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Les bacs de Seine naviguent entre histoire et modernité

Liaisons fluviales Cent vingt kilomètres de Seine, entre Rouen et Le Havre, et seulement trois ponts… Les courbes sinueuses du fleuve auraient pu constituer une frontière naturelle s’il n’y avait eu les bacs reliant quotidiennement les deux rives de la Seine.

Ces derniers transportent chaque année plus de 10 millions de passagers.

Il est 4 h 30 du matin. Dans le silence de la nuit un bourdonnement se fait entendre. Les bacs entrent en Seine dès potron-minet pour une longue journée de va-et-vient entre les deux rives. L’espace d’une traversée le temps suspend son vol, car les passagers le savent bien: dans tout ce qu’il fait, le bac se hâte lentement, mais il leur fait économiser de nombreux kilomètres qu’ils auraient dû parcourir jusqu’aux ponts.

« La Seine compte la moitié des bacs français, c’est dire l’importance de ce service dans notre région. Nous disposons de deux bacs maritimes à Duclair et Quillebeuf. Les six autres sont des bacs fluviaux, à capacité de transport moins élevée », détaille Marc Nannarone, directeur des ports départementaux, bacs et voies vertes au conseil général de Seine-Maritime. À bord des bacs, capitaines et matelots se relaient tout au long de l’année pour assurer un service de liaison sept jours sur sept. « Notre équipe ne compte pas moins de 102 navigants: 46 marins et 56 mariniers. Ils nous permettent d’assurer les liaisons en semaine pour les travailleurs, et le week-end pour les touristes qui se rendent notamment à la Bouille et à Jumièges. »

Suivi technique

Le pôle technique des bacs de Seine est on ne peut plus impressionnant. Les ateliers, basés à Duclair, assurent les réparations de première intervention, allant parfois jusqu’à la réfection des moteurs – des propulseurs Voith. « Nos techniciens savent traiter le quotidien. Nous avons deux personnes d’astreinte qui peuvent également assurer une intervention technique en cas de panne. Notre objectif étant de garantir un niveau de service optimum, nous avons aussi un bac fluvial et deux bacs maritimes de réserve qui peuvent prendre le relais en cas de problème. On arrive à remplir 97 % de notre service de liaison annuel », poursuit le responsable.

L’ensemble de la flotte renouvelée en majorité dans les années 1970 ne présente pas d’usure particulière puisqu’elle navigue en eau douce. Le seul point qui nécessite toute l’attention des techniciens et des navigants réside dans les chocs causés par les montées et descentes des véhicules: « Les voitures, camions et convois agricoles sont bien plus lourds qu’il y a une trentaine d’années. Nous devons donc veiller à ce que les véhicules rentrent au pas sur nos bacs pour éviter d’affaiblir le tablier. » Tous les trois ans, les bacs fluviaux font tout de même l’objet d’une révision complète aux docks de Rouen, tous les deux ans pour les bacs maritimes. « C’est là que nous découvrons l’état de la coque, mais en général nous n’avons pas de mauvaise surprise. » Des arrêts réguliers de remise en état et de modernisation sont également programmés pour anticiper tout problème de maintenance. Un contrôle technique permanent, en somme.

L’élément eau: un facteur remuant

Aux commandes du bac maritime de Duclair, le capitaine Sébastien Seite connaît l’élément eau comme sa poche. Il a navigué dans toutes les mers du monde avant de rejoindre la Seine et ses boucles verdoyantes. Rien à voir, c’est sûr, avec les grands espaces, mais ce marin expérimenté est finalement tombé sous le charme de l’ondoyante quiétude du fleuve normand. Les deux mains aux manettes, il commande les propulseurs avant et arrière de son bac qui peut accueillir jusqu’à 35 véhicules légers. « L’entrée en cale est le moment le plus délicat de la traversée. Il faut repérer le positionnement des pieux pour savoir quel est le niveau d’eau sous le bac. Lors du chargement et du déchargement il faut également être vigilant puisque la position du bac change au fur et à mesure », explique le marin. Deux fois par jour, la marée est montante. Les navigants doivent anticiper l’arrivée d’eau qui peut monter très vite sur la cale. « Nous devons également tenir compte du fort trafic sur la Seine. Le passage des bateaux génère des vagues parfois importantes qui nous obligent à être vigilants en permanence. Surtout que nous ne naviguons pas dans le même sens que les autres! »

Gratuit depuis 2005, le service attire chaque année plus de 10 millions de passagers, soit 3,5 millions de véhicules. Pourtant, les bacs représentent un vrai coût pour le département. « On compte dix millions d’euros pour un bac maritime et deux millions pour un bac fluvial. Sans parler du coût d’entretien. Mais la gratuité est née d’une volonté politique, et il est vrai que depuis, les usagers hésitent beaucoup moins à prendre les bacs. D’autant qu’ils prennent un vrai plaisir à traverser la Seine en bateau », détaille Marc Nannarone. Depuis la fermeture du pont Mathilde à Rouen, en octobre 2012 suite à un incendie, le département a également mis en place des services supplémentaires pour améliorer le trafic des bacs aux heures de pointe. Les bacs de Canteleu-Dieppedalle, Grand-Quevilly, Petit-Couronne, Sahurs, Val-de-la-Haye et Berville-sur-Seine ont ainsi vu leurs rotations quotidiennes augmenter. Plus de 80 000 véhicules passaient quotidiennement sur le pont Mathilde avant sa fermeture. « Historiquement, les bacs créaient déjà un véritable lien avec l’agglomération rouennaise, mais depuis il a été considérablement renforcé », poursuit le responsable.

Les bacs de Seine représentent donc un transport en commun tout à fait particulier, dont l’histoire suscite l’intérêt de nombreux passionnés et bloggeurs. Plus d’une trentaine de bacs ont navigué sur le fleuve avant l’ouverture des ponts de Tancarville (1959), de Brotonne (1977) et de Normandie (1995). Seuls les plus importants restent aujourd’hui en fonction, mais leur histoire est à jamais inscrite dans l’évolution de la région Haute-Normandie, comme le prouvent les sections qui y sont consacrées au MuséoSeine de Caudebec-en-Caux et au musée maritime, fluvial et portuaire de Rouen. Une véritable plongée dans les racines du fleuve et de sa traversée.

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Auteur

  • Catherine Duverney-Prêt
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