Le TGV, enfin! Le 10 juin, l'Alsace est à 2 h 20 de Paris. La région en a profité pour refondre son offre TER. Objectif: ouvrir l'ensemble de son territoire à la grande vitesse, et faire la part belle aux transports collectifs.
Adrien Zeller, président du conseil régional d'Alsace, a salué avec emphase l'arrivée du TGV Est lors de sa présentation de la nouvelle offre TER. Cette refonte découle de l'entrée en service du TGV le 10 juin, et de la disparition des trains grandes lignes vers la capitale. Elle représente “un nouveau saut qualitatif et quantitatif»“ qui veut “faire bénéficier le plus grand nombre d'Alsaciens des avantages en termes d'accessibilité nationale et internationale procurées par le TGV”, a souligné Hubert Haenel, président de la commission transports.
Réorganisé autour du TER 200, “prolongement naturel du TGV”, le nouveau plan vise à “faciliter toutes les correspondances, tout en préservant le meilleur cadencement possible”. Forte du retour d'expérience de la région Paca (qui avait subi un certain cafouillage lors de la mise en service du TGV Méditerranée), l'Alsace a anticipé dès 2005 les incidences de l'événement sur son réseau. “Des moyens à la hauteur des enjeux économiques, touristiques et environnementaux” ont été déployés. Les dix comités locaux d'animation de lignes (CLAL), initiés par la région depuis 1997, ont été associés à la réflexion. “De nombreuses demandes de modifications ont pu être prises en compte.” L'information sur les changements liés aux contraintes d'exploitation a circulé en amont par le biais de lettres aux abonnés et d'un site internet dédié.
Considérant que les Alsaciens sont de plus en plus nombreux à préférer le TER, il était nécessaire d'augmenter le nombre de liaisons et de fluidifier le trafic, notamment aux nœuds proches de la saturation tels que Vendenheim et Mommenheim, entre Strasbourg et Saverne. Ainsi, 80 TER supplémentaires (+ 17 %), soit 630 trains, circuleront quotidiennement en semaine. L'augmentation du nombre de places par kilomètre dépassera les 28 %, grâce au rajout de deux voitures par rame TER 200. Le nombre d'arrêts s'accroîtra de 10 %, passant de 3 500 à plus de 3 800 par jour. La mise en adéquation de l'offre avec l'arrivée du TGV se traduira par des correspondances TER ferroviaires ou routières avec le premier train du matin, permettant d'arriver à Paris vers 8 h 30, et avec celui du soir quittant la capitale vers 18 h 20. Des correspondances semi-directes permettront de rejoindre nombre de destinations locales.
Un tableau idyllique? Pas tout à fait. Les dysfonctionnements induits par la mise en service du nouveau poste d'aiguillage informatique (PAI) en gare de Strasbourg, les retards occasionnés de ce fait, notamment sur la ligne Strasbourg / Molsheim / Rothau, et la contestation syndicale qui a conduit à un nombre inhabituel de mouvements de grève ces derniers mois, ont terni l'image de marque de la SNCF et fait monter la grogne chez les voyageurs.
A-t-on trop exigé des personnels? Marie-Pierre Meynard, directrice de la région SNCF de Strasbourg, ne minimise pas les difficultés, mais elle rappelle qu'un contrat lie l'opérateur à son AO. La SNCF “s'adapte de manière raisonnée et concertée” au bouleversement. Quant au PAI, l'outil est désormais “maîtrisé” et la ponctualité en gare de Strasbourg “comparable à celle précédant la mise en service du nouveau poste”. Adrien Zeller affirme avec force que “productivité n'est pas un gros mot”. À l'instar de ce qui se pratique en Allemagne ou en Suisse, il plaide pour “un effort partagé et équilibré” des deux parties en faveur du service public. “Nous avons pris des décisions difficiles, mais le solde net est positif.” La journée du 10 juin représente “une étape et pas une fin. Rien n'est gravé dans le marbre. Tout peut être reconsidéré”, a-t-il martelé à l'attention des usagers qui devront changer quelques habitudes.
De manière globale, sur les 52 000 voyageurs qui empruntent quotidiennement le TER, l'amélioration des dessertes concerne près de 20 000 d'entre eux par jour (hors Strasbourg, Mulhouse et Colmar). L'offre progressera significativement sur les lignes Strasbourg / Lauterbourg: + 58 %, Strasbourg / Offenbourg (en Allemagne): + 43 %, ou Strasbourg / Bâle: + 10 %. L'introduction de la réversibilité sur les TER 200 permettra, dès l'an prochain, un gain de temps de 20 minutes à chaque changement. Pour 30 000 usagers, le nombre d'arrêts est quasi-stable, mais “avec un positionnement horaire plus favorable en heure de pointe”. Quelque 2 000 voyageurs seront touchés par “une dégradation mesurée» pour des raisons essentiellement techniques (saturation des voies), en attendant l'accomplissement de divers chantiers.
Une fois le TGV arrivé, le TER Alsace poursuivra l'amélioration de la desserte. Une troisième voie de 15 km entre Fegersheim et Kogenheim sur la ligne Strasbourg / Sélestat, représentant un investissement de 93 millions d'euros, sera livrée en décembre 2008. Elle permettra le dépassement des trains omnibus et fret par les TER 200 et TGV (à 220 km/h).
Ce même mois verra le développement de l'offre préfigurant la mise en place du tram-train Strasbourg/ Piémont. Le tram-train Mulhouse / Vallée de la Thur est prévu fin 2010. Enfin, la création d'une quatrième voie entre Vendenheim et Strasbourg, et la modernisation du tronçon Haguenau / Niederbronn sont inscrits au contrat de projets 2007-2013.
Côté matériel, depuis huit ans, la région a financé l'achat de 21 nouveaux autorails grande capacité et d'ici le printemps prochain, 24 rames réversibles régionales seront rénovées et climatisées. Toutes les mesures engagées conduisent à une efficience accrue du service TER, et à des économies de charges sur l'offre routière qui préservera a minima la possibilité d'un aller retour domicile / travail ou école pour toutes les liaisons routières.
Cette refonte et ce développement de l'offre de transports régionaux ont bien sûr un coût: 6,38 millions d'euros TTC, hors compensation de l'État, soit une augmentation de 30 % de la contribution régionale sur fonds propres. “Plus de 93 % de notre budget transport est dédié au fer, contre 7 % à la route”, rappelle Adrien Zeller en insistant sur “la stabilité des tarifs”.
La refonte de l'offre TER aura un impact sur d'autres réseaux de transports. Le département du Bas-Rhin adapte d'ores et déjà l'offre interurbaine de Réseau 67. Dans le Haut-Rhin, où le système de transport est dédié principalement aux scolaires et aux déplacements domicile / travail, la clientèle demande une stabilité des horaires. "L'arrivée du TGV n'entraînera pas une réorganisation de notre offre, mais une adaptation à l'effet raz-de-marée du TGV.
Nous recalons les horaires de toutes nos lignes sur ceux du réseau TER, explique Franck Siegrist, chef du service transport. Toutefois, moins de 2 % de la clientèle prend une correspondance avec le train".
Cette réorganisation est compliquée par le nombre d'opérateurs concernés: 16 entreprises différentes qui exploitent 46 lignes. Dans le bassin de Strasbourg, qui correspond au réseau interurbain de la CTS, 11 lignes lui sont déléguées dans le cadre du service public. Les autres exploitants bénéficient de marchés publics avec une garantie de recette minimale. Depuis 1998, le conseil général a mis en place une tarification départementale par zones concentriques autour des chefs-lieux de quatre bassins de déplacements. En 2008, il est prévu de refondre l'ensemble de l'offre départementale, avec trois grands objectifs : hiérarchiser les transports, renforcer l'interconnexion avec d'autres réseaux, y compris en Allemagne vers Karlsruhe et Fribourg, et repenser la place des transports de proximité, notamment à la demande. Dix systèmes de TAD délégués aux communautés de communes fonctionnent dans le Bas-Rhin.
– 55 000 voyageurs/jour, soit l'équivalent d'une file de 200 km de voitures transportant en moyenne 1,3 passager.
– 70 % de voyageurs en plus pour le TER en dix ans.
– 25 nouveaux TER mis en service en moyenne chaque année.
– 330 TER par jour en 1997, 550 en 2006, 630 en juin 2007.
– 17 % de trains et 28 % de places supplémentaires, le 10 juin 2007.
– 32 voitures TER 200 supplémentaires en 2008 (+ 50 % de places).
– 35 millions d'euros investis chaque année dans le matériel roulant.
– Un parc neuf ou rénové à plus de 90 % en 2009.
Tous pour un. Un pour tous. Avec l'arrivée en ce début d'année de trois nouvelles collectivités (Sélestat, Haguenau et Obernai) au sein du comité de coordination des AO alsaciennes, un pas supplémentaire a été franchi, le 10 mai dernier, pour offrir à l'ensemble des usagers une couverture exhaustive de l'offre de transport public régional. Ce n'est pas encore la Carte Orange francilienne où une AO unique simplifie l'organisation, mais on s'en rapproche.
Avec le dispositif Alsa+, l'Alsace est la première région française à fournir à ses abonnés salariés et étudiants un titre de transport unique valable sur dix réseaux (bus urbains ou interurbains, trams et TER). Un habitant de Sélestat peut s'acquitter d'un seul abonnement pour se rendre à Strasbourg, et emprunter successivement un bus du réseau TIS, un train TER et un tram de la CTS. L'ouverture aux voyageurs occasionnels se concrétisera dans la région strasbourgeoise en 2008 avec un titre unique 24 h lors du lancement du cadencement sur la ligne Strasbourg / Molsheim (préfiguration du tram-train). En quittant l'aéroport de Strasbourg, il sera possible de prendre un train, puis un bus urbain, et même de se rendre en Allemagne via le réseau de l'Ortenau.
Pour faciliter les déplacements, le comité a également entériné la mise en place d'ici à la fin 2008, d'un portail internet offrant une information "de porte à porte". L'ambition réside dans l'intégration de tous les modes de transport, y compris la marche à pied et le vélo, à l'échelle transfrontalière, la prise en compte des personnes à mobilité réduite et une information événementielle.
Monument emblématique de l'Alsace, le château du Haut-Kœnigsbourg sera desservi cet été par une ligne d'autocars. D'autres sites seront accessibles par transports en commun.
La desserte du château fonctionnera, sous maîtrise d'ouvrage du département, depuis la gare de Sélestat, sur la ligne TER 200 Strasbourg / Mulhouse. Elle passera par la Volerie des aigles et la Montagne des singes, avec dix A/R quotidiens entre Pâques et la Toussaint. "Les cars seront accessibles aux personnes handicapées. Le ticket de transport (4 euros pour un adulte et 2 euros pour un enfant) permettra d'obtenir un tarif réduit dans les trois sites", précise Franck Siegrist, du conseil général. Cette réalisation est une des concrétisations de la stratégie de développement touristique définie en novembre 2005 par la région dans la perspective de l'arrivée du TGV. L'ensemble des acteurs publics et socio-professionnels ont été associés à la réflexion. "Une de nos actions a porté sur l'accès aux principaux sites par les transports en commun, sans se cantonner au patrimoine des seules grandes villes. Nous avons une double approche: économique, en promouvant les entreprises privées, et environnementale", précise Jean-Pierre Vraux, responsable de la stratégie touristique.
À Ungersheim, le Bioscope entame sa seconde saison avec une offre étoffée et de nouvelles ambitions. Désormais plus étroitement associé à l'Écomusée voisin, ce nouveau pôle touristique propose un billet d'accès combiné et, en juillet-août, une navette gratuite toutes les heures au départ de la gare SNCF de Bollwiller.
Les deux parcs sont également desservis par Solea, l'exploitant du réseau mulhousien.
À moyen terme, la possibilité de faire circuler un train historique entre la gare de Bollwiller et les deux parcs est à l'étude.
Un circuit en car sur la Route des vins, confié à un opérateur privé, est en projet, tout comme une desserte du camp du Struthof et du mémorial de Schirmeck.
