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Interview

2. Un outil de la mobilité et de l’intermodalité

Loi Macron, ordonnance, registre. La réglementation sur les gares routières a plus évolué en moins d’un an que durant les 70 dernières années. Christian Rey-Renaux, responsable de l’unité transport routier de voyageurs à l’Arafer, analyse les conséquences de ce bouillonnement législatif.

Connexion TT: À l’heure des pôles d’échanges multimodaux, existe-t-il encore des gares routières en France?

Christian Rey-Renaux: Les gares routières ont connu leur âge d’or dans les années 1950-1960, à l’époque où les autocaristes transportaient à la fois des voyageurs et de la messagerie. Puis, avec le règne de la voiture individuelle, les réseaux de transport interurbains ont peu à peu perdu du terrain. Dans l’ensemble, les départements y consacrent en moyenne de 3 à 5 % de la totalité de leur budget. Parallèlement, on a assisté à la disparition progressive des gares routières. C’est un sujet qui a été quelque peu délaissé, et comme le disent certains experts, « quand un problème est orphelin, il n’a pas de solutions ».

Une étude de la FNTV datée de 2012 sur cette thématiquea montré que la moitié des villes préfectures en France n’avait pas de gares routières. En janvier 2016, dans le cadre d’une première enquête, l’Arafer a dénombré environ 400 sites (avec ou sans bâtiment), dont 200 en région parisienne et 200 en province. Mais il ne s’agit que d’un premier recensement. Grâce au registre des gares routières que nous allons établir et publier au début du mois de mai, sur la base des déclarations des exploitants, comme le prévoit l’ordonnance du 29 janvier 2016, nous disposerons d’une cartographie plus juste de ces aménagements.

Cette ordonnance relative aux gares routières, qui complète la loi Macron et son volet sur la libéralisation du transport interurbain par autocar, a remis le sujet sur le devant de la scène. Cela marque-t-il l’ouverture d’une nouvelle ère pour les gestionnaires de gares?

C. R.-R: Le dernier texte sur les gares routières datait de 1945. En 70 ans, la situation est restée quasiment stable. Il y a eu un certain nombre de petites évolutions (comme les aménagements spécifiques pour les personnes à mobilité réduite), mais rien de spécifique sur le statut juridique ou la définition des gares routières.

L’ordonnance du 29 janvier 2016 propose une définition juridique qui prend en compte la diversité de ces aménagements routiers. Ses dispositions s’appliquent aux gares en ouvrage, souvent exploitées par des groupements de transporteurs dans le cadre de DSP [délégation de service public, ndlr] ou de marchés publics, par des régies départementales ou par des sociétés publiques locales de transport. Elles s’appliquent aussi à tous les aménagements d’arrêt sur voirie ou en bordure de voirie, lesquels relèvent le plus souvent de la responsabilité des collectivités territoriales.

Ces sites doivent être maintenant déclarés par leurs gestionnaires auprès de l’Arafer, afin d’alimenter le registre des gares routières évoqué précédemment. Cette sorte d’annuaire permettra de disposer d’une base d’informations circonstanciées et fiables. Le registre apportera un éclairage sur un secteur, dont aujourd’hui on ne sait rien, ou si peu. Ce sera surtout un outil utile pour les nouveaux entrants, puisqu’il y aura toutes les informations dont ont besoin les opérateurs pour accéder à ces gares et exploiter leurs lignes. C’est aussi un service pour les voyageurs. Notre idée est de donner une présentation concrète et accessible du registre sous forme d’une carte interactive. Y seront également renseignées les conditions tarifaires et les règles d’accès pour chaque gare routière, afin de garantir plus de transparence et une égalité d’accès pour l’ensemble des autocaristes.

L’Arafer aura-t-elle le pouvoir de casser certaines situations d’abus de position dominante que peuvent exercer certains acteurs sur le marché des gares routières?

C. R.-R: L’ordonnance du 29 janvier dernier a donné au régulateur des pouvoirs étendus. Outre notre pouvoir de règlement de différends entre les AOT, les gestionnaires d’infrastructure et les opérateurs – comme pour le ferroviaire – nous pouvons traiter des litiges liés à des pratiques discriminatoires ou présentant des risques de barrière à l’entrée, ou bien encore d’éviction au moyen d’une politique tarifaire discriminatoire. De plus, nous disposons d’un pouvoir de régulation asymétrique, ce qui signifie que nous pouvons imposer des obligations particulières (transparence, comptabilité dédiée) aux exploitants de gares routières, s’ils exercent une influence significative sur un autre marché du secteur des transports.

Cette nouvelle donne réglementaire, impulsée par la loi Macron, va-t-elle pousser les collectivités locales, et en particulier les régions qui auront en charge le transport interurbain à partir du 1er janvier 2017, à se réapproprier le sujet des gares routières?

C. R.-R: En ce qui concerne les régions, il faut être pragmatique, et personne ne peut ignorer l’ampleur de la tâche qui les attend à court terme, que ce soit avec la renégociation de la plupart des conventions TER avec SNCF Mobilités, ou avec le transfert de la compétence du transport scolaire. Pour autant, sur le fond, il n’y a pas de raison que les gares routières n’intéressent pas à l’avenir les élus, car elles sont un outil à part entière de la mobilité et de l’intermodalité dont les régions sont plus particulièrement les chefs de file. Les gares routières ne peuvent pas être pensées indépendamment du transport public interurbain, et ce mode de transport est l’une des réponses possibles au besoin de mobilité de nos concitoyens. Il faut lui laisser le temps de trouver sa place, dans une complémentarité intelligente avec les autres modes.

Christian Rey-Renaux, de Réunir à l’Arafer

En octobre 2015, l’Araf a été rebaptisée Arafer. À sa mission d’origine, la régulation des activités ferroviaires, s’ajoute la régulation économique du tunnel sous la Manche, du transport interurbain par autocars, et enfin, le contrôle des concessions autoroutières.

Au sein de la Direction des transports routiers de voyageurs et des autoroutes, depuis mars 2016, Christian Rey-Renaux dirige l’unité transport routier de voyageurs (4 personnes au total). Avec son équipe, cet ancien responsable des affaires publiques du groupement Réunir, instruit les demandes des AOT qui saisissent l’Arafer pour demander l’interdiction ou la limitation de certains projets de liaisons de moins de 100 kilomètres. L’unité assure également la mise en place et la gestion du registre des gares routières.

Auteur

  • Marie-Noëlle Frison
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