Sologne Le 19 janvier 2013, la ligne à voie métrique du Blanc-Argent
« Cette ligne a failli disparaître », rappelle Jean-Michel Bodin, vice-président de la région Centre en charge des transports, évoquant « l’engagement tenace [des élus et de la population] qui a su triompher de tous les atermoiements. » Et « sa renaissance devrait être une vitrine pour une politique nationale de la relance des lignes rurales », renchérit Jeanny Lorgeoux, sénateur-maire de Romorantin.
D’autant que, depuis 2003, la région, qui avait intégré la ligne dans le périmètre des TER en 1998
Appliquée dès le 13 juin, cette décision posait des problèmes de correspondances et d’allongement des durées de trajet aux 400 000 voyageurs (dont plus de 50 % de scolaires). Ainsi à Salbris, avec l’axe Paris-Orléans-Vierzon-Bourges, et à Gièvres, avec la ligne Vierzon-Tours.
Après l’immédiate levée de boucliers des élus et des usagers, la recherche de solutions de rénovation, à un coût acceptable pour la collectivité, s’est avérée complexe. Plus de 20 km de voies devaient être rénovées d’urgence sur une ligne équipée dès l’origine de rails double champignon (théoriquement réversibles) et posés sur ballast de sable avec des traverses espacées. Des assises centenaires, fragiles et à bout de souffle.
Comment réduire le coût d’une remise à niveau de 20 millions d’euros, auxquels pouvaient s’ajouter 10 millions pour l’installation d’une signalisation automatique?
RFF a étudié la manière d’adapter une petite ligne à des référentiels généraux, habituellement appliqués pour des rénovations de voie aux critères calés sur les besoins des grandes lignes. Il fallait tenir compte des vitesses à pratiquer, des courbes du tracé, du trafic de la ligne et de la charge à l’essieu des matériels qui y circulent. La rénovation de la voie du BA a ainsi été bouclée pour 0,55 million d’euros par kilomètre au lieu du 1 à 1,2 million d’euros par kilomètre d’une ligne classique et 0,8 million d’euros par kilomètre d’une ligne dédiée fret.
En décembre 2011, la région et RFF signaient une convention qui lançait une opération de 13,6 millions d’euros répartis entre trois financeurs: 64,7 % pour la région, 33,5 % pour RFF et 1,8 % pour la communauté de communes du Romorantinais et du Monestois. En neuf mois de travaux, les voies sont rénovées avec la pose de rails modernes, dont deux tiers de réemploi en provenance de la LGV-Atlantique! Plus 17 000 traverses ont été renouvelées et 31 000 tonnes de ballast injectées en plus de nombreux ouvrages réhabilités, de passages à niveaux rénovés et de terrassements consolidés. Le trafic a été rétabli à 70 km/h le 7 janvier, pour la rentrée scolaire, avec un nouveau système d’exploitation (voir encadré), et cela, en dépit d’incidents liés à des mouvements de terrain au sud de la ligne. Ces incidents ont eu lieu après la réouverture, ils ont vite été résolus par les équipes de maintenance.
« Le chantier de renouvellement de la voie du Blanc-Argent a été un véritable laboratoire en faveur de nouvelles solutions de modernisation », constate Stéphane Leprince, directeur régional de RFF Centre-Limousin. D’autant, poursuit-il, « que ces solutions pourraient être transposées sur de nombreuses autres lignes dont la situation nécessite des décisions rapides. » RFF propose de redimensionner les opérations de renouvellement en n’y incluant pas l’option fret si les lignes concernées n’ont aucun potentiel dans ce domaine. Cette décision technique permet d’armer la voie moins lourdement que les 22,5 tonnes du référentiel et avec une charge de 16 tonnes par essieu au lieu des 8 à 10 tonnes pour Le BA.
Alors que les travaux en cours pour la réouverture du TER de Chartres-Voves-Orléans se font sur des critères classiques en raison de l’existence du fret, l’expérience du BA pourrait profiter à la rénovation de Tours-Loches demandée par la région Centre.
Cette ligne interdépartementale à voie métrique, créée en 1902 par la Compagnie du Blanc-Argent, reliait Le Blanc (Indre) à Argent-sur-Sauldre (Cher) sur plus de 190 km. Elle se réduit désormais au trajet Salbris-Valençay (56 km). La section Valençay-Luçay-le-Mâle (11 km) est suspendue depuis 2009 et exploitée par route. Celle vers Buzançais (35 km) est fermée.
L’exploitation de la ligne continue sous l’égide de la Compagnie du Blanc-Argent intégrée à Keolis (groupe SNCF) sous le sigle BA.
Il s’agissait d’augmenter l’offre sans engager de gros travaux de signalisation, ni créer de nouvelles voies d’évitement dans les gares pour le croisement des trains. Cela impliquait qu’une solution originale d’exploitation soit mise au point, avec un service de navettes doubles, et selon un système centré sur Romorantin, agglomération sous-préfectorale du Loir-et-Cher où converge l’essentiel des trafics et qui se trouve à mi-parcours de la ligne. Au lieu de se limiter à faire circuler 4 ou 5 trains aller-retour quotidiens et de bout en bout sur les 56 km de la ligne, l’offre se compose désormais de 7 navettes aller-retour Romorantin-Salbris et de 7 navettes aller-retour Romorantin-Valençay. Une solution qui pourrait également faire école sur des lignes TER rurales à la géographie en antenne…
