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Les Bretons et la révolution dans les transports

Projection Uber, BlaBlaCar, numérique, mobilité intelligente, transition énergétique et véhicules autonomes: le débat des autocaristes bretons.

Bretagne, le 29 avril. De Rennes et de Nantes partent les premiers autocars à 10 € vers la capitale: c’est la suite, après Lyon-Bordeaux, Lyon-Turin et Lyon-Barcelone, des liaisons Starshipper du groupe Réunir. À Pleumeur-Bodou, dans les Côtes-d’Armor, soixante autocaristes planchent sur « les défis du numérique et de la transition énergétique », programme de la journée d’étude de la FNTV (Fédération nationale des transports de voyageurs) Ille-et-Vilaine.

Ce mercredi-là, l’heure est aux sueurs froides pour le monde de l’autocar de l’Ouest. « On assiste à une accélération, très dure à suivre. Tous les trois ans, se produit une innovation majeure! », lance Stéphane Schultz, le conférencier spécialiste de la révolution des usages par le numérique, un ancien du transport, ex-directeur d’Illenoo, les transports départementaux d’Ille-et-Vilaine. BlaBlaCar est dans toutes les têtes. « Il faut les structurer ces gens-là. Qu’ils soient placés au même niveau de taxation ou d’assurance que les autres. Ils ont une activité commerciale! L’État n’a pas encore réussi à les obliger à respecter les lois. Il va bien falloir légiférer là-dessus! », explique Michel Bellier, président de la FNTV du département et de l’entreprise les Transports Bellier.

D’autres rappellent qu’Uber fait monter des passagers à l’avant. Dans les autocars, il n’y a plus que les guides qui sont autorisés à s’asseoir là, plus les clients. Au fil des exposés des uns et des autres, trois mondes se détachent, et s’affrontent parfois: celui de l’utilisateur de smartphone, celui de l’usager de services publics et celui de l’industriel du transport.

Tout ce qui bouge devient transport

Stéphane Schultz émaille son discours d’images, car les ressorts et les effets du numérique ne se comprennent pas d’un seul clic. « Le futur devait emprunter des voitures volantes. Il arrive en 140 caractères sur un smartphone! Car la principale innovation dans le domaine de la mobilité, c’est le smartphone. » En mettant en scène les grands sites internet à travers lesquels les particuliers communiquent (les plateformes) pour échanger de la musique, des chambres, des maisons le temps d’une vacance ou des places dans une voiture, Stéphane Schultz fait comprendre la « formidable mutation des usages » qui est en train de se dérouler. « Depuis son smartphone, l’utilisateur peut demander à tout le monde un service. Celui qui peut le lui apporter va le faire. Tout ce qui bouge devient une source de transport. La notion de transport public évolue. Uber met à disposition ses voitures. Avec Uberpop, il propose à tout un chacun de le faire. Uber existe dans 200 villes dans le monde. En Espagne, à New York, sa plateforme sert à se faire livrer à manger. »

La satisfaction du client est en jeu

À travers l’histoire des pionniers de la révolution Internet dans le monde du transport, Covoiturage.fr, BlaBlaCar, Ubeeqo (pour partager sa voiture, racheté par Europcar), Zenpark (pour louer son espace de parking), Tom-tom, Ways, Mobileve, Stéphane Schultz décrit la mécanique à l’œuvre: « Dès que vous tournez la clé de votre voiture, un service optimise votre trajet, un autre optimisera votre coût et même le temps que vous passerez dans votre voiture. Tout cela va se produire aussi dans l’autocar. »

L’origine de cette nouvelle concurrence est le service apporté au client. L’innovateur numérique part toujours d’un problème pour le client: la disponibilité, l’information voyageur, le coût. Il y répond en mobilisant ici les places disponibles dans une voiture particulière, là le temps où elle ne roule pas, là encore la place de parking qu’elle n’utilise pas. « Le plus extraordinaire, c’est de constater que ces informaticiens, ces spécialistes en plateformes internet, qui ne font que mettre en relation des personnes entre elles, sont considérés à présent comme apportant un meilleur service que les professionnels. Cela oblige à repenser à satisfaire ses clients. L’acteur du numérique profite toujours d’une faille. Il ne pourra pas s’y immiscer s’il n’y en a pas! » De ce point de vue, le conférencier se fait rassurant, car « comment comparer, pour effectuer un voyage, le partage de la voiture de quelqu’un avec le transport dans les conditions de confort d’un autocar? »

La route communicante

Et si la question du coût et des tarifs se pose, l’industrie numérique a sa méthode. Elle teste. D’abord à petite échelle. Dès qu’un succès apparaît, elle lève des fonds pour aller plus loin et chercher à devenir un leader mondial dans ce service en particulier. Stéphane Schultz retient la leçon: « Pourquoi vous posez-vous encore les questions de tarifs? Testez-vous aussi! ». Sous-entendu, y compris à des tarifs plus élevés.

Cette logique de marché est parfaitement contredite par Guy Le Coz, spécialiste de la route communicante (ou mobilité intelligente), celle qui mobilise les big data et les données sur les voyageurs accumulées par les opérateurs pour inventer les services de transport dont l’époque a besoin. « Au-delà du numérique, les pouvoirs publics et les entreprises ont à créer une filière française du transport d’excellence, répondant aux objectifs sociétaux de la mobilité, économiques de l’emploi, et environnementaux. » Un projet national est bientôt lancé. Un congrès mondial se tient à Bordeaux en octobre.

Véhicules propres et sans conducteurs

À côté de cela, Philippe Grand, président du pôle de compétitivité Transports & Mobility Systems à Lyon qui réunit tous les grands acteurs du transport, fait état d’autres avancées.

En 10 ans, 94 projets d’innovations dans le transport ont été financés pour 345 millions d’euros, dont 125 de subventions publiques. La transition énergétique y occupe une grande place. « Alors que le passage d’Euro I à Euro IV a réduit la pollution de 98 %, il faudra encore aller plus loin. L’Europe va nous y obliger. Par ailleurs, l’électromobilité est à nos portes. Elle est compliquée, mais à notre portée pour les bus, et beaucoup plus improbable pour l’autocar parce qu’il faudrait des lieux de recharge trop disséminés. Là, nous croyons beaucoup plus au gaz naturel, mais il faut installer des équipements. Pour cela, il faudrait que l’Europe et la France définissent leur politique énergétique à partir de laquelle des filières pourraient émerger », explique-t-il.

Les autocaristes continueront donc de voir leurs véhicules évoluer. « Sans oublier tout ce qui arrive du côté des véhicules autonomes (sans conducteurs): 100 000 en 2020, 75 % du parc en 2035 estime-t-on », ajoute Philippe Plantard, secrétaire général de la FNTV Bretagne. Trop loin pour que les autocaristes bretons s’en inquiètent autant que de BlaBlaCar…

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Auteur

  • Hubert Heulot
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