La concurrence est décidément un mot totalement banni du vocabulaire des organisations syndicales de la SNCF. Car au fond, la grève unitaire du 26 avril n’est rien d’autre qu’un refus pur et simple du principe même de la concurrence appliquée au secteur ferroviaire. Ceci dit, la surdité syndicale ne se limite pas à cette seule réalité. Pas question de tenir compte en effet des diverses études sérieuses – et documentées chez nos voisins européens – qui démontrent qu’il faut en moyenne 30 % de personnel en moins dans le fret et 15 à 18 % dans le transport de passagers pour faire correctement rouler les trains. Le projet de décret socle, la base du nouveau cadre social unique du secteur ferroviaire, qui leur a été communiqué le 18 février par le secrétaire d’État chargé des transports, Alain Vidalies, semble même avoir été perçu comme une provocation, plutôt que comme un outil de discussion à partir duquel il serait possible de concevoir, d’ici juin, une convention collective de branche et des accords d’entreprise. Rappelons qu’il s’agit là d’établir un cadre social minimal qui prévaudra pour les 170 000 salariés de la branche (dont 148 000 pour la SNCF) lors de l’ouverture du secteur ferroviaire à la concurrence, en 2020 pour les LGV et 2026 pour les TER.
Sans grande surprise, tant elles sont aujourd’hui prévisibles dans leur refus de toute évolution vers l’économie dite de marché – d’aucuns iront-ils jusqu’à les qualifier de réactionnaires? – les organisations syndicales militent pour que le statut de cheminot soit appliqué à tous les nouveaux entrants dans le métier. Un véritable déni de réalité économique dans un monde qui a pourtant bien besoin de créer des emplois, fussent-ils moins surprotégés que ceux hérités du temps de la Bête humaine. La partie de bras de fer a donc très officiellement commencé, et il semble peu probable, dans le contexte politique actuel, que le gouvernement fasse montre de toute la fermeté que les usagers sont en droit d’attendre, eux qui aspirent plus que tout à un transport ferroviaire adapté à leurs besoins, de bon niveau, prévisible dans sa régularité et à un coût non prohibitif. Autant de qualités qui semblent de plus en plus faire défaut à l’offre de la SNCF…
