Au point de vue de la géographie ferroviaire et de la géographie tout court, la fusion Auvergne et Rhône-Alpes semble finalement aller de soi, tant les deux réseaux, comme les deux régions, peuvent apparaître complémentaires. Cependant, il faudra redéfinir les orientations des transports, ce qui devrait se traduire par une coordination, voire par une vraie remise à plat des objectifs des CPER 2016-2020 qui avaient été conclus séparément avant la fusion.
La fusion-reconfiguration des réseaux ferrés d’Auvergne et de Rhône-Alpes peut s’appuyer sur une structure spécifique et paradoxale. Elle est la fois multipolaire et en grande partie centralisée, à l’image de la nouvelle région et son réseau de villes.
En effet, au-delà du poids majeur de la métropole lyonnaise, la nébuleuse urbaine régionale se compose de trois agglomérations de taille importante: Clermont-Ferrand, Grenoble et Saint-Étienne. Elles sont relayées sur l’ensemble du territoire par un réseau très dense de villes moyennes, de 20 000 à 60 000 habitants, et qui se trouvent à la tête d’aires urbaines souvent étendues, et parfois plus peuplées que leur métropole. Annecy, Annemasse, Aurillac, Bourg-en-Bresse, Chambéry, Moulins, Montluçon, Le Puy, Valence et Vienne, autant de villes reliées par un réseau ferré bien maillé, avec des villes-pôles qui jouent aussi un rôle ferroviaire spécifique, en organisant autour d’elles des lignes TER périurbaines.
C’est le cas de Grenoble, avec les lignes vers Voiron au nord, Gières et Domène à l’est, et Jarrie–Vizille au sud; Saint-Étienne, avec la ligne de Firminy, une partie de celle de Roanne, plus la section Saint-Étienne–Saint-Chamond de l’axe très chargé vers Lyon, alors que l’ensemble Firminy–Saint-Étienne–Lyon préfigure une sorte de RER-TER. On trouve cette situation à un degré encore plus accentué avec la croisée des lignes autour de Clermont-Ferrand. Elles se dirigent vers Issoire, Vichy, Volvic et Thiers et concentraient en 2015, sur seulement 13 % de la longueur du réseau, plus de la moitié de l’offre et des trafics des TER Auvergne.
Aussi marquée qu’elle puisse être, l’existence de cette nébuleuse urbaine et ferroviaire ne peut finalement atténuer qu’en partie une centralisation ferroviaire lyonnaise qui s’avère particulièrement marquée. Centralisation en rapport avec l’extrême importance nationale du nœud lyonnais, puisqu’avec celui de Lille et du Nord–Pas-de-Calais, c’est le second du réseau ferré français en importance après celui de l’Île-de-France.
Le complexe ferroviaire de Lyon joue aussi un rôle stratégique dans l’organisation du trafic régional, car il est situé au centre d’une étoile à huit branches, auxquelles il faut ajouter les trois branches indépendantes des lignes de l’ouest lyonnais, centrées sur la gare Saint-Paul et exploitées par des trams-trains. La ligne de Saint-Étienne, la plus chargée du réseau côté trafic des TER avec ses 95 trains et ses 20 000 voyageurs par jour, s’embranche à Givors au sud de l’ensemble, les deux itinéraires Lyon–Givors s’en trouvent donc d’autant plus chargés. Ce nœud lyonnais, dans lequel la concentration des trafics est au plus haut en gare de Lyon-Part-Dieu, voit passer quotidiennement 650 trains, TGV, TER et transit fret(1), cumulés avec 140 000 voyageurs par jour, une charge qui s’est accrue de 20 % de 2007 à 2013. La gare historique de Lyon-Perrache, située sur la presqu’île, est moins chargée (350 trains et 60 000 voyageurs par jour), ce qui lui permet de jouer un rôle de rééquilibrage interne, d’autant qu’elle est la tête de ligne lyonnaise de tous les TGV origine-destination Paris–Lyon.
Cette situation d’encombrement de Part-Dieu est fortement pénalisante pour la régularité des TER, puisque si elle atteint 98 % pour les trams-trains de l’ouest lyonnais et 94 % sur Saint-Étienne– Roanne ou Saint-Étienne–Firminy, elle ne dépasse pas une moyenne de 87 % lorsque les relations passent par Lyon-Part-Dieu. En revanche, elles se trouvent améliorées de 6 à 10 points à partir de Lyon-Perrache, comme les liaisons Lyon–Saint-Étienne, Lyon–Villefranche et Lyon–Vienne.
En tout état de cause, dans le cadre de l’élargissement de la nébuleuse urbaine régionale, désormais permis par la fusion entre Auvergne et Rhône-Alpes, le renforcement des relations entre Lyon et Clermont-Ferrand devrait être un véritable signal fort de la démarche unificatrice sur le plan ferroviaire. Ce renforcement est d’une nécessité urgente, alors que cette ligne va être fortement concurrencée par l’achèvement de l’A89 Bordeaux–Lyon(2) qui facilite l’arrivée des autocars sur autoroute. Cette concurrence sera d’autant plus rude à affronter que l’itinéraire Lyon–Clermont via Roanne et Saint-Germain-des-Fossés, avec ses 239 km de ligne à double voie dont seulement 43 % sont électrifiés, reste encore insuffisamment performant face à l’A89. Et ce, même s’il offre de bien meilleures conditions d’entrée dans les agglomérations et reste plus performant que le réseau routier classique (via l’ex RN89 et la RN7 subsistante). Côté ferroviaire, l’itinéraire est bien meilleur que celui via Saint-Étienne à partir de Roanne dont le rôle se limite aux relations entre les deux villes. Quant à la ligne interrégionale Clermont-Ferrand–Thiers–Montbrison–Saint-Étienne (Lyon), elle ne propose que des dessertes fines locales qui, au prix d’aménagements mineurs, pourraient toutefois relier Clermont à l’aéroport d’Aulnat situé à 250 m de la ligne!
Ainsi, les meilleurs trains demandent aujourd’hui 2 h 24 de temps de trajet. Une première relation aller-retour, sans arrêts intermédiaires et qui ne demande que 2 h 13, a été créée en décembre 2015, elle sera suivie de deux autres d’ici 2017. Une extension de l’offre est permise par étapes, en raison de l’arrivée, fin 2016, des premières des douze rames Regiolis bimode qui avaient été commandées à Alstom par l’ex-région Auvergne.
Cependant, le profil difficile et parfois tortueux de l’axe Clermont-Ferrand–Roanne–Lyon, principalement à la traversée de la ligne de partage des eaux entre les bassins du Rhône et de la Loire, limite les possibilités d’améliorations supplémentaires. Aussi, la seule solution qui reste envisageable à long terme, puisqu’elle n’est évoquée que pour l’après 2030, est la réalisation de la LGV POCL (Paris–Orléans–Clermont–Lyon). Mais on pourrait construire en deux étapes ses parties nord et sud…
4 250 km, dont 495 km de LGV (ligne à grande vitesse). Dans cet ensemble, près de 630 km de lignes sont dédiés fret* et 182 km ne sont pas exploités.
Les TER Auvergne et Rhône-Alpes circulent sur près de 3 000 km de lignes ferroviaires et sur environ 1 000 km de lignes routières.
43 % du kilométrage est établi à double voie et plus; 48 % sont électrifiés; 11,6 % sont équipés de la TVM (transmission voie-machine type LGV); 52 % possèdent une signalisation automatique (BAL ou BAPR); 25 % disposent d’une signalisation mécanique; le reste du kilométrage est géré par Capi (cantonnement téléphonique assisté par informatique) ou par le CT (cantonnement téléphonique simple).
1 510 trains quotidiens et près de 580 circulations autocars (jours ouvrables) desservant 316 gares et haltes, plus 200 points d’arrêts autocars. Les flux représentent près de 180 000 voyageurs par jour (jours ouvrables), dont 85 % en Rhône-Alpes.
• 16 rames automotrices électriques Z 23500 (TER 2N)
• 60 rames automotrices électriques Z 24500 (TER 2N-NG)
• 40 rames automotrices électriques B 81500 (AGC bimode).
• 28 rames automotrices électriques B 82500 (AGC bimode bicourant).
• 15 rames automotrices électriques Z 55500 (Regio 2N); 22 rames seront livrées en 2016 et 3 en 2017.
• 35 rames automotrices électriques Z 7500, Z 9500 et Z 9600 (Z 2).
• 15 rames automotrices électriques Z 27500 (ZGC).
• 24 rames automotrices électriques tram-train U 52500 (Citadis Dualis).
• 29 locomotives électriques BB 22200.
• 32 locomotives diesel BB 67300.
• 12 (12) locomotives diesel BB 67300.
• 15 rames automotrices diesel X 72500.
• 26 (26) rames automotrices diesel X 76 500 (AGC thermiques).
• 17 (2) autorails diesel X 72500
• 84 (36) autorails diesel X 73500.
• 160 voitures Corail dont 30 voitures pilotes pour rames réversibles.
• 6 (6) rames Inox type RRR de 3 voitures.
• 2 (2) rames inox type RIO de 3 voitures.
Ce parc de matériel roulant TER sera, d’ici 2017, étoffé par une double commande, avec 12 rames Regiolis bimodes bitension Alstom, commandées en 2014 par la région Auvergne pour les relations Clermont–Lyon. S’ajoutent les 17 rames Regiolis bitension (15 kV-16 2/3 +25 kV) qui seront livrées en Rhône-Alpes d’ici 2019 et seront destinées au RER franco-helvétique Léman Express (Genève–Annemasse–Évian/La Roche-sur-Foron–Annecy/ Saint-Gervais-le-Fayet et Genève–La Plaine–Bellegarde).
* Dans cet ensemble, une régie intercommunale (Sivu) exploite pour le fret (30 000 à 40 000 t/an) 63 km des 93 km de la ligne Pont-de-Dore/ Arlanc/Sembadel/Darsac. La régie a confié à l’association Agrivap un service de trains touristiques (15 000 voyageurs/an) sur 85 km de la même ligne.
En 2016, les gares de Lyon-Vaise, de Lyon-Perrache, et le complexe secteur des bifurcations de Lyon-Guillotière qui relient les lignes allant vers l’ouest, l’est et le sud de Lyon, seront rattachés à la CCR, la commande centralisée du réseau. Créée en 2005 et installée au cœur de la ville près de la gare urbaine Jean Macé, elle a vocation à coiffer l’ensemble des circulations du réseau ferroviaire Auvergne et Rhône-Alpes.
Depuis 2010, la CCR dirige le secteur de la Part-Dieu et le nord de celui de Guillotière. Fin 2016, elle se déploiera plus à l’ouest, avec la mise en service d’un centre de circulation Grand Ouest Lyonnais, chargé de gérer 764 itinéraires parcourus quotidiennement par 670 trains (350 TER, 50 TGV, 40 trains de fret et 230 mouvements techniques).
(1) Faute de ligne de contournement, plus de 250 trains de fret transitent quotidiennement par le cœur du complexe ferroviaire lyonnais.
(2) Sa dernière section, la plus proche de Lyon et la plus coûteuse, 1,5 Md€ pour 49,5 km entre Balbigny et La Tour-de-Salvagny, a été achevée en 2013. Mais il reste encore, d’ici 2017 ou au-delà, à construire un raccordement avec l’A6 à Limonest, soit 5,5 km pour 150 M€!
