Tramway L’extension de plusieurs lignes de tramway s’accompagne de la mise en place des terminus partiels au cœur du réseau pour injecter des rames supplémentaires à heure de pointe. Une hausse du trafic qui entraîne une modification du plan de circulation pour les automobilistes.
La pluie fine n’a pas empêché plusieurs centaines de personnes à participer à l’événement. Le 24 janvier, Alain Juppé, président de Bordeaux Métropole, et plusieurs élus locaux ont officiellement inauguré les extensions de lignes de tramway. Cette réalisation s’inscrit dans le cadre de la 3e phase du tramway qui permet aux lignes A et C de franchir la rocade. Sept kilomètres de voies supplémentaires intègrent le réseau, qui comptait déjà 44 km de voies, et 26 km doivent encore être ajoutés au fur et à mesure de la livraison des chantiers.
Sur la ligne A, le terminus ne se situe plus à Mérignac centre, mais 3,6 km plus loin, sur la commune du Haillan. Les voies ont été réalisées en site propre à double circulation, la dernière station étant équipée d’une voie unique. Le système d’alimentation électrique au sol d’Alstom, APS, équipe les 535 premiers mètres situés en centre-ville. Cinq nouveaux arrêts ont été aménagés, qui desservent notamment la grande salle de spectacle Le Pin Galant et le nouveau quartier résidentiel Les Pins. Cette extension s’accompagne de la création de deux parcs relais. Ils proposent chacun 220 places de stationnement avec un local vélos et s’adressent en particulier aux usagers de la rocade et aux habitants des communes avoisinantes.
Trois nouvelles stations VCub, d’une capacité de 20 vélos chacune, ont été mises en service le long du nouveau tracé. Et les cyclistes profitent désormais d’une piste en parallèle de la voie du tramway. Le franchissement de la rocade a nécessité la construction d’un pont de 70 m de long. Les travaux auront duré deux ans, entre août 2012 et juin 2014. La déclaration d’utilité publique était intervenue en décembre 2010. Ce sont 13 600 nouveaux passagers qui sont attendus chaque jour sur cette extension dont le coût s’élève à 96 M€.
La ligne C du tramway profite pour sa part de 3,4 km supplémentaires. Quelques kilomètres attendus depuis des années par le parc des expositions et la zone hôtelière avoisinante… Le nouveau terminus se situe désormais au pied du futur grand stade dont l’inauguration est prévue pour le 23 mai. Pour transporter 9 500 nouveaux passagers, 90 M€ ont été investis. Trois nouvelles stations ont été réalisées en plus de l’arrêt Berges du Lac inauguré il y a un an. Ici aussi, un ouvrage de franchissement de la rocade a été édifié. Deux stations VCub ont été installées et un local vélos d’une cinquantaine de places, accessible via une carte TBC (tram et bus de la Cub) sera opérationnel début mars. Par ailleurs, 200 arceaux vélos d’une capacité de 400 places seront proposés près du nouveau stade. Le chantier, qui s’est étalé de mi-2012 à mi-2014, a également été l’occasion de réaliser des aménagements cyclables.
Au-delà du terminus de ligne C, un centre de maintenance a été créé pour un coût de 31,3 M€. « Il permettra d’assurer le remisage, le nettoyage, l’entretien et la réparation de 26 rames », précise Bordeaux Métropole. Ce nouveau dépôt est constitué d’un hall de maintenance, d’un bâtiment d’exploitation et d’un centre dédié aux opérations d’entretien et de lavage des rames.
L’extension du réseau bordelais se poursuivra dans les prochaines semaines et les prochains mois. Le prolongement de la ligne C, au sud de l’agglomération vers Bègles, sera inauguré le 6 mars. Les essais démarrent sur l’extension de la ligne B jusqu’à Pessac Alouette, soit 3,5 km. Les livraisons de la ligne D et du tram-train du Médoc demeurent plus compliquées (voir encadré). Au total, 33 km de nouvelles voies sont programmés, pour 1 050 M€, mais « avec une baisse de 25 % du coût au kilomètre » par rapport aux phases précédentes, précise Bordeaux Métropole. Une diminution du coût rendue possible par « l’aménagement de voies uniques quand c’est possible, un plus grand espacement des stations et un choix adapté de matériaux et mobilier. »
L’ouverture des premières extensions de lignes de tramway s’accompagne de la mise en service, échelonnée dans le temps, de six terminus partiels. Chaque ligne en compte deux, situés de part et d’autre de la zone où la fréquentation est la plus importante. Une 3e voie a été aménagée au niveau de chaque terminus partiel pour que le tram puisse facilement rebrousser chemin. Le but recherché est d’augmenter le cadencement dans le centre-ville. « Nous voulons proposer un tramway toutes les 3 minutes 30 à l’heure de pointe sur le cœur du réseau, contre 4 minutes 30 précédemment », déclare Christophe Duprat, vice-président de Bordeaux Métropole en charge des transports et du stationnement. « Cela doit permettre d’absorber l’afflux de voyageurs en centre-ville aux heures où la fréquentation est particulièrement importante et d’éviter la saturation des rames. » Selon les lignes, la mise en place des terminus partiels va permettre d’injecter entre trois et six rames supplémentaires à l’heure.
Le service sera assuré du 1er septembre au 15 mai, hors week-end, jours fériés et vacances scolaires, le matin de 6 h 30 à 9 heures et l’après-midi de 15 h 30 à 19 heures La mise en place des services partiels implique la mobilisation de moyens importants: 84 rames à l’issue des extensions des lignes A, B et C, contre 66 aujourd’hui. Les travaux ont coûté 15 M€. Et Keolis Bordeaux a d’ores et déjà embauché 15 conducteurs, 10 opérateurs au PC tram et une dizaine de régulateurs sur le terrain.
Les premiers essais ont donné quelques sueurs froides à TBC. Les équipements installés par le maître d’œuvre Tysia ont rencontré des difficultés pour dialoguer avec les systèmes de signalisation routière et du tramway. « Le problème technique a été identifié et les premiers réglages ne sont pas encore concluants », déclare Hervé Lefèvre, directeur général de Keolis Bordeaux. « Nous avons 450 conducteurs à former et nous démarrerons les essais dynamiques début mars pour la ligne A, courant mars pour la ligne C et en avril pour la ligne B. »
Bordeaux Métropole a assigné un objectif de 97 % de régularité au délégataire. Par an, ce sont 250 000 km supplémentaires qui seront parcourus par le tramway avec la mise en place des terminus partiels.
Bien évidemment, l’augmentation des fréquences de passage des tramways ne sera pas sans conséquence sur le trafic routier. Pour éviter des embouteillages monstres à heure de pointe dans certains quartiers, le plan de circulation de Bordeaux centre a été modifié. Quatre carrefours bien connus des automobilistes bordelais subissent ces nouveautés: Palais de justice, porte de Bourgogne, Quinconces et place Pey-Berland. Il s’agit, la plupart du temps, d’empêcher un “tourne à gauche” qui croise une ligne de tramway. L’objectif est de gagner des temps de feux au vert, quitte à provoquer des détours pour certains automobilistes. Christophe Duprat assume: « C’est le sens de l’histoire: privilégier les modes alternatifs à la voiture. Les 126 millions d’usagers de TBC [dont 70 millions pour le tramway, ndlr] seront très contents de l’augmentation des fréquences, même si cela va provoquer des désagréments pour quelques automobilistes ou commerçants. »
La Mairie de Bordeaux a essayé de prévenir le plus de monde possible du nouveau plan de circulation. « Nous avons distribué des plans aux automobilistes et mis en place un nouveau jalonnement », explique Jean-Louis David, adjoint au maire de Bordeaux en charge de la vie urbaine. « Et pour fluidifier au mieux la circulation, nous avons modifié le séquençage des feux et collaboré avec les opérateurs GPS et la police municipale. » Comme les élus l’avaient anticipé, les premiers jours de la mise en place du nouveau plan de circulation ont occasionné une certaine pagaille sur la route. Mais aucune situation particulièrement alarmante n’a été signalée. Alain Juppé a donné trois mois à ses équipes pour tirer un bilan des modifications de circulation.
Depuis le 24 janvier, Bordeaux-Lac est desservi par le tramway. Un secteur où de nombreuses entreprises sont présentes, à une distance plus ou moins lointaine du nouveau terminus.
Le concept Stop & Drive a donc été mis en place pour permettre aux salariés de terminer leur trajet après être descendus du tramway.
Ce système solidaire permet aux porteurs du brassard Stop & Drive d’être transportés sur le dernier kilomètre par les automobilistes porteurs du macaron Stop & Drive, explique le Club des entreprises de Bordeaux à l’initiative du service.
En pratique, les piétons équipés d’un brassard aux couleurs de leur entreprise se postent à un arrêt de bus TBC porteur du logo sur la ligne 25. Ils y attendent en sécurité le passage d’un covoitureur Stop & Drive. Des arrêtés municipaux ont été pris pour autoriser les voitures particulières à s’arrêter pour faire monter des utilisateurs du concept. Une idée à mettre à l’actif des entreprises partenaires du PDE (plan de déplacements d’entreprise) de Bordeaux-Lac, lancé en 2012 par le Club des entreprises de Bordeaux.
Si les extensions des lignes A, B et C ont été réalisées selon le calendrier prévu, les mises en service de la ligne D et du tram-train du Médoc semblent bien plus compliquées. Le tribunal administratif de Bordeaux, à travers deux décisions rendues le 23 octobre 2014, a annulé les arrêtés préfectoraux déclarant d’utilité publique les deux projets. Une décision dont Alain Juppé a pris acte, tout en s’interrogeant: « On nous reproche un retour sur investissement insuffisant. Cela consiste à donner à la justice administrative la capacité de juger de la pertinence du choix des élus. » Bordeaux Métropole a donc décidé de faire appel et de relancer la procédure d’enquête publique. Les travaux de déviation des réseaux seront menés à leur terme, mais aucun autre chantier ne sera ensuite ouvert. Le délai de mise en œuvre de la nouvelle procédure devrait être de deux ans.
