Au-delà de la technologie, c’est un véritable changement de culture et de méthode que doivent mener les opérateurs et les autorités, pour répondre aux nouveaux modes numériques de relation client.
Plus de collaboration, plus de coordination, plus d’innovation… le transport public doit s’adapter aux nouvelles cadences que le numérique impose, porté par de nouvelles technologies, à la fois côté voyageur mais également dans ses outils informatiques internes. « Avant, notre métier consistait à fournir un planning de nos lignes, mais aujourd’hui, tout change, car les clients ont accès à de nouveaux modes, nous devons apprendre à relier les voyages et à nous concentrer sur les tronçons des derniers mètres des trajets de nos voyageurs », analysait lors d’une conférence au salon IT-Trans, Rahul Kumar, vice-président exécutif de la Digital Factory de Transdev. « La digitalisation change la relation client mais également nos modèles économiques, en apportant de nouvelles opportunités », détaille quant à lui Masaki Ogata, vice-président du réseau japonais JR East et président de l’UITP, « comme notre carte de transport, devenue carte de micropaiement valable dans tout le pays, ça ne rentrait pas dans notre champ de compétences, mais nous avons pu profiter de l’importance du titre de transport au quotidien pour prendre pied dans les paiements. »
Pour répondre à ces nouveaux défis, les organisations doivent apprendre à travailler autrement. Pour Rosina Howe-Teo, directrice de l’innovation à l’autorité des transports de Singapour (LTA), « nous nous sommes rendu compte que les gens ne voulaient plus uniquement des jolis bus ou des trains neufs, mais de réels services, nous avons donc changé de stratégie et la technologie est un excellent outil pour nous rapprocher de nos clients ». Information temps réel, API de réutilisation des données, collecte des données de maintenance par des capteurs, automatisation des trains et bientôt des bus… autant de nouveaux systèmes qui exigent de pouvoir fonctionner ensemble. Et pour les mettre sur pied, un service innovation a été créé, le développement agile pour s’adapter plus rapidement aux évolutions des technologies est devenu la méthode de travail des mini-groupes de travail constitués. « Tous les 3 mois, nous apportons une nouveauté, on ne peut plus attendre 10 ans pour lancer un nouveau service, nos ingénieurs apprennent à être plus souples et penser front-end pour les clients ».
Chez Transdev, 5 pôles d’innovation digitale thématiques ont été créés et Rahul Kumar a pour mission de travailler sur la dimension « disruptive ». « Il ne s’agit pas uniquement de développer des applis mobiles, mais d’apporter des solutions et des produits aux clients », explique cet américain arrivé en septembre 2015 dans le groupe français. Côté méthode, la Digital Factory fonctionne sur son propre rythme. « Au lancement, nous avons passé trois mois à réfléchir sur notre méthode de travail, plus rapide, plus directe, les décisions n’ont pas besoin de passer des niveaux hiérarchiques supérieurs de validation. » Un fonctionnement qui permet de travailler sur « la disruption de nos propres métiers », comme c’est le cas avec les voitures et bus autonomes: un comble pour un groupe dont 70 % de ses 86 000 collaborateurs sont des conducteurs… « Il ne faut pas faire l’impasse sur ses sujets, car Google ou Apple le font déjà, nous le faisons à notre rythme, pour mieux saisir les enjeux et opportunités. »
Mais technologie et transports ont toujours fait bon ménage, l’industrie ne devrait pas avoir de difficultés à absorber cette nouvelle vague d’innovations, rappelle en conclusion de cette conférence, Masaki Ogata. « Rappelez-vous que les voies de chemin de fer ont permis l’installation en parallèle de câbles de communication, plus il y a de communication entre les gens, plus il y aura de déplacements plus fréquents. »
