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Vers une recomposition des TER?

Réforme régionale Le regroupement des régions annoncé par le président de la République pose, au-delà de l’inévitable polémique politique de ce type de bouleversement, de nombreux problèmes dans le domaine de la restructuration des réseaux TER. D’autant que cet aspect de la réforme semble avoir été largement sous-estimé, au moment où se préparent les futurs CPER (contrat de projets État-région) 2014-2020 dont le volet ferroviaire reste hautement stratégique.

Comment adapter les volets ferroviaires des CPER 2014-2020, actuellement en phase de finalisation et de signature, avec le nouveau découpage régional annoncé par François Hollande? Comment progressivement regrouper les réseaux TER dans les limites de ces nouvelles régions, et surtout, comment rééquilibrer ces nouveaux réseaux qui parfois deviennent fortement polycentriques? Autant de défis qui restent à relever, alors qu’il avait fallu déjà près de deux décennies pour faire émerger peu à peu des sortes d’identités ferroviaires dans les 22 régions d’aujourd’hui!

Globalement, six nouveaux ensembles ferroviaires devraient naître de ce regroupement des régions qui a pour conséquence de créer 7 entités régionales: Bourgogne – Franche-Comté, Normandie réunifiée, Alsace – Lorraine, Picardie – Champagne-Ardenne, Languedoc – Roussillon, Midi-Pyrénées et un groupement régional Centre – Limousin – Poitou-Charentes. Alors qu’on devrait sans doute s’acheminer dans les régions regroupées vers une répartition de certaines compétences entre les capitales des actuelles régions, il paraît intéressant de focaliser les conséquences ferroviaires de la réorganisation territoriale sur la situation actuelle de certaines lignes, au point de vue de leur capacité et de leurs équipements. Et principalement celles qui relient les métropoles des régions à regrouper.

Dans les deux premiers cas de regroupement régional, le rapprochement allait politiquement de soi et il était d’ores et déjà en cours. Mais si sa transcription dans la géographie ferroviaire ne pose pas de problème majeur, certaines faiblesses sont évidentes en Normandie. D’autant qu’à une double attraction parisienne depuis Caen et Rouen qui fragilise l’exploitation des deux lignes principales, il faut ajouter le problème de la faiblesse de la liaison Rouen – Caen. Celle-ci dépend d’une ligne tortueuse, de capacité moyenne et non électrifiée dans sa partie ouest depuis Rouen(1). La création, qui reste toujours à l’ordre du jour, de la ligne nouvelle Paris – Normandie (LNPN) devrait toutefois bouleverser la donne en proposant des relations Rouen – Caen en une heure ou moins… mais au-delà de l’horizon 2025!

En revanche, en Bourgogne – Franche-Comté, la LGV Rhin-Rhône et le grand axe classique (Paris) Dijon – Dôle – Besançon, qui sont tous deux bien équipés, structurent le réseau d’est en ouest et en conformité avec les flux interrégionaux existants.

Hormis les accélérations qui seront possibles dès 2016 entre Metz, Nancy et Strasbourg, avec des temps de parcours de moins d’une heure grâce à l’achèvement de la seconde phase de la LGV est-européenne, le regroupement Alsace – Lorraine ne devrait rien changer au point de vue ferroviaire. Et encore moins en ce qui concerne les TER au cœur de la nouvelle région, en raison de la barrière vosgienne qui n’est franchie, au point de vue des liaisons ferroviaires, qu’au nord des deux régions avec la LGV est-européenne et les axes classiques Paris – Nancy – Strasbourg et Metz – Strasbourg. À cela s’ajoutent l’axe interrégional de l’artère nord-est (Dunkerque – Lille) Thionville – Sarreguemines – Strasbourg et la ligne TER de faible capacité, car en grande partie établie à voie unique et non électrifiée, qui relie Strasbourg à Molsheim, Saint-Dié et Épinal.

Entre Picardie et Champagne-Ardenne, une rocade insuffisante

Le mariage entre Champagne-Ardenne et Picardie suscite la perplexité, tant au point de vue géographique que ferroviaire. La faiblesse des infrastructures, déjà manifeste entre les deux parties de la Normandie, devient ici un véritable handicap. En effet, si Châlons-en-Champagne et Amiens sont, comme Rouen et Caen, reliées par la grande rocade de contournement du bassin parisien(2), c’est par l’une des sections les moins équipées (10 % électrifiée) et les moins capacitaires (signalisation en partie non automatique), et qui fait piètre figure par rapport aux performances possibles avec l’utilisation du réseau autoroutier…

Ce type de problème ne se pose pas dans le regroupement entre Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, puisque les deux actuelles capitales régionales sont reliées par l’une des lignes principales du réseau classique via Carcassonne, Narbonne et Béziers. Mais cette ligne est surchargée, et la partie qui pourrait structurer la nouvelle région le sera tout autant, voire plus en raison des trafics induits après l’achèvement de la LGV de contournement Nîmes – Montpellier. La situation est d’autant plus préoccupante que les autres lignes qui relient les deux région(3) sont des axes de montagne établis à voie unique, faiblement équipés, et qui offrent peu de capacité… et de potentiel de trafic!

Néanmoins, le regroupement qui pose le plus de questions au point de vue de la cohérence ferroviaire est celui qui associe trois régions aux rapports historiques et géographiques peu évidents avec le Centre, le Limousin et Poitou-Charentes. Ici, le polycentrisme le plus total de la géographie ferroviaire reste la règle, une situation aggravée par la… centralisation parisienne des lignes. Une situation qui d’ailleurs demeurera, et même s’aggravera à l’issue de la réalisation de la LGV Sud Europe Atlantique (LGV SEA), dont le tracé est établi parallèlement à celui de la ligne classique (Tours) Poitiers – Angoulême (Bordeaux). Et si, comme les autres régions regroupées, on examine les infrastructures ferroviaires qui relient les actuelles capitales régionales, on se trouve dans le cas d’un triangle Orléans – Poitiers – Limoges – Orléans, une construction totalement déséquilibrée qui présente deux côtés performants offerts par les deux radiales nationales (Paris) Orléans – Tours – Poitiers (Angoulême – Bordeaux) et Orléans – Limoges et une base fragile réduite à une ligne régionale Poitiers – Limoges, au tracé sinueux, à voie unique et non électrifiée! Et cela, alors que le principe d’une LGV Poitiers – Limoges est passé au second plan, après l’adoption par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, en juillet 2013, des propositions de la commission Mobilité 21(4). L’aménagement ferroviaire du territoire n’est visiblement pas au rendez-vous de la réforme territoriale. Mais la question qui se pose est de savoir s’il avait été vraiment pris en compte en amont.

Si la section initiale périurbaine (Rouen) Tourville – Elbeuf – Saint-Aubin sera sous caténaire prochainement, il reste le hiatus entre Elbeuf et Serquigny, bifurcation avec la ligne Paris – Caen.

Selon le grand itinéraire Rouen – Amiens – Reims – Châlons-en-Champagne – Culmont – Chalindrey – Dijon – Nevers – Bourges – Vierzon – Tours – Le Mans – Alençon – Argentan – Mézidon – Serquigny – Rouen.

Notamment le parcours de la vieille transversale Toulouse – Rodez – Séverac – Mende qui, avec sa partie terminale via Le Puy et Saint-Étienne, proposait des improbables Toulouse – Lyon il y a près de trente ans!

La création du barreau Poitiers–Limoges, branche sur la LGV SEA, aurait bouleversé la donne ferroviaire de la nouvelle région.

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Auteur

  • Michel Chlastacz
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