Autour du vélo Le Club des villes et territoires cyclables aime à le rappeler: chaque année, il se vend en France plus de vélos que d’automobiles neuves! La France se classe parmi les plus gros marchés européens, mais cela ne se reflète pas forcément dans les statistiques. À l’industrie du cycle de gagner en visibilité, même chose pour les services aux collectivités, créneau où des spécialistes sont déjà bien ancrés, à commencer par le groupe JCDecaux et, dans une moindre mesure, des opérateurs tels que Keolis ou Veolia.
Le marché des prestataires de vélo urbain est, à l’exception de quelques géants, très morcelé. Sans compter qu’une partie de ce secteur est en zone grise: en ville, des associations loi 1901 se proposent d’animer des ateliers de réparation et des bourses d’échange autour de la bicyclette. En marge de ces acteurs, importants localement mais difficilement répertoriés nationalement, il existe d’autres opérateurs qui s’intéressent de près au vélo. Ainsi, en 2010, Ineo Systrans a obtenu le prix de l’innovation lors du salon Transports publics, catégorie accessibilité de l’information en temps réel pour la disponibilité des vélos en libre-service aux arrêts desservis par le bus. « Ce projet est une initiative de l’autorité organisatrice Rennes Métropole qui avait lancé un appel d’offres en 2008 pour un SAEIV
L’information en temps réel est issue du développement spécifique pour l’échange d’informations et l’affichage sur les écrans TFT des véhicules (conception de la station de composition). Le système repose sur des serveurs échangeant des données en protocole IP. Pour éviter de saturer les télécommunications avec des rafraîchissements d’information trop fréquents, au-delà de 5 bicyclettes disponibles en station, l’affichage se contente d’un message général. Les sollicitations de la bande passante ont lieu sous ce seuil pour que les passagers puissent éventuellement adapter leur parcours en bus. En prime, l’information voyageurs tient compte des autres modes de transport, modes ferrés ou lignes interurbaines d’autocars. Le projet s’est déroulé dans les temps, Ineo Systrans ayant l’entière responsabilité de toutes les opérations: « Il est de plus en plus courant que les clients demandent aux fournisseurs de gérer toute l’interface […] Nous sommes pleinement maîtres de nos systèmes », explique Éric Bauer, chef de projet chez Ineo Systrans. Preuve de la pertinence de la solution: les heures de pointe constatées sur les vélos en libre-service dans les villes (8-9 heures, 12 h-14 h et 17 h-19 h) prouvent qu’il y a une réelle complémentarité entre les deux moyens de transport.
Le groupe JCDecaux a lui-même développé et géré son concept de vélo en libre-service qui est commercialisé par sa filiale Cyclocity. Ce système de transport public individuel, popularisé par Lyon en 2005 avec les premiers Vélo’v, repose également sur la pleine et entière responsabilité de l’opérateur, le groupe publicitaire JCDecaux. « On avait comme idée de départ de réinventer les vélos jaunes mis en place à l’époque de Michel Crépeau à La Rochelle, mais en profitant de l’apport des nouvelles technologies », explique Albert Asseraf du groupe JCDecaux. La clef de voûte du système: un libre-service 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 sans opérateur physique. Le système fait l’objet de 8 brevets et permet (pour les non abonnés ou les utilisateurs occasionnels) le paiement à la prestation par carte bancaire.
La ville de Vienne en Autriche est la première à tester le dispositif en 2003. Le grand saut a lieu en 2005 avec Lyon et la mise en place de 2 000 vélos! Depuis, ce chiffre a été doublé. Gilles Vesco, élu de la communauté urbaine en charge de la mobilité, se souvient: « le projet Vélo’v est le fruit d’une volonté politique de la communauté urbaine et d’une proposition technologique du groupe JCDecaux. De plus, nous étions en renouvellement de délégation sur le mobilier urbain, le groupe industriel a eu le service qui a emporté l’adhésion du Grand Lyon. Après pas mal d’adaptations, on a lancé Vélo’v sur Lyon et Villeurbanne en mai 2005. Cela ne peut fonctionner que sur le maillage d’un territoire. Face aux demandes et à la curiosité du public, le service a bogué dès le premier jour! On a dû repasser en mode manuel, le service a repris 8 jours plus tard avec un serveur redimensionné. Depuis, c’est un vrai succès avec 100 millions de kilomètres parcourus par les Vélo’v en 8 ans. C’est devenu un service intégré à la vie quotidienne des Lyonnais. » Sur l’agglomération de Lyon, lors de grèves des TCL le 24 septembre 2009, des pics ont été enregistrés avec 44 843 locations en une seule journée. Cela correspond à un taux de rotation de 12 locations par jour et par vélo, et un trafic sur le serveur de 1 mouvement toutes les 2 secondes!
Au 3 janvier 2013, on compte 500 millions de kilomètres parcourus dans les 52 villes faisant appel à Cyclocity (335 000 abonnés et 33 900 bicyclettes). L’équation économique repose sur l’augmentation des espaces publicitaires concédés en voie publique. JCDecaux opère seul ou en association, comme à Paris avec la Somupi, détenue à 66 % par JCDecaux et à 34 % par Médias & Régies Europe, filiale de Publicis. Le service, intégralement financé par la publicité, ne réclame aucun investissement de la part des collectivités locales. Par contre, elles touchent les recettes issues des locations des bicyclettes: pour Paris les 100 000 à 120 000 mouvements quotidiens génèrent 15 millions d’euros de recettes annuelles. Paris a le plus gros parc de vélos en libre-service au monde: 24 000 bicyclettes! Un impact réel sur la mobilité urbaine: 40 % des trajets faits à vélo le sont en Vélib’. En 2009, un sondage effectué auprès des utilisateurs lyonnais de Vélo’v a révélé que 55 % des abonnés reconnaissaient moins se servir de leur automobile. Depuis, la tendance se généralise et les collectivités tendent à intégrer les vélos en libre-service dans leurs appels d’offres relatifs aux transports urbains. La dernière illustration en date est Bordeaux avec VCub et Bordeaux Bus.
Seule ombre au tableau: l’état des vélos n’obtient que 47 % d’usagers satisfaits (enquête TNS Sofrès sur Vélib’, 2012). Des mesures ont été prises pour rendre les vélos plus solides: cadre renforcé, d’où un poids conséquent de 22 kg, équipements de grands spécialistes du monde cycliste, les selles Royal et les dérailleurs Shimano, et recours aux Cycles Lapierre pour le montage. Cependant, les vélos subissent malgré tout les assauts conjoints d’une utilisation intensive et du peu d’égard des utilisateurs.
En marge des Cycles Lapienne qui sous-traitent le montage des vélos de Cyclocity, Cycleurope, avec ses marques Peugeot et Gitane, est un des rares constructeurs à communiquer autour du vélo utilitaire. De leur côté, les fournisseurs de consignes à vélos sont nombreux sur le marché. Ils proposent des solutions pour parquer les bicyclettes en hauteur et augmenter les capacités de stationnement sans augmenter les surfaces foncières.
Pour le comptage du trafic vélo, outil indispensable pour les services techniques et les élus, une PME de Lannion fabrique et commercialise l’éco-compteur (un système de comptage adapté aux vélos initialement développé par le Centre d’études technique de l’équipement Sud-Ouest). Via la fonction Zelt-Connex, le capteur relais Zelt, décliné en plusieurs boucles, peut être relié à un automate de feux ou tout autre outil de gestion du trafic. Il existe plusieurs types de boucle Zelt pour évaluer la fréquentation d’une voie cyclable: permanente ou temporaire, sur chaussée, avec ou sans enrobé. Le comptage peut être valorisé par la pose de l’éco-totem qui affiche le trafic en clair sur la voie. Un moyen pour les élus de communiquer sur la politique vélo et de quantifier la réalité du trafic. Le capteur peut faire la distinction entre les vélos, les voitures et les poids lourds, une variante piétons a même été développée. Pour obtenir les données en temps réel, le capteur peut être relié par GSM à une unité d’analyse et de rapports de fréquentation. Quant aux vélos électriques, Aguidon Plus conçoit une recharge à assistance électrique par induction. Un futur succès pour les entreprises qui intégrent la mobilité vélo dans leurs plans de déplacements?
SAEIV: Système d’aide à l’exploitation et à l’information voyageurs.
