Après des débuts tonitruants, Vortex doit affronter ses premières turbulences. Cette société de transport, créée au début des années 2000 par Éric Heudicourt, vient de clore son exercice 2015 avec un chiffre d’affaires de 50 millions d’euros, en hausse de 3 millions par rapport à l’an dernier. Mais ses marges sont sous pression.
« Le transport de personnes en véhicule léger est un marché qui souffre structurellement, car nous sommes à la croisée des chemins avec tous les autres modes de transport (VTC, taxis, associations) », déplore Guilhem Sala, le Pdg de Vortex, chef de file des entreprises de transport de moins de neuf places. Établie à Montpellier, cette grosse PME emploie 2 800 personnes (dont 2 700 conducteurs). Elle rayonne sur une soixantaine de départements et subit de plein fouet un assaut de concurrence.
Le marché du transport scolaire, cœur de son activité, le transport de personnes à mobilité réduite (TPMR) ou le transport à la demande (TAD) n’est pas seulement partagé par les cinq ou six groupes nationaux et la dizaine d’opérateurs régionaux recensés par la profession, mais aussi par « des milliers de petites structures comme les taxis, détenteurs pour certains de la licence Loti qui peuvent prétendre au transport scolaire ». Et à entendre Guilhem Sala, cette compétition féroce s’est accrue ces derniers mois, avec la bénédiction des autorités organisatrices des transports telles que les conseils départementaux: « Nous avons tous les jours des marchés remis en cause. Il faut bien comprendre que nos clients, les départements, souffrent beaucoup en ce moment. Les budgets sociaux ont beaucoup augmenté à cause de la crise et les dotations de l’État baissent ».
En bout de chaîne, les budgets transport s’en trouvent affectés et les départements n’hésitent plus à jouer de cette nouvelle concurrence, moins chère et parfois plus souple, pour faire chuter les prix.
C’est après douze ans d’un développement éclair, que pour Vortex les premières difficultés sont survenues: « Cette année, notre chiffre d’affaires a certes augmenté de 3 M€ par rapport à 2014, mais cela ne veut pas dire pour autant que le résultat est en hausse. Nos marges ont fondu comme peau de chagrin pour atteindre un niveau proche de zéro ». La réputation sulfureuse de l’entreprise, attaquée par les syndicats, l’oblige à respecter scrupuleusement les réglementations sociales, sécuritaires et environnementales pour rester leader. « Au départ, ce mode de transport avait une dimension artisanale. Ce n’est plus le cas. »
Pour remettre de l’ordre dans ce secteur en ébullition, Guilhem Sala se dit favorable à la création d’un titre commun visant à unifier les réglementations: « Les taxis et les VTC font le même travail. Vortex exerce aussi, en quelque sorte, le même métier que les taxis ». À l’heure actuelle, personne ne s’y retrouve vraiment: « C’est trop complexe. Je comprends les taxis qui nous envient notre licence gratuite, mais j’aimerais bien, moi aussi, obtenir leur droit de prendre des passagers à la volée ou d’emprunter les files de bus. On se fait tous la guerre, et pourtant, on n’ira pas contre le sens de l’histoire ». Ce libéral affiché estime par ailleurs qu’interdire les plate-formes numériques serait une erreur. « Il faut néanmoins modifier le cadre réglementaire. Prenez Airbnb dans l’hôtellerie, des choses vont bientôt changer. Dans le transport, autant je suis hostile à Uberpop autant je ne suis pas contre Uber, car ils paient leurs charges et leurs impôts. » S’adapter ou mourir, en somme. Guilhem Sala s’appuie d’ailleurs sur l’exemple de la vente par correspondance: « Je cite souvent le syndrome La Redoute, qui n’a pas voulu prendre en compte l’arrivée de nouveaux acteurs sur Internet. Vous avez vu le résultat? »
Pour sortir gagnantes de cette période de mutation, les entreprises du secteur se fédèrent autour d’une stratégie commune. Le patron de Vortex aimerait, à ce titre, que la plupart de ses concurrents rejoignent le syndicat Première ligne dont il a été l’un des initiateurs: « Actuellement, il y a des négociations pour accueillir de nouveaux acteurs », annonce-t-il.
La loi du 1er juillet 2012 a établi un cadre précis fixant les règles de délivrance de l’attestation de capacité professionnelle en transport léger de personnes, obtenue à l’issue d’un examen écrit. Une formation préalable de 140 heures, portant sur « un référentiel de connaissances », dans un centre de formation agréé est obligatoire si le candidat n’est pas titulaire d’un baccalauréat professionnel de transport.
Cette attestation peut aussi être délivrée « par la voie de l’expérience professionnelle ». La loi indique que cette disposition s’applique aux « personnes qui fournissent la preuve qu’elles ont géré de manière continue et principale, durant deux années au minimum, une entreprise de transport public routier de personnes, sous réserve qu’elles n’aient pas cessé d’exercer cette activité depuis plus de 10 ans ». Et de préciser que cette attestation de capacité transport léger « ne peut être délivrée par la voie de l’expérience professionnelle lorsque l’expérience en question a été exercée à titre accessoire, puisqu’une condition de direction continue et principale de l’activité est exigée ».
Sont dispensés des stages de formations les dirigeants « exerçant une activité de transport public routier de personnes accessoire d’une activité principale autre et qui possèdent un seul véhicule affecté à cet usage, inscrites au registre avant le 28 décembre 2011 en ayant bénéficié de la dispense de capacités financière et professionnelle ».
À condition toutefois que l’entreprise en question soit inscrite « au titre du régime dérogatoire du paragraphe 5.4.b du décret du 16 août 1985 ». Enfin, les entreprises de taxis inscrites au titre du régime 5.5 peuvent continuer d’exercer sous un régime dérogatoire avec un seul véhicule. « Si ces entreprises souhaitent développer leur activité (utilisation de plusieurs véhicules), elles sont alors soumises au droit commun (formation + examen). »
