Dans tous les domaines, il est aujourd’hui d’usage de comparer la France à l’Allemagne. La pertinence de cette habitude se pose cependant dans le domaine du rail.
Dans le secteur ferroviaire, les différences de géographie, d’état technique du réseau, d’offre régionale (cadencement à l’heure sur tout le réseau allemand avec une offre double de celle des TER) et la présence de nombreux réseaux d’agglomération de type RER empêchent une comparaison totalement pertinente entre la France et sa voisine germanique. En tout état de cause, grâce à la concurrence selon ses partisans, en Allemagne, le coût du km.train régional est inférieur de 30 % à celui des TER français(1).
Les opérateurs ferroviaires indépendants se préparent à proposer leurs services aux régions sur fond de mécontentement réel de nombre d’entre elles envers la SNCF. À la différence des associations d’usagers des transports(2), l’ARF (Association des régions de France) reste prudente, même si le Manifeste des régions pour le renouveau du transport ferroviaire, adopté en mars 2014, s’affirmait en faveur de « la liberté de choix du mode de contractualisation par les régions », en s’appuyant sur le règlement européen OSP (obligations de service public) adopté en 2007.
Rappelons que celui-ci permet aux régions « de choisir librement leur mode d’attribution de contrat, en attribution directe, en régie ou à travers une délégation de service public ». Aussi, lors du débat sur la réforme ferroviaire, l’ARF préconisait-elle, pour s’inscrire dans la logique du règlement OSP, une « révision des dispositions du code des transports » en ce sens, « pour laisser les régions libres de choisir le mode de contractualisation le plus adapté ». Elle estimait que cette position permettrait, dans le cadre des négociations sur le 4e paquet ferroviaire (qui préconise l’ouverture des trains régionaux à la concurrence), de ne pas se voir imposer « les appels d’offres pour l’attribution des contrats de service public dès 2019 »! Autrement dit: « la concurrence doit être possible mais non obligatoire, et ne pas être une fin en soi », et « la France doit préparer dès aujourd’hui les conditions qui permettent la mise en œuvre de ces dispositions », explique un responsable de l’ARF. D’ailleurs, « sur ce sujet essentiel, la réforme ferroviaire a lancé la négociation d’une convention collective du ferroviaire pour permettre qu’une mise en concurrence se fasse sur des questions d’innovation et de service et non au détriment des personnels », ajoute-t-il.
Position d’attente amplifiée en période électorale? Immobilisme mêlé d’inquiétude? Poids du lobby SNCF? La complexité du sujet ne permet pas de réponses simples. Difficile aussi de juger des positions adoptées par les opérateurs indépendants. Ainsi, après avoir clairement exprimé ses regrets en juillet dernier par rapport à la non prise en compte de l’expérimentation à l’ouverture dans la feuille de route gouvernementale sur les TET, le groupe Transdev s’en tient au rappel de ses positions et de sa volonté de proposer « une offre sur mesure et inventive », en s’appuyant sur son expérience en France et à l’international.
Transdev rappelle, comme en janvier 2014 lors d’un échec à Boston face à Keolis, que si 96 % de son chiffre d’affaires est soumis à concurrence, ce n’est pas le cas du groupe SNCF, à 60 % protégé par un monopole. D’autre part, « le manque de transparence financière [de ces] activités en monopole, particulièrement celles des TER, est régulièrement pointé du doigt par les conseils régionaux ».
Les compétences d’un land allemand, quelles que soient ses dimensions et sa population, sont bien plus importantes que celles d’une région française, même élargie.
La Fnaut (Fédération nationale des associations d’usagers des transports) préconise l’ouverture des TER à la concurrence, sur fond de politique ferroviaire fortement volontariste des régions et de l’État.
« La concurrence doit être possible mais non obligatoire, et ne pas être une fin en soi. La France doit préparer dès aujourd’hui les conditions qui permettent la mise en œuvre de ces dispositions. »
