Movimento L’événement, qui s’est tenu le 15 novembre dernier au casino de Berne, constitue l’une des manifestations phare de CarPostal. Un forum inclassable, à la fois festif et aux interventions décalées mais sans prétention, qui illustre assez bien l’état d’esprit du transporteur suisse. Une séduction qui marque des points auprès des autorités organisatrices françaises.
Un Forum pour la mobilité, comme se définit Movimento, pourrait être toute autre chose que festif. On imagine assez bien une suite d’interventions de spécialistes et d’experts du genre, des graphiques, courbes, analyses avec débats interminables à l’appui, ponctués des fortes paroles prononcées par des politiques influents. Ici rien de tout çà, une journée courte et rythmée, avec des intervenants (astrologue, aventurier, commerçant internet, sportif…) qui ne se prennent pas au sérieux et manient volontiers l’humour et la dérision, en complicité avec Nicole Berchtold, une blonde animatrice de la télé suisse. L’année dernière, l’un des thèmes du Movimento était “l’éloge de la lenteur ». C’est dire. Seul retour sur terre, peut-être, l’attribution au cours de la journée, du « Flux », un prix, le sixième du genre, destiné à récompenser le « nœud de communication d’or » (cf. encadré), et qui reconnaît un savoir-faire national en matière d’interconnexion et d’intermodalité. Le public, constitué de plus de 200 personnes, dont une large partie de représentants des autorités organisatrices qui ont confié leurs transports à CarPostal, ou de fournisseurs et partenaires, est sous le charme. Et cette année, la délégation française comptait une dizaine de représentants.
« Nous croyons aux vertus de la simplicité, de la convivialité et de la proximité », confirme Philippe Cina, responsable du développement du marché international de CarPostal Suisse, à Berne. Un credo qui peut expliquer, peut-être en partie, la bonne percée réalisée par le transporteur suisse en France. Créé en 1906, CarPostal a mis un peu moins d’un siècle avant de franchir nos frontières, puisque c’est en 2004 qu’il a pris pied à Dôle (39), pour l’exploitation de son réseau urbain, une délégation de service public qui a été renouvelée en 2009, pour six ans. Obernai (67) et Bourg-en-Bresse (01) ont suivi en 2006, pour des contrats de six ans qui, à l’heure du Movimento, étaient en attente de renouvellement. D’autres contrats similaires sont en cours pour les réseaux de transport en commun de Macon (71) et d’Agde (34), depuis 2009, puis de Villefranche-sur-Saône (69) depuis 2010. Mais la grande percée en France reste l’obtention des lignes express du département de l’Isère, autour de Grenoble, qui bénéficient de plus de l’expérimentation d’une voie dédiée sur autoroute. « Sur certaines relations, nous atteignons 5 000 voyageurs par jour, avec des fréquences toutes les cinq minutes, en heure de pointe », se félicite Philippe Cina. Fort de ces avancées, CarPostal a décidé de déplacer le siège de sa direction générale France, de Bourg-en-Bresse à Saint-Priest, depuis le mois d’avril dernier. En fait, une tête de pont destinée à asseoir les développements attendus.
Jouer la proximité, un choix que Sandrine Sarrazin, responsable des transports à Villefranche-sur-Saône, explique: « c’est simple, CarPostal a repris l’exploitation du réseau caladois en janvier 2010, et nous voyons régulièrement notre exploitant, alors qu’auparavant je n’avais jamais rencontré les responsables du précédent délégataire, alors que je suis en poste depuis 2008 ». L’autorité organisatrice constate, elle aussi, des avancées. Jean Picard, président de la Communauté d’Agglomération de Villefranche-sur-Saône (52 000 habitants) se félicite d’une décision pour laquelle il s’est personnellement engagé: « le cadencement a progressé, l’amplitude des services s’est élargie, de nouvelles lignes ont été créées et nous constatons, en cette fin 2012, une hausse de la fréquentation de 62 % par rapport à la situation d’avant 2010 ».
Même s’il lui faut bien reconnaître une augmentation des budgets. « En plus des ressources provenant du versement transport, nous sommes passés de 0,6 million d’euros à 1,2 million par an et, compte tenu du renchérissement du prix des carburants, ce n’est peut-être pas fini. Mais nous avons fait reculé la part de la voiture dans les déplacements urbains », relève-t-il.
Le constat est identique à Macon. « Dès 2009, nous avons procédé à la restructuration complète du réseau, ce qui a conduit à une augmentation de l’offre kilométrique de 20 %. Nous avons aussi augmenté l’offre de transport à la demande. Ces mesures ont provoqué une augmentation de la fréquentation de 10 % par an. Aujourd’hui, alors que le transfert de compétence entre le Syndicat Intercommunal des Transports Urbains du Mâconnais et du Val de Saône (Situm) est en train de s’opérer au profit de la Communauté d’Agglomération du Mâconnais et du Val de Saône (Camval), l’heure est, pour nous, à la pédagogie, à la promotion et à la communication autour du réseau », déclare Carole Venet-Campagne, directrice de CarPostal Mâcon.
« Nous souhaitons nous développer sur la base de notre savoir-faire: c’est-à-dire dans le domaine des transports urbains, des transports interurbains et aussi grâce à des acquisitions », déclare Beat Mueller, responsable du marché international. « Au niveau des transports urbains, nous nous limiterons à candidater sur le marché des villes moyennes, jusqu’à 120 000 habitants, prioritairement celui de la façade Est de la France, de l’Alsace au Languedoc-Roussillon et PACA, pour des réseaux qui exploitent uniquement un réseau d’autobus », précise Philippe Cina. Quant aux acquisitions de sociétés françaises, sur le même périmètre, elles font aussi partie des objectifs de CarPostal. L’entreprise suisse vient d’acquérir Autocars Rochette, une entreprise du Forez, qui sous-traite des prestations pour le compte de la Stas, le réseau de transport en commun stéphanois.
« Nous avons d’autres dossiers sous le coude » avoue Beat Mueller. Partant de là, les choses devraient aller vite. « Nous envisageons de passer d’une activité de 50 cette année, à 100 millions d’euros, l’année prochaine » ambitionne Beat Mueller. « Nous comptons nous engager dans cinq ou six appels d’offres par an, de façon à augmenter notre implantation française », déclare Beat Mueller. Et pour ce qui est des lignes régulières, l’un des prochains dossiers sera bien celui des lignes de dessertes des stations de sports d’hiver alpines, au départ de Lyon Saint Exupéry. « Effectivement, il s’agit d’un dossier intéressant », reconnaît Nathalie Courant, directrice de la filiale CarPostal France… Au-delà, puisque avec 80% du marché suisse CarPostal ne peut chercher son développement qu’à l’international, le transporteur visera, à l’horizon 2014, son installation dans d’autres pays européens.
Née en 1906, la société CarPostal, filiale de La Poste, représente, en Suisse, la troisième activité de l’entreprise publique, après celle du courrier et celle de la finance et de la banque. Le transporteur emploie environ 2 000 salariés sous statut, plus 1 500 employés, sous contrat, pour une flotte d’environ 2 200 véhicules.
En dehors de Chemins de Fer Fédéraux, CarPostal est le premier transporteur par autocar de la Confédération. Il traite environ 80 % des transports interurbains et exploite aussi plusieurs réseaux de transport en commun urbains: Sion, Delémont, Moutier, Frauenfeld, Porrentruy… Sa filiale française compte, à ce jour, 800 collaborateurs pour 400 véhicules.
Quatre candidats restaient dans la « short list », pour l’attribution du « Nœud de la Communication d’Or », une compétition organisée sous l’œil très critique de l’Union suisse des Transports Publics (USTP) et de CarPostal: Sargans, Sion, Winterthur et l’aéroport de Zurich. Avec comme thème retenu cette année, « l’information client », le jury présidé par Ueli Stückelberger, directeur de l’USTP, a finalement retenu l’aéroport de Zurich, pour l’architecture et le design de sa signalétique.
« Le client qui ne connaît pas les lieux et quelles que soient ses origines, sa culture, sa langue, son éducation, son âge… peut trouver, dans un temps raisonnable, l’itinéraire qu’il cherche, en fonction de ses besoins, avec le minimum de distance à parcourir; la signalétique de la plateforme zurichoise reste très distanciée des panneaux publicitaires et répond parfaitement à ces exigences», a commenté Ueli Stückelberger.
