RÉSEAU Michel Labardin, vice-président de Bordeaux Métropole en charge des transports de demain, détaille la phase 4 du tramway. Son idée centrale: créer un effet réseau en mettant en place les premières lignes circulaires autour de Bordeaux. Trois projets sont avancés, tandis que beaucoup d’autres n’en sont qu’au stade des études pré-opérationnelles.
MICHEL LABARDIN: Nous agissons pour développer une alternative à la voiture individuelle et solo. Ce plan doit donc permettre de préfigurer les infrastructures des prochaines années, en utilisant tout le spectre des modes de transport. Il faut agir sur l’offre de réseau pour proposer des solutions qui complètent encore un peu plus nos transports collectifs.
Notre plan s’articule autour de deux piliers: le SDODM [schéma directeur opérationnel des déplacements métropolitains, ndlr] et une intervention sur l’ensemble de la palette des transports. Par ailleurs, il profite de toutes les contributions issues du congrès mondial ITS qui s’est tenu à Bordeaux en octobre dernier. Plusieurs expérimentations ont été menées dans notre métropole sur lesquelles nous souhaitons capitaliser, qu’il s’agisse d’application numérique, d’information voyageurs, de covoiturage, etc.
M. L.: Bordeaux Métropole achève la phase 3 du tramway. Plusieurs lignes ont été prolongées, ou seront prochainement prolongées au-delà de la rocade.
Le tram-train du Médoc, qui desservira Blanquefort, sera livré à la fin de l’année. Une nouvelle ligne doit être créée vers Eysines. Ensuite, nous en aurons fini avec la phase 3 et disposerons de 77 km de tramway. Avec le plan stratégique adopté le 22 janvier, nous voyons plus loin.
M. L.: Notre calendrier nous emmène en 2019. La concertation est achevée et l’enquête publique va démarrer. Il y a une demande de tramway sur ce tracé. Les études montrent que deux solutions seraient pertinentes, en complémentarité l’une de l’autre.
D’un côté, l’extension de la ligne A de tramway jusqu’à l’aéroport, et de l’autre, la création d’une ligne de bus à haut niveau de service Pessac-Alouette–Aéroport. Cette ligne emprunterait la rocade qui vient d’être élargie à 2×3 voies, et sur laquelle nous avons prévu une bande d’arrêt d’urgence calibrée pour du transport lourd. L’objectif, à terme, est que la rocade, dont les travaux d’élargissement se termineront en 2020, accueille trois voies plus une voie réservée au transport collectif, aux véhicules d’urgence et au covoiturage.
M. L.: Une étude, menée conjointement par la Métropole et la région, doit permettre d’identifier le potentiel de chaque gare de l’agglomération et voir comment générer les meilleures connexions possibles. Notre ambition est de faire de la ligne ferroviaire de ceinture un réseau urbain. Pour cela, les trois AOT souhaitent mettre en place un syndicat mixte des transports. La billétique unique est donc à l’ordre du jour.
M. L.: Nous avons identifié un potentiel de 66 000 voyageurs par jour sur cette ligne. Elle partirait de Gradignan [ville dont Michel Labardin est le maire, ndlr] pour desservir le campus, le CHU et le nouveau quartier des Bassins à flots, jusqu’à la gare de Cenon. Il s’agirait de la première ligne circulaire de l’agglomération. L’investissement se chiffre à 350 M€. Cela doit permettre de créer de nombreuses connexions et d’optimiser l’effet réseau. Actuellement, il existe trois interconnexions au centre-ville de Bordeaux, elles sont toutes saturées.
M. L.: Le projet de BHNS Bordeaux–Saint-Aubin-de-Médoc doit être soumis à enquête publique cette année. Il prévoit une ligne de 20 km, dont la moitié située intraboulevard serait en site propre et l’autre moitié dans la circulation. Un potentiel de 50 000 voyages par jour a été détecté. Il s’agirait du premier BHNS de l’agglomération.
D’autres projets sont envisagés, qui n’en sont qu’au stade des études pré-opérationnelles. Il est donc trop tôt pour savoir quel mode sera retenu. Un projet de tramway est envisagé avec l’extension de la ligne D vers Saint-Médard-en-Jalles.
Il est également prévu une liaison de pont à pont, la création d’une ligne Bassens–Campus, la mise en place d’une grande circulaire qui desservirait les zones d’activité économique et d’habitat, et l’extension du tramway entre Blanquefort et Parempuyre.
M. L.: Effectivement, il s’agit d’une phase 4, avec trois projets opérationnels et d’autres encore à l’étude. Ces projets ont vocation à être lancés lors de la prochaine mandature, nous avons une feuille de route pour 15 ans. Il faudra bien évidemment hiérarchiser nos projets. L’idée centrale sera de ne pas additionner mais d’optimiser. La desserte d’un territoire, via l’effet réseau, sera plus importante que la desserte d’une ville.
M. L.: Tout d’abord, nous profiterons en 2020 d’une rocade à 2×3 voies. Ensuite, un plan global de circulation devra être mis en place. Nous prévoyons par exemple la suppression de 200 carrefours à feux injustifiés ou l’expérimentation d’une zone à restriction de circulation.
Est également envisagée la mise en sens unique du pont de Pierre, quand le pont Jean-Jacques Bosc aura été construit.
En ce qui concerne le stationnement, nous sommes de plus en plus restrictifs dans Bordeaux intraboulevard pour faciliter le stationnement des résidents.
Notre plan se focalise aussi sur les modes doux, avec la volonté de développer les VCub dans le centre de l’agglomération et des stationnements sécurisés.
Les phases 1 et 2 avaient coûté 1 Md€ au total. La phase 3 a également nécessité 1 Md€. La phase 4 devrait représenter un coût du même ordre. Il faudra faire des économies sur l’infrastructure et l’exploitation, c’est-à-dire faire sobre et toujours plus optimisé. À Bordeaux, le tramway représente un coût de 25 M€ le kilomètre contre 18 à Besançon. Il y a sans doute des idées à reprendre.
Certes, une infrastructure de transport représente un coût onéreux, mais cela constitue une priorité car la métropole bordelaise ressort comme la 3e ou la 4e ville la plus thrombosée de France. Bordeaux Métropole devrait compter près d’un million d’habitants en 2030. Actuellement, il y a une dynamique en faveur de la ville, et il ne faudrait pas que la mobilité représente un handicap.
Le plan Climat fixe un objectif de 15 % de part modale pour les transports en commun. Cela signifie qu’il faudra transporter 415 000 voyageurs chaque jour en 2020. Nous étions à 32 0000 voyageurs en 2013 et 80 % de l’objectif est aujourd’hui réalisé.
M. L.: Pour obtenir une déclaration d’utilité publique, il faut justifier d’un taux de rentabilité socio-économique. Et il est vrai que plus on s’éloigne du centre-ville, moins la rentabilité est au rendez-vous.
Il faut se poser la question: où l’investissement est-il le plus rentable? Jusqu’où est-ce supportable de porter des dépenses publiques? La définition universelle du réseau peut être questionnée.
