Combien de véhicules ai-je sous la main pour accepter ce nouveau marché? Les chauffeurs sont-ils payés en fonction des heures de conduite réelles? Comment améliorer la rentabilité? En un clic de souris, vous avez aujourd'hui réponse à toutes ces questions et à d'autres plus complexes, grâce aux logiciels d'aide à la décision. Finis les casse-tête et les semaines de calculs interminables.
Un autocariste peut-il aujourd'hui se passer de l'informatique? Les progrès réalisés ces dernières années font plutôt pencher vers le “non”.
“Il y a cinq ans, les solutions étaient assez figées. Les logiciels étaient séparés les uns des autres. Aujourd'hui, on peut multiplier les tableaux de bord selon différents critères en temps réel. Mais la base de données n'est saisie qu'une seule fois, tout en étant disponible sur l'ensemble des modules”, assure Alain Bertolami, Pdg d'ABC informatique.
L'heure est donc à la solution glo- bale. La plupart des logiciels sont en mesure de faire le lien entre la création d'un devis et l'établissement de la prépaie. “On est passé d'une suite de logiciels à des outils qui communiquent entre eux, poursuit Alain Bertolami. Le travail en réseau a également modifié la donne. Chaque collaborateur apporte des informations diffusées sur l'ensemble du serveur. C'est un changement majeur”.
Dans le cas d'ABC, quatre grands modules – qui peuvent être vendus séparément – sont ainsi reliés: ABC Car, qui assure la gestion commerciale (établissement des devis, confirmation clients, facturation, gestion de la relation clientèle, statistiques etc.), ABC Planning (emplois du temps prévisionnels des conducteurs et des techniciens), ABC Prépaye (logiciel qui compare le temps de travail effectif aux prévisions), et ABC Parc (gestion du parc, des stocks, des incidents techniques etc.).
Éditrice du logiciel Ordicars depuis 1981, la société SNO adopte la même stratégie. “Nous proposons un outil complet. Il ne s'agit pas d'un puzzle. Les données sont fusionnées. Par exemple, un ordre de réparation donne lieu à l'écriture d'une ligne dans le planning, qui sera pris en considération dans le calcul prépaie. Notre souci a été de multiplier les fonctionnalités pour qu'elles répondent à la majorité des besoins”, détaille Daniel Robbes, directeur général de SNO.
Ces changements ont poussé la plupart des éditeurs à s'aligner. Avec Carmagic, la société Infosup commercialise une solution consacrée à la gestion commerciale. “À partir d'un devis, on débouche sur la facturation. Et en plus des statistiques, on a des interfaces avec des logiciels classiques de comptabilité. Nous avons aussi élaboré un module Planning. Toutes les données commerciales y sont intégrées, afin d'aider l'exploitant à mettre les moyens nécessaires en fonction des commandes”, indique Robert Monot, le directeur général. Ce planning interactif prend en compte les réglementations sociales, qui ont été bouleversées avec les accords de branche de 2002. “Il tient compte des repos compensatoires et des congés, des heures supplémentaires, des visites médicales, etc. Tous ces indicateurs apparaissent sous forme d'alerte”.
Quant à la gestion du parc, elle est assurée par un logiciel complémentaire baptisé Parcmagic. “C'est le pendant de Carmagic au niveau de la gestion des véhicules. Il rappelle les dates des passages aux Mines, met en lumière les réparations passées, gère les stocks, définit les besoins de matériels. Et grâce à ses statistiques, le module de suivi des consommations apporte des indications précieuses au moment du renouvellement du parc”, poursuit Robert Monot avant de rappeler que “la base de données est commune aux deux logiciels”. Pour lui, ce dernier élément est capital: “Moins il y a d'interfaces, moins les risques d'erreurs sont grands. Il est préférable d'avoir un logiciel intégré avec une base de données unique.” Autrement dit, mieux vaut s'équiper de logiciels provenant de la même enseigne pour éviter les contrariétés.
Pourtant il n'est pas toujours possible de suivre les conseils du Pdg d'Infosup. Pour la lecture des disques, par exemple, près de 300 autocaristes font appel à la société Strada. Son logiciel Stradacard est “capable de lire les informations inscrites sur les disques et les cartes des conducteurs. Ces dernières sont ensuite exportées sur le logiciel de prépaie de l'entreprise de transport”, explique Jacky Morilleau, directeur général de la PME installée à Bressuire entre Nantes et Poitiers.
Depuis les accords sociaux de 2002, la lecture des disques est un enjeu crucial pour les éditeurs. La compatibilité entre les différents produits est donc indispensable. “Nous ne nous occupons que de l'extraction des informations. Les données de Stradacard peuvent être reprises par l'ensemble des logiciels existants. Sans quoi le lien entre le prévisionnel et le réel ne serait pas possible.” Sur ce terrain, Strada n'est pas en position de monopole. Avec ActiCar (pour les autocaristes) ou ActiVoyage (pour les voyagistes), Acticoncept propose, selon sa directrice générale, Nathalie Moranne, “une solution globale, qui recense les informations historiques, prévisionnelles et réelles.” L'arrivée des contrôlographes numériques a conduit Acticoncept à “s'ouvrir aux données des cartes conducteurs et des lecteurs de disques grâce à une interface d'import avec une nouvelle option appelée Tachy”. L'utilisateur dispose ainsi d'une solution unique pour tous les postes de travail.
Autre évolution majeure: les outils d'aide à la décision. “C'est sans doute ce qui bouleverse le plus notre métier. Nous n'avons plus à nous demander comment faire communiquer les divers éléments. L'échange va de soi”, affirme encore le Pdg d'ABC. En la matière, l'utilisation d'internet n'a pas encore véritablement explosé. Beaucoup d'autocaristes sont un peu frileux devant la Toile. Armand Perez, directeur commercial de Perinfo, est pourtant convaincu “qu'internet va devenir indispensable pour tous les patrons qui veulent rationaliser le fonctionnement de leur entreprise. Nous sommes aux débuts d'une évolution capitale” (voir interview ci-contre). La nouvelle génération de logiciels comme Opticar ou ABC Expert révolutionnera-t-elle le monde des transports? “Les outils de demain permettent de raisonner en termes de productivité, s'enthousiasme Armand Perez. Nous avons conçu un outil capable d'apporter des réponses crédibles afin d'améliorer la rentabilité de l'entreprise et de réduire ses charges. C'est un fabuleux outil d'aide à la décision.”
Quant à ABC Expert, sa vocation n'est pas aussi générale, mais le concept est proche. “Son but est d'optimiser le réseau. Cet outil doit définir le nombre de rotations à effectuer sur une ligne, les nombres de conducteurs, les correspondances, etc. Ces informations sont ensuite importées sur ABC Planning”, conclut Alain Bertolami. Dans le même ordre d'idée, Strada va sortir un boîtier GPRS, “destiné notamment auxentreprises dont les cars ne rentrent pas tous les soirs au dépôt”, annonce Jacky Morilleau. Les services administratifs pourront collecter les données du disque à distance, à condition que le car soit couvert par un réseau téléphonique.
Malgré ces attirantes mutations, l'informatique n'est pas encore totalement admise par la profession. Le coût de l'investissement fait hésiter les plus petites entreprises. “Pourtant notre offre est notamment dédiée aux PME”, assure Alain Bertolami qui confirme que “beaucoup de petites sociétés familiales de moins de cinquante salariés hésitent à franchir le pas.” Pour elles, des formules d'abonnement comprenant le prêt du matériel et la maintenance pourraient chasser les doutes. La crainte de ne pas maîtriser l'outil est un autre frein. Charge aux éditeurs de mettre en lumière tous les efforts entrepris ces dernières années pour simplifier son usage.
En ce sens, la directrice d'Acticoncept explique que son logiciel “peut être adopté directement, avec un minimum de formation. Par la suite, l'utilisateur peut personnaliser l'outil, en définissant par exemple ses propres recherches.” De son côté, Alain Bertolami, qui est épaulé par un ingénieur spécialisé en ergonomie logicielle, insiste sur “la qualité apportée à l'interface, qui s'est nettement bonifiée. Celle-ci est simplifiée, accueillante tout en restant complète.”
Consciente de l'enjeu, la société SNO a également donné un coup dejeune à l'image et au design de son logiciel avec le lancement de Web Optimum: “Nos outils tournent sur une plateforme I-series. Ces ordinateurs IBM pour professionnels n'étaient pas particulièrementaccueillants. Nous avons aujourd'hui une présentation appelée Elite qui ressemble à Windows, beaucoup plus attractive”.
Alors, simple changement ou début d'une nouvelle ère? De toute évidence, les entreprises de transport, quelle que soit leur taille, ont intérêt à jouer la carte de l'informatique.
Dessins de Franck Lhermitte
"Nous avons commencé à utiliser le logiciel ABC Voyage dès 1994. Puis, nous avons opté pour ABC Planning en 1999. On dispose de tout le chaînage. C'est plus logique que si nous avions fait appel à un autre éditeur. Toutes les données se suivent dans chaque service de l'entreprise. L'informatisation est aujourd'hui absolument nécessaire. Nous venons d'ailleurs d'équiper nos cinq sites de bornes de lecteurs de disques avec Avisio. Toutes les informations sont directement transférées au siège sur le module ABC Prépaye, qui les compare avec les prévisions de planning. Une fois que ce rapprochement est fait, les données sont envoyées vers le service paie. De mon côté, je peux tout visualiser via notre système intranet. Seule contrainte: je ne dois jamais me séparer de mon ordinateur portable."
"C'est un confrère de Brest qui m'a conseillé de m'équiper en informatique. J'ai comparé trois ou quatre versions. J'ai choisi la plus simple et la moins coûteuse. En fait, je n'ai pas eu à investir. Je paye 95 euros pas mois sur trois ans pour avoir accès au logiciel.
La société SNO nous prête les ordinateurs et assure la maintenance. Pour une société comme la mienne – qui exploite 25 cars – c'est l'idéal. Je mesure tous les jours les avantages d'un tel équipement. Tout est fait automatiquement en temps réel. Plus besoin de scanner les disques. Tout est paramétré d'avance.
Du coup, on paye les chauffeurs pour ce qu'ils font réellement.
Pour l'instant, je n'utilise pas encore le logiciel de gestion de parc. On y viendra, mais doucement car il faut déjà bien maîtriser Ordicars.
C'est mon père qui assure cette tâche manuellement, mais il est évident que notre avenir passe par l'informatisation."
Nous avons complété le périmètre classique par des outils stratégiques et inédits dans le monde de l'interurbain. Nous avons d'abord lancé Opticar, présenté au MIT International. Cet outil a pour objectif de réduire les charges et d'obtenir une meilleure productivité en optimisant l'utilisation des véhicules et des conducteurs. C'est une aide à la décision qui établit le meilleur planning d'exploitation possible en tenant compte des contraintes sociales et matérielles, des distances, de l'effectif en place, etc. La pénurie des responsables d'exploitation et des conducteurs, le coût des véhicules, la multiplicité des contraintes sociales rendent la tâche de l'entrepreneur difficile. Celui-ci se retrouve avec un planning casse-tête.
Les groupes emploient des ingénieurs "méthodes", mais les PME ne disposent pas de ces moyens. En quelque sorte, nous avons démocratisé un outil que seuls les majors pouvaient s'offrir.
Les entrepreneurs cherchent à résoudre les problématiques suivantes: quel est l'impact d'un appel d'offres sur une exploitation ? Comment mieux répartir des véhicules sur les différents sites d'exploitation? Comment bien organiser le temps de travail des conducteurs? Puis-je économiser un véhicule? À travers toutes ces interrogations, ils veulent améliorer la productivité de l'entreprise. Les calculs manuels des salariés ne suffisent plus. D'autant qu'utiliser des logiciels d'aide à la décision, c'est déjà une manière d'améliorer la productivité de l'entreprise. Là où il fallait plusieurs semaines pour établir des conclusions, l'ordinateur n'a besoin que de quelques minutes.
Il s'agit du deuxième défi auquel vont être confrontées les PME. Maîtrisé dans le transport de marchandises , internet a fait timidement son apparition chez les autocaristes. C'est pourquoi nous avons intensifié nos efforts. En fonction de droits d'accès, conducteurs, exploitants ou clients peuvent exploiter les logiciels via l'outil internet. Cela se traduit par des accès au planning pour les salariés, ou des commandes en direct pour les clients. Les conducteurs peuvent aussi saisir des incidents réseau sur n'importe quel ordinateur.
Les nouvelles technologies deviennent un vecteur de rationalisation et permettent de fournir des informations stratégiques pour le chef d'entreprise.
"Pour les lignes régulières et l'occasionnel, nous nous servons du logiciel Ordicars Élite. Son utilisation est très facile. Grâce à lui, on optimise le planning des conducteurs.
En un clic de souris, on découvre toutes les anomalies. En recoupant toutes les informations, on peut, par exemple, savoir quel conducteur circule sans permis. La version Elite est plus conviviale que la précédente. Autre avantage: tous les salariés peuvent consulter le logiciel simultanément. Avec internet, on peut aussi se connecter à distance pour connaître son planning. Et puis la gestion du temps de travail se fait en temps réel, tout cela sans papier."
"Nous avons acheté différents logiciels de la palette ABC Informatique: ABC Car, ABC Planning, ABC prépaye et ABC Parc. Cet ensemble permet réellement d'accroître la productivité de l'entreprise.
Pour autant, nous n'irons sans doute pas plus loin. L'informatique a ses limites. Je ne suis pas particulièrement demandeur des solutions internet. Notre réseau fonctionne bien.
Il n'y a pas de raison de vouloir franchir ce cap, il faut savoir s'arrêter.
On est suffisamment dépendant de l'informatique, devenue incontournable. Il faut garder une mainmise sur la gestion de l'entreprise et avancer par palier."
"Nous utilisons les logiciels traditionnels de Perinfo pour la gestion des plannings, de la prépaie, des devis, des commandes et de la facturation, la cartographie (calculs des déplacements hors courses ou domicile-travail). Pour la gestion du parc, Veolia nous impose un système indépendant. Nous n'avons pas d'interface entre les deux outils, ce serait trop lourd. Pourtant, je suis convaincu qu'il serait très profitable d'avoir une solution intégrée.
Pour Opticar, le fournisseur nous a montré ce qu'il pouvait faire. Nous allons sûrement l'adopter.
Reste à définir le coût total d'un tel investissement.
Apparemment, c'est vraiment un outil qui apporte un ‘plus‘ pour ceux qui cherchent à optimiser leur activité. L'être humain n'est pas capable d'aller aussi loin, de penser à tout."
