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Autorité organisatrice métropolitaine

Le territoire prend de la hauteur

Début 2016, la France comptera officiellement 14 métropoles dotées de compétences étendues. Leur arrivée risque de faire bouger les lignes de la profession à moyen terme.

Nouvelles collectivités territoriales ou communautés urbaines remasterisées? Au 1er janvier 2016, la France comptera officiellement 14 métropoles: Lyon, Aix-Marseille, Rennes, Nantes, Montpellier, Grenoble, Lille, Bordeaux, Paris, Rouen, Nice, Strasbourg, Toulouse et Brest. Si Lyon a été la première ville à expérimenter ce statut, qui existe au niveau local depuis 45 ans, elle est ainsi passée symboliquement du Grand Lyon à Lyon Métropole il y a bientôt un an, endossant dans la foulée des compétences jusque-là exercées par le département (comme la mobilité et la voirie) et des communes. Un panel auquel s’ajoute ponctuellement la gouvernance des gares par délégation de l’État ou de la région.

Loin d’être un modèle dupliqué 14 fois, chaque métropole dispose de ses propres compétences et d’un champ d’intervention propre. Un point commun néanmoins: un cadre juridique qui s’inspire directement de la loi de réforme des collectivités locales du 16 décembre 2010 et de la loi du 27 janvier 2014 sur la modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (Maptam). Si la première propose une définition de la nouvelle entité, la seconde lui attribue de nouvelles compétences. Dans les deux cas, la volonté du législateur a été d’intégrer les métropoles dans une mécanique de réduction des dépenses publiques. Sur le terrain, les opérateurs et les exploitants doivent combiner avec ce nouvel interlocuteur et anticiper les contrats à venir.

Retour d’expérience

Alors que les 12 premières métropoles ont officiellement basculé en janvier 2015, les deux dernières, à savoir Paris et Aix-Marseille-Provence, passeront le cap dans 2 mois. « Douze mois ont été nécessaires pour définir les contours administratifs, juridiques et financiers de ce transfert de compétences. Ont suivi l’adhésion puis la dissolution de l’autorité organisatrice des transports (AOT) du département du Rhône, et la création d’un nouveau collège d’élus adapté au périmètre d’action élargi », indique le Syndicat mixte des transports pour le Rhône et l’agglomération Lyonnaise (Sytral).

Un processus de fusion imperceptible aux yeux du grand public et de bon nombre d’opérateurs: « Notre agglomération compte toujours 43 communes et les transports publics font toujours l’objet d’une délégation de service public (DSP) jusqu’en 2017 », confie-t-on à Rennes Métropole. Même constat à Nantes Métropole qui regroupe 24 communes, « Nous étions une communauté urbaine depuis 2001, notre nouveau cadre juridique ne change rien en termes de gouvernance et d’organisation des transports. Si nous mutualisons désormais certains services avec la ville de Nantes, cela ne concerne pas le transport sur lequel nous avons historiquement la main. »

Plus de cohérence

Concrètement, une métropole est un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), réunissant plusieurs communes au sein d’un espace de solidarité, pour élaborer et conduire un projet d’aménagement et de développement économique, écologique, éducatif, culturel et social commun. Constitué sur la base du volontariat, le statut de métropole est accessible aux ensembles de plus de 400 000 habitants dans une aire urbaine de plus de 650 000 habitants. À sa création, la métropole se substitue de plein droit à toutes les intercommunalités existantes. Développement et aménagement, économie locale, actions sociales et culturelles, organisation des transports publics, aménagement et entretien de la voirie, abris de voyageurs, parcs de stationnement ou plan de déplacements urbains, politique locale de l’habitat, politique de la ville, etc., le champ d’intervention des métropoles couvre un large spectre du service public.

En amont, l’État a souhaité leur attribuer un rôle stratégique cohérent au sein d’un nouvel échiquier territorial. En clair, « l’évolution du cadre législatif reflète ce qui se passe sur le terrain. Ces dernières années, la surface des périmètres de transport urbain a doublé. Jusqu’à présent, la compétence transport relevait de plusieurs niveaux. Dorénavant, elle implique la région pour les transports régionaux ferroviaires, interurbains et scolaires, et le schéma d’intermodalité et de la métropole ou de la communauté de communes pour la mobilité dans son ensemble, y compris les modes actifs », résume Claude Faucher, secrétaire général de l’Union des transports publics et ferroviaires (UTP).

Un vase communiquant

En 2010, lorsque le gouvernement évoquait la création du nouvel échelon local, bon nombre d’observateurs craignaient qu’une strate de gouvernance ne s’ajoute à un millefeuille territorial déjà complexe. Pour autant, au niveau des transports, « la tendance est à une recherche de cohérence au niveau des territoires métropolitains entre les transports urbains, interurbains et scolaires, et à une montée en puissance d’une politique globale de mobilité », observe Claude Faucher. En parallèle, elles sont aussi susceptibles de se voir attribuer certaines délégations des régions et des départements, régions qui « se sont vues transférer des compétences auparavant détenues par les départements », remarque Claude Faucher.

En dépit d’une lisibilité parfois floue, la répartition des rôles se fait relativement naturellement sur le terrain: « les régions sont ainsi amenées à articuler leurs compétences avec celles des métropoles via le schéma régional d’intermodalité ».

Dernier cas de figure: les métropoles frontalières qui peuvent adhérer à des structures de coopération transfrontalière. Un exemple: la métropole de Lille pourra ainsi voir son statut de métropole européenne renforcé au-delà de ses frontières nationales. Là aussi, certaines communautés d’agglomérations n’ont pas attendu l’intronisation du statut de métropole pour se lancer. Ainsi, Strasbourg a commencé les premières études de son projet d’extension de sa ligne D du tramway vers Kehl, en Allemagne, en 2008. Au final, l’entrée en service de ce prolongement de 3,9 kilomètres est prévue en 2017.

Le calme avant les DSP

Si pour le moment, certaines métropoles ne parviennent pas à mesurer de changement majeur dans la gestion des déplacements, c’est en partie parce qu’elles n’ont pas encore eu l’occasion de remettre en jeu leurs contrats de transport. Dans la majorité des cas, les délégations ont été signées depuis 2 voire 3 ans, dans un contexte financier marqué par un désengagement de l’État les conduisant à trancher selon une double problématique. « Les AO sont soumises à une forte pression, avec d’un côté la nécessité de réaliser des économies suite à la baisse des dotations de l’État, et de l’autre, l’enjeu de répondre à une demande accrue de mobilité de la part des habitants », analyse Claude Faucher.

Au moment de remettre les contrats sur la table, certaines métropoles pourraient bien tirer profit de cette nouvelle organisation. Ainsi, la métropole d’Aix-Marseille-Provence, qui totalisera six établissements publics de coopération intercommunale au 1er janvier, disposera d’un statut particulier permettant la gestion des compétences de proximité par des conseils de territoire. Outre la répartition des règles de gouvernance, l’amendement gouvernemental donne notamment la possibilité à ces conseils d’adopter un pacte fiscal qui permettra aux élus métropolitains de déterminer des garanties financières pluriannuelles jugées nécessaires au fonctionnement de la métropole, de ses territoires et de ses communes.

Un avenir imprécis

Quand à savoir comment se présenteront les nouveaux contrats, plusieurs hypothèses sont évoquées. « Nous pouvons imaginer que la métropolisation impacte temporairement le volume ou la segmentation de commandes publiques, mais qu’à l’inverse, les attentes très fortes des citoyens conduisent les AO à un renforcement des crédits attribués à la mobilité », explique Claude Faucher. Quelle que soit l’hypothèse, les entreprises pourraient voir leur cœur de métier prendre de nouvelles orientations. « Au cours des 7 à 8 prochaines années, au fur et à mesure des renouvellements de DSP, les exploitants pourront devenir des opérateurs de mobilité globale et proposer dans leur palette d’offres d’autres services: location de vélo ou de voiture en libre-service, gestion du stationnement, etc., des prestations qu’ils savent déjà faire. »

Autant d’opportunités dont les enjeux sont déjà bien compris des grands groupes de transport. Keolis semble avoir anticipé l’émergence de l’activité stationnement dans les politiques transport de ses clients, en absorbant, en 2010, le gestionnaire de parking Effia. Au mois de septembre, Transdev a annoncé avoir constitué une équipe de 300 experts digitaux et vouloir consacrer un investissement de 70 M€ pour ce poste sur 3 ans. La RATP a choisi de mettre un coup d’accélérateur sur la mobilité durable via des infrastructures écoconçues ou des matériels économes en énergie, prévoyant une montée en puissance de l’aspect environnemental dans les appels d’offres.

Au final, avec la concentration de la gouvernance à l’échelle métropolitaine, c’est pour les petites et moyennes entreprises du secteur que les lignes risquent de bouger sensiblement. « Au niveau des entreprises de transport interurbain, s’il y a concentration, ce sera par le biais de rachats de sociétés familiales », note Claude Faucher.

Claude Faucher, secrétaire général de l’Union des transports publics et ferroviaires (UTP)

« Au niveau des entreprises de transport interurbain, s’il y a concentration, ce sera par le biais de rachats de sociétés familiales. »

Dernière ligne droite

Créée le 1er janvier 2016, la métropole du Grand Paris se substituera aux 19 intercommunalités existantes et réunira 132 communes. Pour l’heure, des zones d’ombre planent encore sur le volet financier. Le versant transport a fait l’objet d’une loi spécifique en 2010, marquée par la création du métro Grand Paris Express. Dans 2 mois, la métropole d’Aix-Marseille-Provence regroupera quant à elle 92 communes. Elle se substituera à la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, la communauté d’agglomération du Pays d’Aix-en-Provence, la communauté d’agglomération Salon Étang-de-Berre Durance, la communauté d’agglomération du Pays d’Aubagne et de l’Étoile. Elle sera dotée d’un surcroît de dotations de 50 M€.

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Auteur

  • Diane-Isabelle Lautrédou
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