Non moins de six femmes s’affrontent à Nantes pour remporter la mairie le 22 mars prochain. Elles sont toutes attendues sur la sécurité, le thème central de la campagne. Mais la gratuité pourrait également répondre aux attentes des Nantais, tout comme l’engagement à augmenter la part modale du vélo.
Sans doute que le slogan de Johanna Rolland, maire PS de Nantes depuis 2014, est bien approprié pour juger des priorités liées à cette nouvelle élection municipale. « Nantes en confiance » reflète bien, en effet, les attentes des habitants de la sixième ville française. L’augmentation de la délinquance apparaît bien en tête des préoccupations des Nantais. La maire actuelle s’est déjà saisie de ce problème en annonçant, début décembre 2019, la création d’une police métropolitaine des transports. Toutefois, ce n’est pas avant l’automne prochain que ce nouveau service constitué de policiers municipaux de plein exercice devrait devenir opérationnel.
Au-delà de la sécurité, la gratuité des transports est également un des thèmes de campagne tout comme l’extension du réseau de pistes cyclables. Examinons à présent quelles sont les propositions mises en avant par les quatre principales candidates pour tenter de l’emporter, le 22 mars 2020.
Partante pour un second mandat, la première femme maire de Nantes, Johanna Rolland, confirme dès maintenant que la sécurité constitue la priorité absolue de son prochain mandat. Mais elle entend tout aussi bien soutenir les nouveaux déplacements. Elle propose donc la gratuité des transports en commun le week-end et une baisse de 20 % du prix de tous les abonnements. Elle intègre également dans ses propositions la création de trois lignes de tramway supplémentaires. Afin de battre en brèche l’utilisation de la voiture individuelle, Johanna Rolland prévoit de transformer plus de dix stations de tramway/busway en « stations mobilités ». Celles-ci intégreront les vélos, trottinettes, etc. Le recul de l’autosolisme passera également par la création d’axes réservés au covoiturage et au développement de covoit’Tan et de l’autopartage. Cela se concrétisera aussi par l’intensification de l’intermodalité avec la création de 3 000 places de stationnement supplémentaires dans les parcs relais et autres aires de covoiturage. Enfin, pour réduire encore la place de la voiture, une action visera à mettre en œuvre un plan de nouvelle piétonisation de rues et de places. Conséquemment, le réseau de rues en zone piétonne, zone 30 ou zone mixte passera de 250 à 500 km. Le développement de la mobilité électrique entraînera la généralisation des bornes de recharge pour voitures de ce type ainsi que des vélos dans les parkings, les P + R et les aires de covoiturage.
Enfin, la candidate à sa succession apporte dans ses propositions une attention toute particulière au vélo. La part modale de ce mode de transport non polluant pourrait, en effet, passer des 3 % actuels à 12 % à l’horizon 2030. Au travers du plan Rosam (réguler, organiser, sécuriser et accélérer le mouvement), ce sont ainsi huit mesures spécifiques qui sont déclinées. La première vise à créer un Vélopolitain, c’est-à-dire un réseau express vélo maillé constitué de lignes sécurisées et identifiées. La seconde mesure phare prévoit la création de 7 000 places de stationnement vélo supplémentaires dans la capitale régionale.
Julie Laernoes (EELV), bien placée dans les intentions de vote, veut faire de Nantes une ville écologique et solidaire. Un programme concrétisé au travers de 180 propositions (neuf de moins que Johanna Rolland!). Au rang des mobilités urbaines, la priorité est mise sur les déplacements propres: marche, vélo, bus, tram et train. Là encore, il s’agit de réduire la place de la voiture individuelle en inversant la hiérarchie des modes de transport. La priorité est donc donnée à la marche et au vélo, puis aux transports en commun, en proposant des alternatives crédibles à la voiture. La première mesure vise à faciliter la marche en élargissant l’espace piétonnier dans les lieux à forte fréquentation piétonne et dans les quartiers.
Reprenant à son compte l’objectif de 12 % de part modale du vélo à l’horizon 2030, Julie Laernoes prévoit également de multiplier par quatre la pratique quotidienne de la bicyclette. Comment? En débloquant la somme de 115 millions d’euros pour mettre en place un réseau d’infrastructures cohérent et sécurisé. Au-delà de la multiplication des stationnements pour les vélos sur l’espace public, des locaux vélos fonctionnels seront créés dans les immeubles. Une Maison associative du vélo et de la marche sera installée dans chaque quartier, pour favoriser l’auto-réparation. Des vélos pour l’ensemble des jeunes de moins de 26 ans à Nantes seront, par ailleurs, mis à disposition. Le déploiement initial portera sur 30 000 vélos.
La troisième proposition prévoit de créer le Train express du quotidien, un réseau ferroviaire métropolitain assurant un passage au minimum toutes les 30 minutes en heures de pointe et toutes les heures le reste de la journée. Pour proposer une alternative efficace à la voiture, Julie Laernoes s’appuiera sur l’étoile ferroviaire existante et sur les anciennes gares de quartiers, tout en amplifiant les connexions entre les gares, le réseau TAN et le réseau cyclable métropolitain.
Le réseau TAN n’est pas oublié puisqu’il est question de le « booster » en mettant en place plus de passages et de lignes interquartiers. Plus en détail, cela passe par la relance des investissements structurants présentés comme « inexistants depuis 2006 » et par le renforcement des fréquences, notamment les soirs, les week-ends et pendant les vacances scolaires. Clairement, la candidate souhaite sortir du modèle « en étoile » pour à la fois relier directement entre eux les quartiers (nouvelles connexions, nouvelles lignes) et coordonner le réseau TAN avec les autres réseaux de transport (notamment celui des cars régionaux Aléop).
S’agissant de la place des voitures en ville, celle-ci devrait être sérieusement réduite avec une batterie de mesures fortes: interdiction de création de nouveaux parkings en centre-ville et de nouveau franchissement routier de la Loire (pour obvier aux traditionnels bouchons du pont de Cheviré, par exemple), et développement de la flotte de véhicules propres en autopartage. Des voies dédiées aux transports collectifs et au covoiturage seront, par ailleurs, créées sur les pénétrantes et les grands boulevards. Enfin, une limitation à 30 km/h sera instaurée sur l’intégralité des voies à l’intérieur du périphérique.
La gratuité des transports est, là encore, sur la table. Julie Laernoes propose, pour sa part, une gratuité des transports pour les jeunes de moins de 26 ans.
Pour la troisième candidate, Laurence Garnier (LR), l’enjeu de cette municipale se situe bien autour de la sécurité. D’ailleurs, elle avait adressé une lettre ouverte en ce sens à Johanna Rolland, le 16 décembre 2019. Avec comme slogan choc: « La sécurité, on va s’en occuper », la vice-présidente de la Région des Pays de la Loire propose toute une batterie de mesures autour de ce thème: doubler les effectifs des policiers municipaux et les armer, assurer une présence policière 24h/24, installer cent caméras supplémentaires dans les transports et dans les onze quartiers de la ville.
La candidate LR veut s’attaquer également à l’accroissement du nombre de véhicules dans la ville liée à l’augmentation de sa population et à celle des communes de la métropole. L’objectif premier de la candidate est de désaturer le centre-ville de Nantes et de réduire le nombre de passagers contraints de venir ou de passer par Nantes en voiture ou en transports en commun. Elle veut donc restructurer le réseau en passant, d’une part, d’un réseau en étoile à un réseau en toile d’araignée afin de bien préparer le territoire autour d’une métropole locomotive et non pas aspirateur, et anticiper, d’autre part, la gestion des flux des deux grands pôles d’aménagement urbain que sont l’île de Nantes et Chantenay.
Ces priorités passent par l’abandon des projets de doublement du pont Anne-de-Bretagne et des bouts de ligne de tramway 6 et 7 sur l’île de Nantes. Le gain en serait de l’ordre de 100 millions d’euros qui pourraient être, pour partie, réutilisés pour la réalisation de la connexion des lignes 1 et 2 du tramway et le lancement de connexions de la ligne 1 à la ligne 3 et de la ligne 3 à la ligne 2 sur la partie ouest de Nantes. Laurence Garnier pense que « cela créera un véritable réseau métropolitain qui soulagera le centre de Nantes et fera gagner un temps précieux aux usagers ».
Au-delà du lancement d’une étude pour une desserte de l’est de l’agglomération, la candidate prône aussi le lancement d’un projet de chemin de fer urbain en reliant Chantenay au centre de Nantes. Là ne s’arrêtent pas les projets ferroviaires puisqu’il est aussi question d’un travail à réaliser avec SNCF Réseau autour d’un réseau express métropolitain nord/sud-est/ouest.
Le vélo est également en pointe dans les propositions faites aux Nantais. Laurence Garnier entend donc créer, si elle est élue, un réseau Vélo sécurisé, large et continu (SLAC). Elle prévoit aussi de lancer un plan « Vélo pour Tous ».
S’écartant résolument des positions de Johanna Rolland et de Julie Laernoes sur le sujet, la conseillère municipale de Nantes est vent debout contre la gratuité des transports. Elle propose, pour sa part, de diminuer de 15 % le coût de l’abonnement tout en établissant la… gratuité jusqu’à onze ans.
Dernière des candidates à avoir annoncé son programme, Valérie Oppelt (LREM) juge que le défi des déplacements est de taille. C’est pourquoi son programme est articulé autour d’une idée forte érigée en slogan de campagne: « Se déplacer mieux dans une métropole où l’on respire mieux! »
Elle se démarque de ses adversaires sur certains points, comme celui de créer un pont transbordeur entre Salorges et l’île de Nantes. Le dernier en date a été détruit en 1958. Elle prône également la création de trois navettes à hydrogène dont une pourrait relier l’aéroport de Nantes-Atlantique.
Ses autres propositions sont moins « disruptives » car elles constituent des réponses aux besoins des Nantais. Ainsi, la députée prône le développement des transports en commun à haute capacité (tramway, Busway, Chronobus) au-delà du périphérique ainsi que sur des trajets circulaires qui relient les lignes entre elles. Elle veut également développer les moyens de transport par bateaux en accélérant l’implantation des Navibus « multi-arrêts ».
Mais à l’instar de toutes les candidates, Valérie Oppelt entend faire de Nantes une ville référence sur l’usage du vélo. Et cette ambition est chiffrée. Elle est évaluée à 120 millions d’euros à l’échelle de la métropole. Elle propose donc la mise en place d’un réseau cyclable sécurisé. La place du vélo sera intégrée dans un plan global des déplacements pour faire cohabiter vélos, trottinettes, piétons, transports en commun et les autres véhicules motorisés.
Les voitures ne sont pas mises au ban pour autant. Il est, en effet, prévu la création de cinq nouveaux parcs relais de 800 places chacun. Donnant accès à d’autres moyens de déplacements (vélos, bus, etc.), ils seront équipés de toitures solaires.
Mais pour « se déplacer mieux », la candidate est bien consciente qu’il faut donner un coup de pouce pour l’utilisation accrue des transports collectifs. Ceux-ci ne représentent actuellement que 15 % des déplacements (et 16 % à l’horizon 2030!). Elle propose donc « une tarification plus simple et plus juste » avec notamment la gratuité des transports pour les scolaires, et un passage de 1 à 2 heures de validité du ticket. Elle suggère également la création du Pass Neptune multimodal, associant les transports en commun et autres modes de transport comme les Navibus et les tram-trains. Il servirait tout à la fois de support des abonnements annuels, des abonnements en paiement à l’usage et des recharges de tickets.
309 346 habitants en 2017 contre 291 604 habitants en 2012
405 millions d’euros de recettes (2018)
368 millions d’euros de dépenses (2018)
181 millions d’euros de dettes au 31 décembre 2018, soit 582 euros par habitant (1 112 euros par habitant pour les villes françaises de plus de 100 000 habitants)
185 693 emplois en 2016
6,5 % Taux de chômage (2e trimestre 2019)
143,8 millions de voyageurs sur le réseau TAN en 2018
50 % des personnes venant travailler à Nantes le font en voiture, 27 % prennent les transports en commun et 10 % utilisent les deux roues
Un projet de métro a éclos au printemps 2019. Il est porté par le collectif « Métro de Nantes » qui rassemble déjà 200 adhérents. Il se présente sous la forme d’une ligne circulaire, de l’extérieur jusqu’au cœur de l’agglomération, dont l’objet est de relier les principales lignes et les quartiers périphériques tout en traversant également le cœur de ville. Cette ligne de 16,5 km, comportant 19 stations au total, entend également favoriser les déplacements interquartiers sans passer nécessairement par le centre-ville. Sa capacité serait de plus de 200 000 passagers par jour. Johanna Roland souhaite lancer une étude d’opportunité pour sa réalisation. Certes, Nantes fait figure de bon élève de la classe au plan de son endettement par habitant, mais ce projet est loin de faire consensus. Ne serait-ce que par son coût, qui pourrait être de l’ordre de 1,8 milliard d’euros.
