Derniers scrutins avant les présidentielles, les élections régionales ont été riches en rebondissements: fin de campagne endeuillée par les attaques terroristes du 13 novembre à Paris, montée du vote frontiste aux portes des régions et basculement en faveur de la droite en guise de dénouement. Retour sur deux tours inédits.
Les élections régionales, qui se sont déroulées les 6 et 13 décembre, étaient les premières d’une France d’ici peu à 13 régions. Des régions qui, avec la loi de la nouvelle organisation territoriale de la République (loi NOTRe), montent en compétences en matière de transport.
En effet, elles se voient transférer les transports interurbains, les transports scolaires et le transport à la demande non urbain, en plus de la gestion des services ferroviaires régionaux qu’elles avaient déjà dans leur giron. L’enjeu était donc hautement stratégique, puisque les régions accédaient au statut d’autorités organisatrices de la mobilité.
Sujet de proximité par excellence à chaque élection, les transports occupaient une place de choix dans le programme de bon nombre de candidats.
En Ile-de-France, Valérie Pécresse (Les Républicains, LR) promettait 700 trains neufs supplémentaires en 5 ans, et 1 000 bus de plus en grande couronne au plus tard en 2021.
Dans le Nord–Pas-de-Calais–Picardie, Xavier Bertrand (LR) s’engageait à renforcer la sécurité dans les trains express régionaux (TER). Il œuvre pour le maintien des lignes de train d’équilibre du territoire (TET) Paris–Creil-Compiègne–Saint-Quentin–Maubeuge–Cambrai et Paris–Creil–Amiens–Boulogne, remises en cause dans le rapport de la commission TET l’été dernier.
En Bretagne, Jean-Yves Le Drian (Parti socialiste, PS) projetait d’utiliser les nouvelles compétences de transport scolaire et maritime pour offrir plus de solutions de déplacement, en les coordonnant avec les offres existantes.
Remettant son mandat en jeu en Aquitaine–Limousin–Poitou-Charentes, Alain Rousset (PS) avait choisi le rail comme thème fort, affichant sa volonté de voir relier Limoges à Bordeaux en 2 heures, contre environ 2h45-3 heures actuellement, ainsi que la gratuité des transports scolaires (voir encadré).
En Bourgogne–Franche-Comté, la candidate PS Marie-Guite Dufay faisait campagne sur la modernisation des trains et des gares, et sur le lancement d’un passe régional des transports.
Mais à trois semaines du premier scrutin, les attentats terroristes du 13 novembre à Paris ont mobilisé l’attention des citoyens, reléguant les enjeux électoraux au second plan.
Au lendemain du premier tour, le Front national (FN) recueillait 27,73 % des suffrages, soit plus de 6 millions d’électeurs au sein de 46 départements et 6 régions, contre 4 pour Les Républicains et 3 pour le Parti socialiste.
Côté score, le FN oscillait entre 18 %, notamment en Ile-de-France et en Bretagne, et 40 % dans le Nord–Pas-de-Calais–Picardie. Les deux partis habituellement en confrontation se sont rejeté mutuellement la responsabilité des scores FN, qualifiés d’historiques par bon nombre d’observateurs. Pour maximiser ses chances dans les régions potentiellement reportables, le PS décide, une demi-heure après l’annonce des premiers résultats, de retirer ses listes en Nord–Pas-de-Calais–Picardie, Provence–Alpes–Côte d’Azur (PACA) et Alsace–Champagne-Ardenne–Lorraine, régions où il estimait sa défaite courue d’avance. Un mot d’ordre que Jean-Pierre Massenet, candidat PS en Alsace–Champagne-Ardenne–Lorraine, décidait de ne pas suivre, estimant que « la stratégie d’évitement est un échec ». Il a donc maintenu sa candidature, sous l’étiquette divers gauche (DVG).
Côté LR, la consigne donnée par Nicolas Sarkozy, président du parti, se résumait à une formule: « ni retrait, ni fusion ».
Au soir du second tour, les premiers résultats ne faisaient aucun doute: le FN ne décrochait finalement aucune région. En revanche, les couleurs de la carte politique avaient quelques nuances de bleu supplémentaires, tandis que le PS perdait son emprise locale historique, en particulier en Ile-de-France, bastion qu’il détenait depuis 1998.
Nombre d’électeurs 43,96 millions
Nombre de listes 38
Nombre de candidats 5 472
PREMIER TOUR
Nombre d’inscrits 45,29 millions
Participation 49,91 % des inscrits
Abstention 50,09 % des inscrits
SECOND TOUR
Nombre d’inscrits 43,95 millions
Participation 58,53 % des inscrits
Abstention 41,47 % des inscrits
La région Aquitaine–Poitou-Charentes–Limousin pourrait ne plus participer au financement de nouvelles LGV. Pour parvenir à un accord de fusion avec EELV, Alain Rousset, candidat PS dans cette région, a annoncé que s’il était élu, le conseil régional ne participerait plus au financement des lignes à grande vitesse. Exit donc le barreau LGV Limoges-Poitiers et les projets de LGV au sud de Bordeaux. Il a ainsi déclaré que la région n’avait pas vocation à financer les lignes à grande vitesse, estimant que l’État doit réinventer un système de financement sur les infrastructures, et que les efforts sont à fournir en priorité sur les transports du quotidien afin de mettre Limoges à 2 heures de Bordeaux.
Ce revirement survient alors que la ville de Limoges et le conseil régional du Limousin ont voté plusieurs millions de crédits pour les études sur ce projet.
Son adversaire, Virginie Calmels, candidate (LR), soutenait le barreau Limoges-Poitiers, mais pas les deux autres projets au sud de Bordeaux.
Olivier Jacquinot
