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Nouveaux maires, mêmes inquiétudes

Rendez-vous Le Salon des maires et des collectivités localess’est tenu du 25 au 27 novembre derniers. Rassemblant 7 000maires et présidents d’intercommunalité, certains arpentaient les alléespour la première fois depuis leur élection en mars dernier.

L'an dernier, le Salon des maires et des collectivités locales ressemblait àune opération déminage pour l’ex-Premier ministre Jean-Marc Ayrault.Pendant une cinquantaine de minutes, il avait en effet défendu une lignegouvernementale dont la réforme scolaire fâchait, la décision de baisse dedotation crispait et la décentralisation laissait encore planer de nombreuxdoutes sur la dilution du rôle des communes et du transfert de certainescompétences. Le tout sur fond de pré-élections municipales et européennes.

Pour cette édition, c’est le nouveau Premier ministre Manuel Valls quise frotte à l’exercice. S’il a dû lui aussi trouver la parade pourexpliquer certaines mesures envisagées dans le cadre de la loi des finances2015 ou la poursuite de la baisse des dotations de l’État, il a néanmoinspris soin de désamorcer certains dossiers en amont. Un exemple : laréforme des rythmes scolaires pour la mise en place de laquelle il a annoncé lapérennisation du fonds de soutien à destination des collectivités il y a un peuplus d’un mois. De leur côté, les collectivités ont vécu une année richeen rebondissements.

Recherche louable de simplification

Dès le début de l’année, c’est la réforme de la fiscalité localequi lançait les hostilités. Au mois de février, l’Association des mairesde France (AMF) demandait « un véritable pacte de responsabilitééquitable avec l’État » et manifestait son intention departiciper activement aux travaux du Comité des finances locales en charged’alimenter le projet de loi des finances 2015. Un texte dont lespremières moutures prévoyaient la suppression de 24 taxes à faible rendement àcourt terme, la réorganisation des compensations d’exonération à moyenterme et la révision de la dotation globale de fonctionnement (DGF) à plus longterme. « La recherche louable de “simplification” nedoit pas s’opérer au détriment des collectivités locales et despolitiques publiques qu’elles conduisent », commentaitl’AMF.

Alors que la contribution des communes à la réduction du déficit del’État devrait avoisiner 840 millions d’euros en 2014, lasuppression de taxes telle qu’elle est envisagée se traduirait par unebaisse de recettes de 475 millions d’euros par an pour le bloc communal.Une équation au sein de laquelle « toute perte de recettesfiscales devra être compensée et intégrée dans le calcul global desdotations », estimait l’AMF.

Adopté en première lecture à l’Assemblée nationale le 18 novembredernier, ce projet de loi ne satisfaisait pas complètement l’Associationdes régions de France (ARF) pour qui « tous les échelons decollectivité ont obtenu des mesures compensatoires et/ou de nouvellesressources fiscales. » Tous… sauf les régions qui sevoyaient par exemple exclues du fonds de soutien à l’investissement localou du nouveau dispositif fiscal sur les entreprises qui doit permettre ledéblocage de 140 millions d’euros dans le cadre du Grand Paris.Aboutissant au même constat, « il y a donc deux poids deuxmesures dans le traitement des collectivités locales »,tranchait l’ARF.

Parmi les principales sources de mécontentement figurait aussil’abrogation du versement transport (VT) interstitiel lors du passage dutexte devant les députés en première lecture. Une nouvelle de mauvaise augurepour l’ARF qui voyait dans l’introduction de cette taxe la premièrepierre d’un édifice plus large visant à « redonner auxrégions des capacités d’action en cohérence avec leurscompétences. » Des capacités chiffrées à 450 millionsd’euros par an pour les régions sur la base d’un VT de 0,55 %.Dans sa configuration idéale, l’association imaginait un VT régional quin’entraînerait pas, comme le VT interstitiel, « desinégalités territoriales injustifiées au détriment de ces territoiresruraux. »

Dotations en berne

Cette année, et pour la troisième année consécutive, la baisse des dotationsde l’État continue d’inquiéter les élus. Fin septembre, le comitéde finances annonçait une diminution de 11 milliards d’euros desdotations aux collectivités locales en trois ans. Une baisse qui risqued’avoir « des conséquences lourdes, notamment sur lescapacités d’investissement », jaugeait l’ARF. Unesituation que les élus craignent de voir perdurer, alors qu’ilspourraient voir leurs compétences et leurs pouvoirs d’action évoluer dansle cadre de la loi de décentralisation, impliquant de facto des moyenssupplémentaires, en particulier en matière de transport. « Uneressource complémentaire dédiée au financement du ferroviaire doit leur êtreattribuée dès la loi de finances pour 2015 », plaidaitl’ARF qui rappelait dans la foulée que « les pistesenvisageables sont un versement transport mixte et une part du bénéfice dessociétés concessionnaires d’autoroute. »

Pour limiter l’effet de la baisse de dotations, l’ARFpréconisait un contrat État-Régions, précisant les contours« d’une grande réforme institutionnelle avec descompétences clarifiées et un État qui se réforme sur le planterritorial ». Lançant, elle aussi, un « crid’alarme » sur les conséquences de la baisse des dotationssur l’emploi et les services de proximité des territoires, l’AMFdemandait que cette diminution s’accompagne d’une réduction« équivalente » des charges et des normes, et dumaintien des recettes locales, en particulier du « produit duversement transport. »

Un pavé dans la mare

Dans son deuxième opus du genre, un rapport de la Cour des comptes publiémi-octobre dernier pointait un doublement des déficits des collectivitéslocales qui aurait atteint, selon ses calculs, 9,2 milliards d’euros en2013 contre 3,7 milliards d’euros l’année précédente, contribuantainsi « pour un tiers au retard pris dans la réduction desdéficits publics », chiffré à 4,3 % du PIB en 2013. Encause : une progression plus rapide des dépenses de fonctionnement que desrecettes. Au sein de son rapport, la Cour des comptes confie également sacrainte de voir la chute des dotations conduire les communes à augmenter letaux des impôts locaux.

Répondant à ces conclusions, l’AMF a immédiatement dénoncé des« amalgames visant à entretenir la confusion quant à laresponsabilité des collectivités locales dans la crise des financespubliques. » Elle a considéré qu’il était« malhonnête de comparer le recours à l’emprunt parl’État et le recours à l’emprunt des collectivitéslocales », martelant que les collectivités locales ne sontautorisées à emprunter que pour financer des investissements publics, alors quel’État emprunte pour faire face à un déséquilibre entre ses charges etses ressources courantes.

Pointant « certaines maladresses d’analyse durapport », l’ARF accusait le « caractèreinégalitaire de l’effort demandé aux collectivités locales par rapport àcelui consenti par l’État ». Dans son viseur : unbudget de l’État qui devrait diminuer de 11,5 milliards d’euros aucours des trois prochaines années, dont 11 milliards d’euroscorrespondent à la diminution de ses dotations. « L’Étatfera donc un effort de 0,5 milliard d’euros, tandis que les collectivitéslocales devront faire 11 milliards d’eurosd’économies », compare l’association.

Rythmes scolaires désamorcés

Tandis que l’an dernier, Vincent Peillon, alors ministre del’Éducation nationale, faisait face aux mécontents de la première rentréeversion nouveaux rythmes scolaires, cette édition a été plus apaisée. Et pourcause, l’actuel Premier ministre Manuel Valls s’est chargé, dès le28 octobre dernier, de désamorcer ce sur quoi il était attendu de piedferme : la pérennisation du fonds d’amorçage pour la mise en placede la réforme des rythmes scolaires pour toutes les communes, au lieu descommunes les plus fragiles comme le prévoyait initialement le projet de loi desfinances 2015. À l’heure actuelle, ce fonds prévoit 50 euros annuels parenfant, auxquels s’ajoutent 40 euros pour les communes en zone rurale ouen zone urbaine sensible et 53 euros de la caisse d’allocationsfamiliales (CAF) si les communes organisent les activités culturelles,artistiques ou sportives. Alors que l’association des petites villes deFrance (APVF) s’est immédiatement« félicitée » de cette décision, l’AMFévalue néanmoins le coût de la réforme entre 150 et 200 euros par élève et paran.

Impasse financière de droit commun

Dans son rapport d’information “L’évolution des financeslocales à l’horizon 2017”, publié le 12 novembre, ladélégation du Sénat à la décentralisation analyse, à partir d’une étudefinancière, l’impact des mesures annoncées sur les différentes catégoriesde collectivité. Son verdict : l’impasse financière deviendra unesituation de droit commun. Si la baisse des dotations actuelles ne semble pasabonder particulièrement dans ce sens, il s’agirait davantage d’uneérosion progressive. « Depuis 2011, les dépenses defonctionnement ont crû de 3 %, alors que celui des recettes était comprisentre 1,5 et 2 %, aboutissant mécaniquement à une diminution del’épargne brute d’environ 5 % par an », décritle rapport.

Articulant leur analyse autour de trois indicateurs, l’équilibrebudgétaire, le taux d’épargne brute, et la capacité de désendettement,les rapporteurs ont constaté que les communes de plus de 10 000 habitantset les départements seront les catégories de collectivité les plus touchées. Eneffet, plus de la moitié, voire les deux tiers de ces collectivités, verra lestrois indicateurs plonger, tandis que « plus de 60 % desbudgets des départements seront en situation de doubledéficit. » Pour éviter d’en arriver là, la commissionpréconise notamment une baisse de 30 % de l’investissement local,couplée à une progression des dépenses de fonctionnement strictement limitée àl’inflation.

La santé financière des collectivités vue par labanque

Il n’y a pas que les élus qui sont inquiets, les banquiersaussi ! Fin octobre en effet, la Banque postale publiait son troisièmerapport consécutif sur la santé financière des collectivités locales. Observantune baisse de 5,6 % de l’excédent des recettes sur les dépenses defonctionnement, la banque estime, comme la Cour des comptes, que les dépensesde fonctionnement restent trop élevées, + 2,9 % cette année après+ 4 % en 2013. De son côté, la baisse de l’investissementdevrait atteindre 7,4 % en 2014, après − 4,8 % en2013.

Si le document assure que le phénomène n’a rien d’inhabituel enpériode d’élections municipales, ses prévisions tablent sur un besoin definancement de 6,1 milliards d’euros cette année, après 9,2 milliardsd’euros en 2013.

En parallèle, le déficit local réel atteindrait 4,3 milliards d’eurosen raison d’une part du financement puisée sur le fonds de roulement descollectivités, signifiant ainsi que les élus ont joué sur leur trésorerie cesdernières années, peut-être en conséquence des difficultés d’accès aucrédit.

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Auteur

  • Diane-Isabelle Lautrédou
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