envisager de liaisons franco-françaises. “Mais Starshipper a également été lancé dans cette optique. Notre réseau d’adhérents, sa densité sur le plan national, nous donne les atouts pour faire à terme de Starshipper un acteur de poids sur le plan interrégional,” prophétise Nadège Py. Le projet de loi sur l’ouverture du trafic interrégional devrait revenir prochainement sur la table du Conseil des ministres. Dans cette attente, Starshipper voguera vers des destinations transfrontalières, sans jamais perdre de vue la pertinence interrégionale. “Nous considérons la ligne Lyon-Turin sous cet angle. Elle dessert deux grandes métropoles régionales, constituant un seul bassin de vie transnational et propose un nouveau mode de mobilité collective”, rappelle Nadège Py. Une sorte de service public à risques et périls.
