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La carte KorriGo ensorcelle la Bretagne

Lancée en mars 2006 dans les transports collectifs de Rennes puis dans les TER, la carte unique et sans contact KorriGo poursuit sa conquête bretonne: à la rentrée prochaine, elle s’invite à bord des autocars d’Ille-et-Vilaine.

Les korrigans, ces petits lutins celtes à l’esprit malfaisant, vont faire leur rentrée dans les autocars d’Ille-et-Vilaine. La carte à puce sans contact baptisée KorriGo, qui autorise déjà les voyageurs à prendre indifféremment les TER bretons, les bus et le métro automatique de Rennes, étendra ses pouvoirs le 3 septembre sur tout le réseau interurbain Illenoo, coexploité par Veolia Transport et Keolis.

Ce titre de transport unique et sans contact a été conçu par ERG et ACS, deux intégrateurs de systèmes billettiques. Une fois chargée dans des distributeurs automatiques, aux points de vente habituels (buralistes, dépositaires) ou par prélèvement bancaire, il suffit de passer la carte à quelques centimètres des valideurs – même dans une poche ou un sac – pour enregistrer son passage. La validation est obligatoire à chaque correspondance, moyennant cinq euros d’amende. Ce qui, au départ, a provoqué la grogne des 136 000 abonnés, habitués à monter dans les bus ou le métro sans montrer patte blanche.

Les lutins font baisser la fraude

Daniel Delaveau, vice-président de Rennes Métropole, la collectivité locale qui a financé les 6,5 millions d’euros nécessaires pour développer KorriGo, invite donc les usagers à considérer la validation comme “une participation volontaire pour lutter contre la fraude et affiner la connaissance de la fréquentation du réseau”.

Ces cartes de transport à puce sont en effet de vrais mouchards. Ce qui déplaît à certains usagers, inquiets de la surveillance possible de leurs déplacements. De leur côté, les contrôleurs du réseau urbain ont inauguré KorriGo avec un mouvement de grève pour protester contre leurs nouveaux appareils portables de contrôle!

En attendant, les résultats de lutte contre la fraude sont là: “Depuis 15 mois, son taux a chuté de 11 à 6 %”, note Étienne Fougeray, directeur général du Service des transports de l’agglomération rennaise (Star). Pour faire prendre le pli aux usagers des autocars interurbains (dont 9 000 écoliers) en septembre, le conseil général a prévu de déployer une soixantaine d’accompagnateurs.

Partage du gâteau

La carte KorriGo propose des tarifs différenciés en fonction des heures, de la fréquence des déplacements et du nombre de personnes voyageant ensemble: à partir de trois passagers, elle donne droit à 50 % de réduction. Et tout abonné TER bénéficie de 50 % de réduction sur les lignes urbaines. Les recettes commerciales sont redistribuées entre Keolis qui exploite le réseau urbain Star, et la SNCF avec ses TER, selon le nombre de billets vendus. Cette clé de répartition est établie dans la convention qui lie les deux transporteurs. Chacun transmet ses données à l’autre, et reverse le montant des titres de transport vendus. La future norme InterBob (Back office billettique), que l’Afnor doit publier en juillet, devrait sécuriser l’envoi automatique et quotidien de ces données entre transporteurs . “Pour l’heure, nous n’avons pas de chambre de compensation et cela marche très bien comme ça”, explique-t-on à Rennes Métropole. Avec l’arrivée des 14 000 voyageurs du réseau interurbain dans le rayon de compétence de la carte KorriGo, les choses risquent de se compliquer.

QUI PAIE QUOI, ET À QUI?

Un sésame permettant de sauter du train ou de l’autocar au tramway, au bus ou au métro, peut faire le bonheur des voyageurs. Un peu moins celui des transporteurs: pour eux, c’est même un véritable casse-tête. Comment savoir combien de passagers ont emprunté chaque ligne? Sur quel trajet? Avec quelle tarification? Qui contrôle la validation des cartes et surtout, qui fait le partage des recettes entre les différents transporteurs?

Si les cartes de transport intermodales et interopérables sont dans l’air du temps, les systèmes de compensation financière ne semblent pas encore au point. "Les Français sont en retard par rapport aux Australiens, aux Anglais ou même aux Portugais", observe Christophe Badesco, chargé de mission billettique chez Keolis. Pourtant, il existe déjà des chambres de compensation financière dans d’autres secteurs économiques, comme les banques, les assurances, le transport aérien ou les autoroutes. Lorsque les automobilistes empruntent différents tronçons autoroutiers par exemple, les sociétés gestionnaires se partagent les recettes en fonction du nombre de kilomètres parcourus sur leur territoire. Le système du clearing (ou compensation) est donc rodé, sauf dans les transports publics ! Parce qu’ils sont de la compétence des collectivités locales, lesquelles ont du mal à se mettre d’accord et n’ont pas le droit de jouer le rôle de comptables publics. "La chambre de compensation idéale n’existe pas, note Christophe Badesco mais elle doit être administrée de manière impartiale, par un tiers ou par tous les transporteurs (et non par le fabricant de cartes, comme cela a été un moment le cas pour le réseau de trains, de trams et de bus de Melbourne en Australie, Ndlr). Mais les transporteurs craignent de perdre le contrôle de leurs données commerciales et la remise en cause des équilibres financiers avec leurs autorités organisatrices respectives", analyse-t-il.

Des réflexions sont en cours en Haute-Normandie et à la Communauté urbaine de Lyon pour mettre en place une chambre de compensation indépendante et impartiale.

N.A.

Auteur

  • David Reibenberg, Nathalie Arensonas, Hubert Heulot, Conrad Freeling
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